« Oui, à Saint-Étienne, les prix de l’immobilier augmentent et ça va continuer »
La capitale de la Loire est régulièrement mise en avant pour ses bas prix dans des tops et classements « immo ». Bon ou mauvais pour son attractivité ? Jean-Pierre Berger, adjoint municipal à l’urbanisme et au logement donne son point de vue pour IF. Et assure que le secteur repart du bon pied.
« Dans cette ville, on peut se payer 97 m2 avec un Smic… » L’accroche était aguicheuse. Bien positionnée sur la page d’accueil de yahoo.fr, elle conduisait droit à son rayon finance. C’était le 18 janvier. Un écho parmi d’autres en réalité, d’une étude rapportée par BFM Immo, le 15 janvier. La ville en question ? Saint-Étienne bien sûr. La capitale de la Loire était, cette fois ci, classée comme la plus accessible parmi les 20 plus grandes cités de l’Hexagone pour le portefeuille d’un smicard.
Rien de surprenant pour quiconque disposant d’un minimum de notions sur le prix des logements en France. Qu’ils s’intéressent spécifiquement à l’immobilier où qu’ils en fassent un critère déterminant dans un top consacré aux « villes où il fait bon vivre », ces classements médiatiques placent systématiquement Saint-Étienne en tête sur le rapport pouvoir d’achat/prix du logement. Qu’en pense la municipalité ? Est-ce une pierre dans son jardin question image ? Ou au contraire une bonne pub ?
« Une augmentation des prix dans l’ancien au rythme de 7-8 % en 2019 et 2020 »
« Ce type de classements on les voit passer sans arrêt. Alors, oui, ça m’a longtemps agacé, reconnait Jean-Pierre Berger, adjoint municipal à l’urbanisme et au logement. Ville moins chère de France = ville pauvre : le raccourci me gonflait. Je dois dire que je les vois désormais d’un autre œil. On est parti du fond de la piscine mais on vient de donner le coup de talon pour remonter. Et ce genre d’infos sert plus de publicité attractive que de repoussoir. » Selon les chiffres qu’auraient transmis, fin janvier, les notaires de la Loire à l’élu, le prix de l’ancien a repassé les 1 000 € le m2 dans le centre-ville. À l’échelle de Paris ou Annecy, il reste, certes, plus conforme au cm² (ok, on exagère, quoique…).
Ce type de classement, ça m’a longtemps agacé. Ville moins chère de France = ville pauvre : le raccourci me gonflait. Je dois dire que je les vois désormais d’un autre œil.
Jean-Pierre BERGER, adjoint municipal à l’urbanisme et au logement
Mais « l’augmentation est amorcée, assure J.-P. Berger. Au rythme de 7-8 % en 2019 et 2020. En 4 ans, le nombre de transactions notariées a augmenté de 30 %. Ce n’est encore qu’un frémissement au niveau des prix. Mais ça va venir : des immeubles rachetés pour 100 000 €, très vétustes, se revendent actuellement, petit à petit 1 500-1 800 € le m2. Et les réserves des agences commencent à s’épuiser. Alors, oui, à Saint-Étienne, les prix de l’immobilier augmentent et ça va continuer. »
« Cette ville a besoin d’aération. C’est ce que nous faisons »
Naturellement, l’élu municipal met en avant la politique d’urbanisme et d’attractivité – « les deux vont ensemble » – appliquée depuis 6 ans par la mairie pour expliquer, au moins en partie, ce rebond. « Nous avions perdu 50 000 habitants en 40 ans. La vacance de l’habitat était énorme. Alors, il a fallu prendre des décisions difficiles : stopper les constructions de logements, y compris sociaux pour se concentrer sur la réhabilitation. Dans le public comme dans le privé, très souvent dans un pire état que le premier. Nous avons parallèlement entrepris une politique de démolitions (2 000 logements détruits de 2014 à 2020, NDLR). Cette ville a besoin d’aération. C’est ce que nous faisons. »
Derrière le vide, de nouveaux espaces de vie, des aménagements urbains, « par exemple l’élargissement du carrefour bd Jules-Janin/rue du Dr Henri-et-Bernard-Muller ». Ou encore la végétalisation de terrains « mis en attente pour une éventuelle utilisation future, comme rues Michel-Rondet ou Tarentaize. » Au sein du parc de logements publics, la vacance est ainsi passée, selon la municipalité de 15 % en 2014 à 8 % 2020… Une réhabilitation urbaine globale qui trouvera sa continuité avec le prochain plan Anru dans les 8 ans à venir. 220 M€ bénéficieront aux quartiers Beaubrun/Tarentaize et Montreynaud (pris en charge par l’État) et La Cotonne/Sud-Est (pris en charge par la Région).
S’il y avait une évasion des CSP + et des classes moyennes vers les 1ère et 2e couronne, c’est aussi parce qu’ils ne trouvaient pas ici ce qu’ils trouvaient ailleurs.
Des maisons vendues entre 300 000 et 700 000 € et des appartements à 6 000 € le m2
Mais selon Jean-Pierre Berger encore, la croissance démographique enfin retrouvée par Saint-Étienne ces dernières années (175 057 habitants aux dernières nouvelles Insee) n’exclut pas la présence des classes moyennes et CSP +. « Certes, des logements bon marché peuvent attirer une population modeste. Nous faisons en sorte qu’il y ait de la place pour tout le monde. Et tous les revenus. S’il y avait une évasion des CSP + et des classes moyennes vers les 1ère et 2e couronne, c’est aussi parce qu’ils ne trouvaient pas ici ce qu’ils trouvaient ailleurs. »
Favoriser des programmes haut de gamme – pavillons ou collectif – faisait ainsi partie du plan. Et aux dires de l’élu, là aussi, ça marche. L’adjoint en veut pour preuve ce projet lancé en 2018 rue Noël-Blacet : une quinzaine de maisons se seraient bien vendues entre 300 000 et 700 000 €. Ou encore pour parler appartements, ceux de l’immeuble du Grand Cercle, partants parfois à 6 000 € le m2. Cela après le succès de la résidence haut de gamme qui a pris la place du cinéma Royal – aux prix certes plus modestes – ou encore celle de l’Equinoxe.