A Saint-Etienne Métropole comme ailleurs, l’économie doit montrer « patte verte »
Après 2 ans d’absence, la Conférence économique de Saint-Etienne Métropole faisait son retour mardi pour une 5e édition prenant place à La Verrière. 350 « acteurs économiques » du territoire ont assisté à l’intervention de Gaël Perdriau, président de la collectivité sur la thématique « la métropole en action face aux crises ». Invité d’honneur, l’économiste Philippe Dessertine a exposé sa vision à la fois pessimiste et optimiste de la situation géopolitique et économique d’un monde où l’impératif du développement durable conditionnerait cependant déjà l’investissement…
« Je n’en fais pas le pari. C’est une actualité. » Directeur de l’Institut de la Haute Finance de Paris, l’économiste essayiste – parfois aussi romancier mais c’est un autre chapitre – Philippe Dessertine constate dans son dernier ouvrage, Le Grand Basculement (Robert-Laffont, 2021), l’avènement d’une nouvelle ère économique mondiale où, fruit paradoxal de la mondialisation, la rentabilité d’une entreprise n’est plus l’étalon phare pour lever les financements. TPE, PME, ETI, grands groupes, multinationales : toutes doivent déjà et devront encore plus montrer « patte verte » aux investisseurs via leurs informations extra-financières.
« Le développement durable, la RSE (responsabilité sociétale des entreprises, Ndlr) conduisent désormais leur accord en premier lieu, estime Philippe Dessertine. Le projet n’est considéré viable qu’ainsi. C’est aussi valable pour recruter quand on parle de marque employeur. De plus en plus de gens cherchent d’abord du sens et sont disposés à privilégier un poste pour cela avant même la rémunération. L’Europe de l’Ouest est à la pointe sur ce sujet mais la Chine suit aussi avec, dans les deux cas, des réglementations de plus en plus poussées méconnues du grand public mais qui conditionnent déjà les marchés. Les Etats-Unis sont plus à la traîne mais suivent quand même et devront suivre. » Total n’a par exemple pas changé de nom par hasard. Il s’agit là de bien plus qu’une opération de com’ pour l’auteur…
Des réglementations de plus en plus poussées autour du développement durable méconnues du grand public conditionnent déjà les marchés.
Philippe Dessertine, directeur de l’Institut de la Haute Finance de Paris
Un contexte mondial qui n’a rien de rassurant
Oui mais les retours en arrière liés à la Guerre en Ukraine ? Ceux autour de l’énergie avec l’idée de recours au gaz de schiste ou encore celle de se passer des jachères dans l’agriculture ? « Ce n’est que temporaire », projette-là Philippe Dessertine. Ça, c’est pour la 2e partie à la nature, disons, positive de l’intervention de l’économiste devant 350 « acteurs économiques » de Saint-Etienne Métropole. Les analyses de Philippe Dessertine ont particulièrement tapé dans l’œil d’un de ses lecteurs : Gaël Perdriau qui se sent « très en phase » avec elles. Aussi, le président de la métropole en a-t-il fait l’invité d’honneur de la 5e Conférence économique organisée par pour la première fois dans la Verrière. La nouvelle salle réceptive de Saint-Etienne Evénements, voisine du Centre des Congrès, fonctionnelle depuis septembre 2020, a d’ailleurs pu être enfin inaugurée à cette occasion.
Un bel écrin pour recevoir Philippe Dessertine dont les propos de première partie, sur la situation géopolitique mondiale et ses conséquences économiques – grave pénurie alimentaire, énergétique, de matières premières, inflation galopante, remontée des taux, confinements en Chine, le tout chapeauté donc par le réchauffement climatique – n’a rien de très rassurant. Pour cet opposant à la décroissance aussi, il convient donc de regarder la situation en face et d’adapter sa stratégie aux tendances évoquées plus haut, que l’on tutoie le CAC40 ou que l’on soit un artisan local du BTP répondant à la commande publique. L’objet de la Conférence économique de Saint-Etienne Métropole ne se limite bien sûr pas à un cours magistral incitant des chefs d’entreprise, souvent la tête dans le guidon à prendre de la hauteur et donc les bons virages. C’est aussi pour la collectivité l’occasion d’envoyer des signaux au monde économique local.
Ce quoiqu’il en coûte métropolitain
L’objectif de cette rencontre, c’est aussi d’en faire prendre conscience à nos entreprises, de tous niveaux, que nous avons des marchés publics à proposer, qu’elles peuvent y accéder.
Gaël Perdriau, président de Saint-Etienne Métropole
Gaël Perdriau s’est exercé dans son intervention à démontrer qu’elle ne l’a pas laissé tomber en rappelant ses mesures de soutien économico-social, son propre quoiqu’il en coûte local, mettant sur la table « un plan de relance métropolitain de 320 millions d’euros » tout en poursuivant cependant le désendettement. Et ce n’est pas fini, a rappelé Gaël Perdriau qui a mis en avant les investissements à venir de Saint-Etienne Métropole. Le « pacte financier métropolitain » prévoit grâce, cependant à une légère hausse de la fiscalité sur les ménages et… les entreprises, de passer de 400 M€ d’investissement sur le premier mandat à 800 M€ sur l’actuel. A quels grands chantiers faut-il s’attendre ?
« Nous ne cachons rien, et il ne faut pas s’attendre à un projet spectaculaire sorti des bois, assure Gaël Perdriau. Rien que sur 2022, nous investirons 120 M€ pour assurer par exemple, les travaux majeurs d’assainissement ou lancer la construction de la patinoire. L’objectif de cette rencontre, c’est aussi d’en faire prendre conscience à nos entreprises locales, de tous niveaux qu’elles peuvent accéder à ces marchés publics. En particulier celles qui ne répondent jamais à des appels d’offre pour lesquels elles ont toute leur légitimité. » D’où la présence dans la salle de techniciens de Saint-Etienne Métropole pour sensibiliser et informer les dirigeants, curieux d’en savoir plus via des discussions directes.