L’emploi dans la Loire, ça a donné quoi en 2023 et au-delà ?
Emplois Loire observatoire (Elo) et Epures, l’agence d’ingénierie urbaine des collectivités du département aux côtés de leurs partenaires / contributeurs que sont l’Ursaff, la CCI, la CMA et l’université Jean-Monnet, viennent de publier Evolutions économiques dans la Loire, version 2023 / 2024. Beaucoup des chiffres compilés font la comparaison entre 2022 et 2023. Certains entre les 6 ou les 8 premiers mois de 2023 et 2024. Les tendances les plus récentes ne sont donc pas là mais la photographie, chaque année plus précise, et analysée avec le recul nécessaire à se netteté, n’a pas d’équivalent local en termes de recueil et d’analyse statistiques. En particulier sur la situation de l’emploi privé, secteur par secteur.
Les effectifs salariés privés en léger recul
Ils s’élèvent à 199 100 au 31 décembre 2023. C’est, il faut le souligner, 7 300 de plus qu’en 2019 (12 700 de plus qu’en 2014) pour une population qui, elle n’a progressé que de 7 000 habitants entre 2016 et 2021. Mais la « nouvelle » donne est là : par rapport à 2022, ces effectifs reculent de 0,7 %, tandis qu’à l’échelle de la France et dans la région, ils progressent légèrement (+ 0,5 %). 2020 et son contexte très particulier excepté, c’est la première baisse constatée depuis 2015. Il faut toutefois préciser que les effectifs étaient tombés à 182 000 emplois salariés en 2014 et que ceux de 2023 présentent le 2 plus gros contingent de la décennie, nettement au-dessus de ceux enregistrés de 2013 à 2020.
Dans la Loire, si on affine à l’échelle des intercommunalités, entre 2022 et 2023, l’évolution est contrastée. Elle est aussi plus marquée entre le 31 décembre 2022 et le 31 décembre 2023 qu’entre le 30 juin 2023 et le 30 juin 2024, données consolidées les plus fraîches à disposition. Saint-Étienne Métropole qui compte pour plus de 61,3 % de ces emplois recule d’1,2 % (- 1,9 %, du 30/06/23 au 30/06/24), Roannais agglomération de 2,5 % (- 0,8 %, du 30/06/23 au 30/06/24) et Loire Forez de 0,2 % (- 0,1 %, du 30/06/23 au 30/06/24). En revanche, Forez Est (+ 2,2 %), Charlieu Belmont communauté (+ 2,3 %), les Monts du Pilat (+ 2,4 %), le Pilat Rhodanien (+ 1,5 %) augmentent. Côté Vals d’Aix et Isable, c’est le crash (- 6,7 %) tandis que la baisse est nette mais moins marquée sur la Copler (- 2,8 %) le Pays d’Urfé (- 1,2 %).
Ceux de l’industrie augmentent légèrement
La répartition des postes par secteur d’activités au 31 décembre 2023 ne témoigne pas de bouleversements.
Avec 49 500 postes (25,5 %), l’industrie conforte même son pourcentage particulièrement élevé dans la Loire (15,9 % à l’échelle nationale ; 20,3 % au niveau régional) malgré le recul du nombre d’établissements (2 370, – 1,5 %) et de création (880, – 7,4 %). La progression en effectifs a en effet été de + 0,3 % (+ 1,1 % en AuRa et en France) mais elle n’a, en revanche, pas bénéficié à Saint-Etienne Métropole (- 0,7 %) qui compte toutefois 25 740 emplois privés industriels.
Davantage à Loire Forez (+ 0,9 %), Roannais Agglomération (+ 1,2 %) et, encore une fois, Forez Est (+ 2,1 %). Sur le long terme, la désindustrialisation des emplois est, à ce stade, sans parler non plus de reconquête, plus qu’enrayée puisqu’en 2013, quand la part était de 24,9 % avec un gain sur 10 ans, de 1 300 emplois. C’est l’électricité-électronique qui s’avère l’activité la plus dynamique (+ 4,4 %) entre 2022 et 2023 à la différence, c’est hélas classique, de l’automobile (-13,5 %, 310 postes de moins).
La tendance sur les six premiers mois 2024 vis-à-vis des six premiers 2023 est en revanche à un très léger recul du nombre de postes sur l’ensemble industriel (- 0,1 %, – 40 postes ; – 30 établissements), toujours plus marqué dans l’automobile (- 140 postes).
Évolution des effectifs contrastée dans les autres secteurs
Derrière la fragile locomotive qu’est l’industrie pour tous les secteurs, les services occupent le plus d’employés privés ligériens (48 %, 96 040 ; -1,5 %) devant le commerce (18 %, 35 800 ; + 0,8 %) et la construction (17 760, 9 % ; – 2,1 %).
