A Montarcher, retour aux sources
C’est un pari osé si ce n’est un peu fou qui vient de se concrétiser après deux ans. La commercialisation de l’eau de Montarcher a récemment été autorisée. Un aboutissement pour son PDG, Jean-Louis Bissardon, qui signe ainsi la dernière étape dans la résurrection de cette source.
Perché à 1 162 mètres d’altitude, c’est l’un des villages les plus hauts de la Loire. Malgré ses 66 habitants, Montarcher est connu des Ligériens, que ce soit pour sa vue à 360 degrés sur le Velay et le Forez, pour son patrimoine, son restaurant, ses sentiers de randonnée, ou encore sa fête du 15 août. Et désormais, viendra aussi s’ajouter son eau de source. Au mois de novembre, Jean-Louis Bissardon obtenait l’autorisation de commercialiser l’eau plate, et il y a quelques semaines, c’est l’eau pétillante qui vient d’être autorisée à la vente. La fin d’un processus qui aura duré deux ans, et qui permet désormais à l’eau de source de Montarcher d’investir un marché très concurrentiel.
Des autorisations au compte-goutte
Administrativement parlant, commercialiser de l’eau est un processus long. En toute logique, de nombreuses autorisations sont nécessaires, qu’elles soient préfectorales, ou qu’elles relèvent de l’Agence régionale de santé. « Sur le processus industriel et les analyses de l’eau, l’ARS réalise une recherche de 700 à 800 molécules de pollution, détaille Jean-Louis Bissardon, reconverti dans l’eau après une vie dans les jus de fruits. Il a fallu obtenir un arrêté de la préfecture pour le prélèvement, puis le conditionnement. Tout cela fait que ça a été laborieux, mais j’étais au courant dès le départ ». Ainsi, réveiller la belle endormie a nécessité la mobilisation de nombreux acteurs.
2 millions d’euros investis
Car ce n’est pas la première fois que la source est exploitée. Jusqu’en 2018 et pendant plus de 20 ans, elle n’était commercialisée que sous forme de bonbonnes de 20 litres, à destination des fontaines à eau que l’on trouve en entreprise. Après 2018, le bâtiment avait quasiment été laissé en friche, selon le chef d’entreprise. Ainsi, 2 millions d’euros ont été investis pour rénover le bâtiment et y installer un outil de production flambant neuf, aux normes et automatisé. Un investissement subventionné à hauteur de 20 % par la Région, le Département, Loire Forez Agglomération, ainsi que le fonds européen Leader pour le développement de l’activité économique en milieu rural. « J’ai fait ce choix d’investir sur la partie production pour qu’elle soit pérenne ».
Verre l’avenir
Place désormais à la partie diffusion et commercialisation des bouteilles. Pour cela, Jean-Louis Bissardon a délibérément choisi de ne produire que des bouteilles en verre qui, sur certains marchés seront consignées. Elles seront distribuées en cafés, hôtels, restaurants, ainsi qu’en circuits courts ou bios. « En partant de la qualité exceptionnelle de cette eau, j’ai trouvé que ce positionnement était intéressant. Un produit qualitatif, mais pas de luxe, régional, et du quotidien. D’autant que depuis le Covid, on va vers une régionalisation de l’économie, c’est donc s’adapter à une demande du consommateur ». Les eaux sont donc déjà sur de grandes tables ligériennes comme le Clos Perché, ou Château Blanchard, et distribuées chez Pré de chez vous ou certains magasins Biocoop. Lors du Sirha à Lyon, le sommelier de Régis Marcon a également eu l’occasion de goûter et d’apprécier cette eau.
Soif d’indépendance
A commencer par la nature de l’eau en elle-même. C’est en effet l’une des plus faiblement minéralisée de France (40 mg par litre) et qui est également très peu salée (4 mg par litre). Une vraie différence pour l’entrepreneur. « Si vous faites infuser du thé dans cette eau, vous en sentirez davantage les arômes. Et le corps humain n’a pas besoin de tous ces minéraux qu’il n’assimile quasiment pas du coup. Par ailleurs, il s’agit d’une source d’eau plate, ce qui est assez rare dans la région. Nous gazéifions une partie de la production pour avoir un effet de gamme qui soit intéressant ». Ici, le chef d’entreprise met en avant le réel intérêt gustatif de cette eau extrêmement pure, mais pas que. Relancer cette exploitation en fait la dernière source indépendante, parmi des acteurs comme Danone ou Nestlé.
Se jeter à l’eau
Et Jean-Louis Bissardon a bien l’intention d’en faire un atout, dans une société de plus en plus soucieuse de consommer local et de faire travailler davantage les indépendants. En effet, cela semble davantage cohérent que de proposer de la San Pellegrino à table. Conscient du marché, il explique : « Il y a certes une prise de risque, mais qui est étudiée, car nous sommes sur un marché composé uniquement de multinationales, ce qui nous laisse de la place. D’autant que nous sommes sur un bassin de consommation important en Auvergne Rhône-Alpes. On arrive donc sur un marché concurrentiel, mais sans vraiment de concurrents directs ». Selon la manière dont le marché progresse, le chef d’entreprise sera amené à recruter sur la partie production. Pour le moment, quatre personnes travaillent à temps plein avec un poste qualité, un commercial, une personne sur le volet administratif et Jean-Louis Bissardon lui-même sur la partie industrielle.