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Thérapie miroir : Dessintey prend de l’ampleur

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Désormais PME mais toujours aussi innovante, l’ex-start-up implantée à Metrotech (Saint-Jean-Bonnefonds), conçoit, développe et fabrique depuis 2016 des dispositifs informatisés de thérapie miroir inédits destinés à la rééducation motrice. Encouragée par une croissance impressionnante, Dessintey vient d’inaugurer un nouveau site d’assemblage.

Démonstration du modèle IVS3 (rééducation des membres supérieurs) écoulé à déjà 150 exemplaires. © If Media/Xavier Alix.

Elle est le reflet d’une medtech stéphanoise qui n’a décidément pas à rougir de son dynamise. Et un motif de fierté plutôt bienvenu au regard du climat actuel qui règne en cette rentrée dans la capitale de la Loire… Dessintey est le fruit d’une rencontre suscitée par les services économiques de Saint-Etienne Métropole entre l’ingénieur-entrepreneur qu’est Nicolas Fournier, précédemment directeur de l’ETI qu’est devenue Addev et où il était en charge de la stratégie de développement et le Pr Pascal Giraux, chef du service MPR (Médecine physique et de réadaptation) au CHU de Saint-Etienne ainsi que Davy Luneau, thérapeute ayant exercé dans le milieu de la rééducation et qui collaborait déjà auparavant avec ce dernier.    

Les travaux du Pr Pascal Giraux sur une informatisation de la thérapie miroir, aux bienfaits connus depuis longtemps dans le cadre d’une rééducation motrice faisant suite à un AVC et des douleurs chroniques liés à un traumatisme – « Il y a une grande littérature scientifique à ce sujet mais le potentiel reste pourtant sous-utilisé : en France, moins de 10 % des patients qui le pourraient en bénéficient », assure Nicolas Fournier –, remontent au milieu des années 2000. La thérapie miroir informatisée s’appuie sur la plasticité cérébrale. C’est-à-dire la capacité qu’a le cerveau à récupérer après des troubles ou des lésions neurologiques. Concrètement, le patient passe son membre affecté par des  pathologies d‘origines neurologique et orthopédique sous un écran. Le membre et ses tentatives de mouvement par dessous sont reproduits et simulés sur ce dernier sous son regard, comme s’il était parfaitement sain.

Une croissance du chiffre d’affaires de 60 %

Davy Luneau avait aidé le Pr Giraux, au début des années à développer cette technologie d’illusion ayant prouvé une efficacité largement supérieure au miroir traditionnel. Avant de passer à la création de Dessintey en 2016 aux côtés donc de Nicolas Fournier, aujourd’hui président de la PME qui emploie désormais 17 personnes. Le trio en est toujours propriétaire majoritaire. Son premier modèle IVS3 (« Intensive Visual Stimulation ») destiné aux membres supérieurs faisant rapidement ses preuves*, une levée de fond d’1 M€ effectuée en 2019 a fait rentrer le Crédit Agricole et Turenne au capital (25 % à eux deux). « Nous avons atteint le cap de la rentabilité en 2021, précise Nicolas Fournier. Depuis nos débuts, 150 modèles dont 100 en France ont été vendus. Notre chiffre d’affaires 2022 s’élèvera à 3,5 M€, en croissance de 60 %. Nous espérons rester sur ce rythme et devrions recruter une dizaine d’autres personnes dans les deux ans. »  

Nous avons atteint le cap de la rentabilité en 2021 et devrions recruter une dizaine d’autres personnes dans les deux ans.

Nicolas Fournier, président et co-fondateur de Dessintey
Davy Luneau et Nicolas Fournier, co-fondateurs avec le Pr Giraux dans le nouveau site de production de leur entreprise à Metrotech. © If Media/Xavier Alix.