Ce dernier secteur s’il a stagné en termes d’effectifs sur une décennie (- 40 postes), subit comme ailleurs mais de manière plus marquée que la moyenne régionale et nationale la crise du bâtiment, perdant aussi entre 2022 et 2023 2,2 % d’établissements (2 790) et voyant leur création reculer de 11,9 %. Le repli des effectifs est généralisé dans toutes les intercommunalités (Monts du Pilat et Monts du Lyonnais font exception) et s’est aggravé de janvier à juin 2024 par rapport à janvier / juin 2023. Sur cette même comparaison temporelle, le nombre d’établissements reculent de 2,1 % (- 60), celui des effectifs de 2,5 %.
Le commerce, lui, malgré des centres-villes souvent réputés en berne (est-ce la périphérie qui en profite ?), voit ses effectifs augmenter de 2022 à 2023 (+ 0,8 %) et deux fois plus vite qu’aux échelles nationale et régionale. A part Roannais Agglomération, la progression est générale, et plus marquée sur Saint-Etienne Métropole (+ 0,7 %). Le nombre d’établissements a lui reculé de 0,1 %. C’est la réparation d’automobiles et motocycles qui est la plus dynamique. En revanche, les six premiers mois de l’année 2024 n’invitent pas à l’optimisme : – 0,7 % d’établissements (soit 30 perdus), – 0,3 % de postes (110 perdus sur l’ensemble) avec une saignée de 240 emplois dans le commerce de détail…
Au niveau des services, après des hauts et des bas depuis 2013, le secteur avait gagné 5 500 emplois privés dans la Loire entre 2020 et 2022. Ils reculent à nouveau avec 1 400 perdus en 2023 (- 1,5 %) pour revenir à 96 040 malgré une progression d’1,2 % du nombre d’établissements (+ 0,1 % à l’échelle nationale et régionale). C’est la chute de l’intérim qui porte le plus gros de cette baisse (- 1 140 postes). Tendance contrastée touchant Métropole (-1,2 %), Loire Forez (- 1,3 %) et surtout Roannais Agglomération (- 4 %) mais bien moins que des zones plus petites comme Val d’Aix et Isable (- 16 % !). Charlieu / Belmont, Forez Est, les Monts du Lyonnais, les deux Pilat progressent dans ce domaine. Sur les six premiers mois de 2024, la tendance se poursuit dans des tendances analogues : – 1,3 % de postes, + 0,5 % d’établissements. L’intérim intensifie son crash (- 1 200 postes en 6 mois), secondé par la finance / les banques / assurance (- 300 postes).
Les déclarations préalables à l’embauche tiennent en… plus précaires
Les déclarations préalables à l’embauche (DPAE) par les employeurs ont baissé de 2022 à 2023, passant de 209 600 à 205 100 en 2023 (- 2,3 %). Elles ont été portées à 77 % par les services (hors intérim), 11 % le commerce, 8 % l’industrie, 4 % la construction. En recul donc mais encore supérieur à 2019 (à 2 000 près), 2014 et 2013 (7 770 de moins cette année-là). Evolutions économiques dans la Loire dans ce domaine publie des tendances très récentes puisque comparatives aux huit premiers mois de l’année 2023 vs 2024. Et là, surprise, c’est positif : 136 627 contre 137 422. Bémol : le recul se poursuit dans tous les secteurs sauf dans celui des services et sa proportion de DPAE écrasante en progression de 4 300.
Autre écueil et pas le moindre : le type de contrat prévu comparativement sur cette même période qui continue de se précariser. Le recourt à des CDD courts déjà massif au sein des DPAE, s’accentue en passant de 64,2 % à 66,9 %. Celui des CDD longs passe de 16,18 % à 15,23 % et les CDI de 19,66 % à 17,86 %.
Le nombre de chômeurs de catégorie A, B et C (activités partielles, voire très partielles pour les B et C) inscrits à Pôle emploi a progressé de 2,8 % sur un an dans la Loire pour atteindre 57 873 demandeurs. Du 1er juillet 2023 au 30 juin 2024, le nombre de demandes d’emploi s’élevait à 73 649. Le taux de chômage est légèrement remonté, à 7,6 % au 2e trimestre 2024 (+0,3 % sur un an ; 7,1 % en France métropolitaine). Par arrondissement, il est de 8,1 % en Loire Sud, de 5,3 % en Loire Centre (Forez au sens large), 7,1 % en Loire Nord (Roannais au sens large aussi).
Les besoins en main d’œuvre reculent
La publication partenariale annonce 20 650 projets de recrutement au 31 décembre 2023 pour 2024, soit un recul de 18,2 %. A 38 % dans les services aux particuliers cependant… 18 % dans les services aux entreprises, 18 % dans l’industrie, 12 % dans le commerce, 8 % la construction et 6 % dans l’agriculture. « Santé humaine et action sociale » portait le plus de besoins (3 270 recrutements prévus) devant « l’hébergement / restauration » (2 150) et les « services scientifiques, techniques, administratif & soutien » (2 000).
61 % des projets de recrutement étaient alors jugés difficiles. Les projets les plus difficiles résidaient dans la construction (78 %), l’industrie (66%). 24 % étaient saisonniers (80 % dans l’agriculture).
