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vendredi 26 avril 2024
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Justice : Saint-Étienne compte deux fois moins de juges que la moyenne française

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Comme partout en France, le Tribunal judiciaire de Saint-Étienne manque cruellement d’effectifs. À l’occasion d’un point presse permettant de retracer l’activité de la juridiction stéphanoise en 2021, le procureur de la République David Charmatz, la présidente du tribunal, Marie-France Bay-Renaud, et le directeur de greffe, Claude Russier, ont déploré un manque de personnel, pour une justice plus rapide et moins de défiance à l’égard de l’institution.

Tribunal palais de justice
Malgré une hausse d’activités, on compte six postes de fonctionnaires de moins chez les greffiers depuis 2019. ©JT

À la suite de l’annulation de l’audience solennelle de rentrée du Tribunal judiciaire de Saint-Étienne, un point presse se tenait mercredi matin afin de faire le point sur l’activité en 2021. C’est un bilan positif qui a été présenté par le procureur de la République, David Charmatz, la présidente du tribunal, Marie-France Bay-Renaud, et le directeur de greffe, Claude Russier, malgré les contraintes sanitaires. En 2021, la juridiction stéphanoise a enregistré plus de 11 000 procédures susceptibles de réponses pénales. C’est 1 500 de plus qu’en 2019, l’année 2020 n’étant pas significative en raison de la pandémie. Cela représente environ 1 000 procédures par an et par magistrat, le parquet ne comptant que 11 titulaires. L’activité civile, quant à elle, se stabilise avec environ 9 000 affaires traitées par an, mais une hausse des référés de 29 %.

Une organisation au cordeau

Pour faire face à l’activité croissante, avec seulement 136 greffes, 11 parquetiers et 35 personnels du siège, il a fallu s’adapter, car un retard conséquent avait été pris en 2020. C’est ainsi que l’année 2021 a pu être davantage productive, comme l’explique Marie-France Bay-Renaud : « L’équipe autour du juge a permis de revoir une certaine organisation. Nous avons pu recruter grâce au plan justice pénale, justice civile de proximité. Cela montre que ce sont des greffes dont nous avons besoin. Aujourd’hui, neuf postes sont vacants, dont sept d’adjoints administratifs et deux greffiers ». Par ailleurs, les effectifs à temps partiel sont comptabilisés au même titre que les temps plein, ce qui fausse les chiffres, mais se ressent pourtant sur la charge de travail.

Aujourd’hui, neuf postes sont vacants, dont sept d’adjoints administratifs et deux greffiers

Marie-France Bay-Renaud, président du Tribunal de Saint-Etienne

Cette année, les équipes ont également pu s’atteler aux dossiers anciens, dont certains ont été classés sans suite. C’est notamment le cas pour des poursuites pour vol, à l’encontre d’une personne qui serait aujourd’hui en détention. Il a donc fallu recruter des contractuels, notamment pour réduire les délais sur certains contentieux et dégager du temps aux juges pour traiter les affaires plus complexes.

Le procureur de la République David Charmatz, la présidente du tribunal, Marie-France Bay-Renaud, et le directeur de greffe, Claude Russier. ©JT

Besoin de recrutements

« Aujourd’hui, notre objectif est de faire la démonstration qu’avec des recrutements de fonctionnaires, on est plus efficaces. On doit démontrer à la chancellerie qu’il nous faut plus de recrutements. On a montré notre efficacité quand on nous donne les moyens. C’est ce que montre ces chiffres de 2021 », indique la présidente du tribunal. En effet, le rapport de la CEPEJ 2020 (Commission européenne pour l’efficacité de la justice), fait état d’un chiffre médian de 17,7 magistrats du siège pour 100 000 habitants en Europe (avec une moyenne à 21,4). En France, la médiane est à 10,9 juges, quand à Saint-Étienne ce chiffre se situe à 5,8. « Si nous étions parmi les juridictions les mieux loties du pays, il y aurait 57 magistrats de plus à Saint-Étienne », poursuit-elle. L’institution rencontre le même problème que la médecine avec le numérus clausus et peine à recruter. Par ailleurs, dans les années 80, on comptait deux promotions par an quand il n’y en a qu’une seule de nos jours. « À l’évidence, tout le travail qu’on fait, on le fait moins bien si l’on n’est pas assez. On se bat pour faire valoir la spécificité stéphanoise », précise le procureur.

Si nous étions parmi les juridictions les mieux loties du pays, il y aurait 57 magistrats de plus à Saint-Étienne

Répondre aux attentes des justiciables

En effet, sur un bassin de population équivalent, les situations peuvent être totalement différentes. Si l’on compare, par exemple, Saint-Étienne et Bourg-en-Bresse, les taux de pauvreté et de chômage diffèrent, et les problématiques ne sont pas les mêmes dans les milieux ruraux et urbains. « Quand le procureur parle d’ambition, c’est ça. C’est pour avoir une justice qui réponde aux attentes des justiciables, poursuit Marie-France Bay-Renaud. D’autant que nous sommes dans une société qui attend beaucoup du droit. Souvent à Saint-Étienne, on a un changement de salle en pleine audience car une autre est programmée. Cela entraîne une défiance vis-à-vis de la justice. On va penser ‘ce juge ne me prend pas en considération’ ». À cela s’ajoutent des lourdeurs administratives avec une dizaine de logiciels applicatifs différents par juridiction, qui ont du mal à évoluer ensemble, et dont le dernier en date connaît des bugs et oblige les équipes à revenir à l’ancienne version… Les robes noires font avec les moyens du bord.

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