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mercredi 24 avril 2024
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Côté experts : accidents de la circulation et réparations du dommage corporel

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Avec Me Julien Trente, avocat associé au cabinet stéphanois Lexface, nous abordons les questions des accidents de la circulation et des réparations potentielles qui en découlent. Un entretien dans le cadre du partenariat avec l’émission Côté experts diffusée sur les ondes de France Bleu Saint-Etienne Loire.

Est-ce que toute victime d’un accident de la route peut solliciter une réparation de dommage corporel ?

Il y a deux réponses à votre question. La première correspond au cas où vous causez un accident mais seul. Vous perdez par exemple le contrôle du véhicule par exemple et vous terminez dans un mur ou vous vous enroulez autour d’un arbre et votre contrat d’assurance automobile ne prévoit pas une garantie pour le préjudice corporel du conducteur. Même sur un contrat tous risques, cette dernière n’est pas une obligation. Si par contre le conducteur possède bien cette garantie, une indemnisation est alors possible. Le second cas de figure correspond au fait que vous possédez cette garantie mais à l’instar d’une affaire qui agite l’actualité du moment, vous conduisez sous l’emprise d’un état alcoolique ou sous l’effet de stupéfiants, cela engendre une déchéance de la garantie de votre assureur. Ce dernier dira qu’il n’indemnisera pas car le conducteur a conduit au mépris des dispositions contractuelles.

Quand on est une victime d’un conducteur, il existe tout le temps une réparation potentielle ?

Si on prend pour hypothèse un choc frontal sur une départementale avec quelqu’un qui arrive en face de vous et qui est sous l’emprise de stupéfiants ou dans un état alcoolisé, et que vous, victime de cet accident, vous n’avez pas commis de faute susceptible de limiter votre droit à indemnisation, vous serez donc indemnisé. Cela même si l’assureur de l’autre véhicule vient dénier la garantie du véhicule du conducteur en face. Les clauses de déchéance de garantie ne sont pas opposables aux victimes. Par contre, si vous avez commis une faute, cela peut limiter votre droit à indemnisation. Par exemple, si vous doublez en pensant que vous pouviez le faire et que celui qui est en face tourne à gauche sans mettre son clignotant, lui commet une faute de conduite. Seulement, vous aviez commencé à doubler alors qu’il y avait encore une ligne blanche continue, vous commettez aussi une faute. Cela peut remettre en question vos droits à indemnisation. Cela dit, il faut aussi préciser qu’il existe depuis la loi Badinter de 1985, un régime d’indemnisation pour des victimes « superprotégées », les piétons et les cyclistes dont le droit à indemnisation ne peut être exclu, hors faute inexcusable.

Quels préjudices corporels existent de matière légale ?

Depuis 2005, on applique la nomenclature Dintilhac qui fixe des principes pour l’évaluation de la réparation résultant d’infractions ayant causé des dommages corporels à une victime. Cela distingue les préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux. Au sein de ces deux catégories, on retrouve les préjudices avant consolidation et après consolidation. La consolidation arrivant lorsque l’état de la victime d’une blessure se stabilise, sans potentielle aggravation ou amélioration. Parmi les chefs de préjudices extra-patrimoniaux on retrouve notamment les souffrances psychiques et psychologiques, le déficit fonctionnel temporaire ou DFT correspondant à la période pendant laquelle on ne peut plus accomplir les actes de la vie courante après un accident. Tout ceci est évalué par des médecins.

L’expertise médicale est-elle obligatoire ?

Il y a toujours une expertise médicale. Cette dernière peut être amiable et/ou judiciaire, à la demande d’une victime par exemple. L’expertise médicale est un élément indispensable.

En France, il est choquant que l’indemnisation des victimes par ricochet d’un accident de la circulation dans lequel une personne est décédée, ne soit vraiment pas énorme.

Dans les cas les plus graves, avec un décès, les proches de la personne décédée peuvent-ils toucher des indemnités ?

En France, il est choquant que l’indemnisation des victimes par ricochet d’un accident de la circulation dans lequel une personne est décédée, ne soit vraiment pas énorme. On indemnise essentiellement le préjudice d’affliction, qui ne va jamais au-delà de 50 000 euros. Cela paraît totalement dérisoire. Il existe une gradation parmi les victimes par ricochet d’une personne décédée, selon que l’on soit sa mère, son père, son enfant… Dans certains cas spécifiques, on peut avoir un préjudice économique également, par exemple quand un père ou une mère décède, cela engendre parfois un salaire en moins pour le foyer et donc la question des revenus pour la famille et les enfants se pose alors.

Dans le cas d’un concubinage, est-ce que la ou le compagnon est considéré à l’identique d’un conjoint de mariage ou de Pacs avec la personne décédée ?

Oui, c’est pareil, il n’y a pas de différence.

D’autre part, il est important également de rappeler que c’est le véhicule qui est assuré et non pas le conducteur ?

Oui, tout à fait. Il faut bien avoir en tête cette information. Par exemple, si vous prêtez votre véhicule à votre ami et qu’il cause un accident avec votre véhicule, votre assurance ne pourra pas venir expliquer à la victime qu’elle ne garantit pas car ce n’était pas vous au volant. Il y a un souscripteur du contrat mais ce qui reste assuré c’est le véhicule.

A quel niveau intervient un avocat et à quel moment peut-on faire appel à un avocat pour se faire épauler lors d’un accident de la circulation ?

Je ne veux pas prêcher pour ma paroisse mais je dirais le plus tôt possible. Pour revenir sur le sujet de l’accident d’un célèbre humoriste français dont on parle beaucoup en ce moment, j’ai entendu l’intervention d’un de mes confrères sur les ondes d’une radio nationale qui expliquait que la place de la victime n’est pas prise en considération. Autant l’auteur de l’accident est pris en charge d’une certaine manière car il va se retrouver en garde à vue, il aura la possibilité d’être assisté par un avocat et organiser sa défense. La victime, si elle est encore de ce monde, est à l’hôpital, et quand elle sortira de ce dernier, elle aura pour premier contact un courrier de la compagnie d’assurance adverse ou de la sienne l’informant qu’il y a une procédure d’offres, etc. Si elle vient voir un avocat, elle aura un appui, mais ce n’est pas obligatoire. L’avocat permet d’assister et de guider dans la phase amiable, en guidant vers les bons interlocuteurs, en organisant les différentes pièces nécessaires. Je pense que l’avocat peut intervenir dès les suites immédiates de l’accident de la circulation, une fois la personne sortie de l’hôpital, et peut aller jusqu’à une phase amiable et judiciaire. Il y a un spectre d’interventions pouvant être très large.

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