Les créations et radiations d’établissements
Les créations passent d’un total de 11 056 à 10 681 en un an, de 2022 à 2023. Un recul d’1,4 %, proche de la tendance nationale. Rappelons qu’elles s’élevaient à 9 736 en 2019 après avoir beaucoup augmenté à partir de 2017, sans doute en raison du statut d’auto-entrepreneur bien souvent – sans l’être systématiquement – illusoire. La création d’établissements dans la Loire est portée encore par les services (56 %), loin devant le commerce (26 %), la construction (10 %) et l’industrie (8 %).
En comparant les 7 premiers mois de 2024 à ceux des quatre années précédentes, on s’aperçoit que la courbe des créations sur l’année en cours se défend très bien, nettement au-dessus des autres même en mai et juin, plongeant davantage cependant cet été qu’en 2023 et 2021 (égale à 2022) mais remonte largement en tête des cinq années comparées en septembre dernier. Les radiations en 2024, qui sur les autres mois ne se distinguent pas spécialement, elles, sont très très marquées sur le mois de juin par rapport aux autres.
Les effectifs de l’artisanat progressent encore un peu
30 210 des 199 100 emplois privés dans la Loire, soit 15,2 %, sont le fait d’entreprises artisanales dans la Loire. Elles se répartissent de manière relativement équilibrée entre services (26 %), Bâtiment (36 %), fabrication (22 %) et alimentation (16 %). Ses effectifs évoluent favorablement puisqu’ils augmentent de 0,8 % entre 2022 et 2023 (contre 1,0 % en région), troisième année consécutive de hausse dans la Loire. Depuis 2020, les effectifs artisanaux ont progressé de 3,3 %.
Le bâtiment enregistre une hausse des effectifs de 2,0 % entre 2022 et 2023 (210 postes). Les services progressent également : + 1,9 % (150 postes). En revanche, le secteur de la fabrication connaît une baisse des effectifs de 0,2 % (- 10 postes) et celui de l’alimentation, une diminution de 2,0 % (- 100 postes). C’est la deuxième année de perte consécutive dans l’alimentation (- 90 postes l’année précédente).
En 2023, 2 703 entreprises artisanales ont été créées dans la Loire soit une baisse des créations (- 12 % entre 2022 et 2023) après plusieurs années de hausse. Le régime de la microentreprise est choisi par les trois quarts des créateurs. L’entreprise individuelle « classique » ne représente plus que 4,0 % des créations. La part des sociétés représente 20 % des immatriculations. Le nombre d’établissements, à 20 280, recule lui de 4,3 % entre 2022 et 2023.
Commerce international : du mieux mais toujours « abyssalement » déficitaire
Ce graphique permet « d’apprécier » la dégradation phénoménale en deux temps de la balance commerciale de la Loire depuis 2013.
Il faut remonter à 2015 pour voir les exportations dominer sur les importations dans la Loire. En rechute, et tombée au plus bas en 2017, la balance commerciale, loin de ses valeurs positives des années 2000 (elles-mêmes bien au-dessus de la période 2012-2015), avait retrouvé l’équilibre ou presque en 2018 (- 600 000 €) et en 2019 (+ 83 000 €), avant de replonger avec la pandémie en 2020 où elle présentait un déficit encore « limité », à 85 M€. En 2021, la balance était plus négative encore et dans des proportions quatre fois supérieures : – 350 M€ ! Soit avec 4,12 Md€ exportés et 4,47 Md€ importés. Il s’agissait alors de la pire année des deux dernières décennies, battue… dès la suivante et à plate couture : en 2022, la balance commerciale de la Loire avait été déficitaire de 680 M€ (!) avec un taux de couverture de 86,8 % (- 5,3 points sur un an) malgré une hausse des échanges, exportations comprises donc (+ 10,2 %) mais beaucoup moins rapide que celle des importations (+ 18,5 %).
En 2023, ce déficit s’est fortement réduit puisqu’il s’est élevé à – 380 M€ : 4,32 Md€ exportés pour 4,7 importés Md€ (92 % de taux de couverture, + 5,2 %). Car le recul des échanges dans les deux sens a été plus marqué sur les importations (-9,4 %) que les exportations (- 4 %). L’Allemagne reste avec 18 % le principal fournisseur, suivi désormais de l’Italie (13 %) qui passe nettement devant la chine (10 %), ex 2e devenu 3e. Côté clients, l’Italie (14 %) est tout haut d’un podium identique à 2022, l’Allemagne 2e, avec 12 %, l’Espagne 3e avec 10 % (de ce côté la Chine est à la 9e place, à… 3 %). La catégorie « Produits chimiques, engrais, plastiques et caoutchouc synthétique » (effet SNF ?) est celle sur laquelle la Loire exporte le plus (15 %), suivie des produits alimentaires (10 %) distingués de ceux de l’agriculture et de la chasse (8 % de l’export, 5 % de l’import). Même duo mais aux places inversés côté importations (12 % pour l’importation alimentaire et 8 % pour la chimie et apparentés).