Tous les métiers proposés par l’entreprise sont concernés. A commencer par ceux de la production ou plutôt l’assemblage des composants de ses dispositifs. Ils sont à 80 %, en termes de volume, commandés à des entreprises implantées dans un rayon de 30-40 km de Metrotech où Dessintey évolue depuis ses débuts. Pour ne citer que ces fournisseurs-là : Image pour les plateaux, Berlier pour la tôlerie, Ektro pour le câblage, Murat pour la peinture. L’électronique, lui, vient d’Asie : « Impossible à l’heure actuelle de trouver ailleurs nos composants spécifiques. Nous restons malgré tout dans la logique d’augmenter le plus possible la proportion de nos fournisseurs locaux, précise Nicolas Fournier. Si nous avons du mal à nous approvisionner au regard du contexte ? Nous avions anticipé sur nos stocks dès le début Covid, du coup, même si c’est compliqué, on s’en sort. Sur les prix, en revanche, on s’est pris 15 à 20 % en un an. »

30 % déjà réalisés à l’export 

Une inflation que Dessintey ne peut pas entièrement répercuter sur ses prix – il faut compter entre 45 000 et 55 000 € pour acquérir un de ses dispositifs – étant donné la nature de ses clients, en très grande partie des centres de rééducation dépendant de CHU, même si c’est un centre hospitalier, le CH des Marches de Bretagne qui est derrière la 100e acquisition en France de l’IVS3. « Qu’un établissement plus modeste effectue cet investissement est une véritable fierté : cela démontre un peu plus l’efficacité de notre technologie. » 30 % du chiffre est cependant déjà réalisé à l’export : 17 pays actuellement, essentiellement en Europe avec même une filiale commerciale de trois personnes en place implantée en Allemagne. Dessintey regarde maintenant du côté de l’Asie – où elle vend déjà à Singapour, Hong-Kong et en Corée du Sud – ainsi que les Etats-Unis.

Notre R&D planche sur de nouveaux produits et pas forcément liés à la thérapie miroir.

Nicolas Fournier
La commercialisation du modèle IVS4, premier dispositif de rééducation des membres inférieurs s’appuyant sur les mêmes fondamentaux de l’IVS3, a commencé. © If Media/Xavier Alix.

Et depuis peu, l’entreprise stéphanoise a un nouveau produit à leur proposer, fruit d’une R&D au cœur du projet et qui poursuit sa collaboration avec le laboratoire commun aux universités Savoie Mont Blanc et Lyon et Jean-Monnet situé au CHU de Saint-Etienne, LIBM, dont nous vous avons parlé à plusieurs reprises. Dessintey vient, en effet, de développer l’IVS4, le premier dispositif de rééducation des membres inférieurs s’appuyant sur les mêmes fondamentaux qui ont fait le succès de l’IVS3. Il s’adapte aux fauteuils roulants. La rentrée correspond avec son début de commercialisation. Alors que des applications thérapeutiques en plus de celles rééducatives sont étudiées, « Notre R&D planche sur de nouveaux produits et pas forcément liés à la thérapie miroir », indique Nicolas Fournier.

La montée en puissance de Dessintey exigeait donc plus d’espaces. A ses 250 m2 administratifs à Metrotech, vient de s’ajouter un nouveau site d’assemblage, à quelques pas de ces bureaux sur le même parc technologique. 500 m2, le triple du précédent atelier, qui permettent de voir arriver la suite : c’est-à-dire une capacité de production deux fois et demie supérieure à l’actuelle. Ils ont été inaugurés jeudi soir. Dessintey a reçu le prix Innovation Sofmer 2016 (société française de médecine physique et de réadaptation) et le prix « Coup de Cœur du Jury » des Victoires de l’Innovation 2017. Elle est également membre du cluster Novéka et lauréate du Réseau Entreprendre.

*Cette thérapie de rééducation est en effet reconnue par la communauté scientifique, Dessintey citant les travaux de Bonnal & al., en cours ; Adham et Giraux, en cours, Confalonieri et al. 2012; Deconinck et al. 2015; Ge et al. 2018; Taube et al. 2015; Villiger & al. 2013; Zhang & al. 2018.

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