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Avenir de Casino : rien n’est encore décidé, priorité au désendettement

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Il ne fallait pas attendre de l’assemblée générale des actionnaires ce mercredi à Paris, objet d’une manifestation de la CGT maintenue à distance, qu’elle accouche d’une annonce spectaculaire sur un changement de contrôle du groupe. Perspective qui inquiète énormément les syndicats et les salariés, a fortiori ceux de la Loire au niveau de l’emploi. Les négociations se poursuivent tandis qu’il n’y aura pas de dividendes cette année encore. Comme depuis 2018…

Les employés de Casino manifestants de la CGT ce matin à l’occasion de l’AG annuelle des actionnaires. Photo transmise par la CGT.

Moins 83 % en 5 ans, moins 60 % en un an et moins 5,95 % rien qu’aujourd’hui à la bourse Euronext à Paris où l’action de Casino se négociait, à la clôture, à pas tout à fait 6,715 €. La dégradation de la note attribuée à la dette du groupe par l’agence S&P, communiquée hier soir, ne risquait pas d’inverser une tendance structurelle. La décision annoncée par Casino, en avril, d’étudier la possibilité d’ouvrir une procédure de conciliation avec les créanciers serait, selon l’AFP, associée par l’agence à l’éventualité d’un défaut de paiement qui pour elle semble inévitable, sinon une restructuration, dans les six mois qui viennent « en absence de changements favorables ». La dette nette du groupe s’élevait fin 2022 à 6,37 Md€ contre 5,86 Md€ un an plus tôt. Elle a cependant depuis reculé de 1,3 Md€ pour reculer à 5,1 Md€ fin mars au prix de cessions, comme des parts significatives du capital d’Assai à plusieurs reprises ces derniers mois (il n’en contrôle plus que 11,7 %).

Il faut ajouter au tableau des résultats annuels 2022 accusant une perte nette de 316 M€ (contre 534 en 2021) et un chiffre d’affaires dont la progression ne cache pas les inquiétudes qu’il inspire, car avant tout et hors inflation, porté pour les activités en Amérique latine. C’est dans ce contexte que 490 actionnaires étaient réunis ce mercredi matin à la Maison de la Chimie à Paris, soit « seulement dix de plus que l’an passé », précise à If Saint-Etienne le groupe, pour illustrer le fait que cette AG annuelle tenue au mois de mai, comme c’est le cas chaque année, ne revêtait pas de caractère spécial et ne risquait pas donner lieu à des annonces autour des tractations en cours sur un éventuel changement de contrôle. Des discussions menées avec Teract mais aussi le groupe Les Mousquetaires sont en cours ainsi que, désormais, EP Global Commerce a.s., détenue par l’homme d’affaires tchèque Daniel Křetínský, déjà actionnaire minoritaire mais pesant tout de même 10 % des actions.

Des inquiétudes pour ses emplois dans la Loire

Interrogé en fin d’AG par nos confrères des Echos Investir « sur les conséquences pour les actionnaires, pour le contrôle du groupe et pour la gouvernance d’une augmentation de capital », le PDG Jean-Charles Naouri aurait répondu « qu’il ne peut pas en dire plus sur ces sujets que ce qui figure dans les communiqués » (ceux de fin avril). Dans ce contexte, forcément, il n’y aura pas de dividendes accordés aux actionnaires cette année, comme c’est le cas depuis 2018, car « la priorité est donnée au désendettement », nous confirme le service presse de Casino, contacté par téléphone. « Les autres principaux sujets abordés oralement ont, en particulier, tourné autour de la tenue de certains magasins, pour lesquels un suivi d’amélioration a été mis en place avec des indices démontrant une amélioration de la situation ». Des questions écrites ont été adressées et sont consultables avec leurs réponses sur le site de casino.   

Officiellement, 2 000 personnes sont rattachés au siège de Casino à Saint-Etienne. © IF Saint-Etienne

Statu quo donc, pour l’heure, sur l’avenir de l’entreprise, sans doute la plus emblématique de la Loire après 125 d’existence où elle emploie de 4 000 à 5 000 personnes (sur 208 000 collaborateurs), et qui inquiète tant localement. Casino reste un acteur économique de premier plan pour le département, fournisseur d’emplois dont beaucoup de haut niveau avec de nombreux cadres à Saint-Etienne. Le siège stéphanois de Châteaucreux (doublé de celui de Vitry) est réputé pour accueillir 2 000 personnes. « On doit être plus être autour de 1 500 personnes y travaillant réellement car des centaines d’employés, comme des commerciaux nomades, n’y sont rattachés que théoriquement. Mais nous n’avons pas les chiffres exacts comme pour tout on nous maintient dans le flou », lance Ali Eloued, délégué syndical CGT, employé à Firminy.

Manifestation de la CGT tenue à distance

Au moment où nous l’avons joint par téléphone ce milieu d’après-midi, il était assis dans un TGV le ramenant de Paris où il pouvait apercevoir à quelques rangs de lui « plusieurs grosses têtes de la Loire sortant visiblement de l’AG ». Comme chaque année, hors période Covid, la CGT a organisé une manifestation visant cette même assemblée générale. Aux inquiétudes montantes sur « l’emploi » et la « dérive financière » du groupe déjà mise en avant précédemment, s’ajoutait des revendications sur « les salaires entre inflation et tassements liés à l’augmentation du Smic ». Mais « oui, les craintes portent de plus en plus fortes sur nos emplois en cas de changement de contrôle. Sans lien historique, qu’auraient à faire Les Mousquetaires ou Teract d’un siège à Saint-Etienne ? Et alors que la direction a annoncé il y a deux semaines la possible cession de 100 enseignes, on peut aussi s’interroger sur le devenir de nombreuses enseignes en cas de prise de contrôle des Mousquetaires plus tourné vers les franchises que Casino. »

Qu’auraient à faire Les Mousquetaires ou Teract d’un siège à Saint-Etienne ?

Ali Eloued, délégué syndical CGT

Quant aux intentions affichées par Daniel Křetínský, « c’est à se demander si ce n’est pas, en tant qu’actionnaire à 10 % une manœuvre pour faire monter les enchères vis-à-vis de Teract et des Mousquetaires. La seule bonne prise de contrôle éventuelle, c’est celle qui maintiendra les emplois ».  Le syndicaliste tient à signaler que la manifestation de la CGT où environ 80 personnes de la région parisienne et d’un peu toute la France étaient, selon lui, présentes n’a pas pu se tenir, comme en 2022, dans la rue même qui abrite la Maison de la Chimie. « Nous avons, à nouveau été tenus à distance par les forces de l’ordre et cantonnés à l’esplanade des Invalides. Notre liberté d’expression est mise à mal : pas question que ces gens là soient perturbés par le petit peuple ! » Selon l’AFP, les syndicalistes ligériens de la CFDT Guillaume Touminet et Estelle Silbermann auraient confié « avoir été « convoqués à des entretiens préalables à un licenciement » après avoir alerté en 2019 les parlementaires ligériens et la presse sur les risques liés à l’endettement très élevé du groupe ».

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