Saint-Étienne
samedi 18 janvier 2025
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Les défis de l’indemnisation amiable des victimes d’accidents médicaux

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Notre rubrique en partenariat avec l’Ordre des avocats de Saint-Etienne – «  Les Pages du Barreau » se consacre, ce vendredi, à la loi Kouchner de 2002. Elle visait à améliorer l’indemnisation des victimes d’accidents médicaux en créant notamment la commission de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux. La saisine de cette commission a pour dessein la mise en place d’une procédure amiable et gratuite pour les victimes d’accidents médicaux, d’infections nosocomiales (infection contractée dans un établissement de santé) ou iatrogènes (effet indésirable d’un traitement, d’un vaccin).

Par Me Halima Mellouki, avocate au Barreau de Saint-Étienne, experte en dommages corporels et droit des assurances.

Me Halima Mellouki, avocate au Barreau de Saint-Étienne.

Qui peut saisir la commission ?

Toute victime d’un accident médical, d’une affection iatrogène (ou d’une infection nosocomiale) peut saisir la commission de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux afin de faire reconnaître son statut de victime et obtenir une indemnisation.

Cependant, une précision est importante, la commission n’est compétente que pour les dommages consécutifs à un acte de prévention, de diagnostic ou de soins.

Les actes de chirurgie esthétique sont exclus de son champ d’intervention.

Par ailleurs, le dommage que vous subissez doit remplir certaines conditions :

  • Une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique supérieure à 24 % (ou un décès),
  • Un arrêt temporaire des activités professionnelles pendant au moins six mois consécutifs ou non consécutifs sur une période de douze mois,
  • Des gênes temporaires constituant un déficit fonctionnel temporaire supérieur ou égal à 50 %,
  • À titre exceptionnel, une inaptitude à exercer son activité professionnelle ou des troubles particulièrement graves dans vos conditions d’existence.

Quelle commission est compétente et comment la saisir ?

Vous devez saisir la commission de la région au sein de laquelle a été réalisé l’acte de prévention, de diagnostic ou de soins. Par exemple, la commission de la région Auvergne-Rhône-Alpes a son siège à Lyon. Pour cela, vous disposez d’un formulaire CERFA : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/R1459.

Il convient de le compléter avec :

  • Une description des faits,
  • Les établissements et/ ou professionnels de santé mis en cause,
  • Les éléments médicaux justifiant votre demande.

Privilégiez l’envoi de la demande par courrier recommandé.

Quelle suite est donnée à votre demande ?

La commission vérifie que votre demande remplie au moins l’une des conditions citées supra.

Première hypothèse

La commission considère qu’un des critères n’est pas rempli, elle se déclarera incompétente, sans cela ne fasse obstacle à ce que vous saisissiez un tribunal.

En outre, vous pouvez soumettre à la commission de nouveaux éléments médicaux de nature à ce qu’elle analyse leur lumière sa position.

À ce titre, je ne peux que vous conseiller de solliciter auprès de l’établissement de santé et/ou des professionnels de santé mis en cause l’intégralité de votre dossier médical, qui doit vous être remis dans un délai de huit jours à compter de la réception de la demande et sans qu’aucun frais ne puisse vous être facturé, conformément à la décision de la Cour de justice de l’Union Européenne rendue le 26 octobre 2023.

Seconde hypothèse

La commission considère que votre situation remplie l’un des critères ; elle désignera alors un expert médical ou un collège d’experts aux fins d’expertise médicale.

Il est d’usage au sein de la commission de la région Auvergne-Rhône-Alpes, et ce afin d’éviter tout conflit d’intérêts, que soit désigné un expert médical ou collège d’experts hors région (ex : Limoges, Dijon).

Il vous appartiendra de supporter les frais de déplacement, charge par la suite d’en solliciter le remboursement.

À la suite de l’expertise médicale, au cours de laquelle je ne peux que vous conseiller d’être assisté par un avocat et un médecin, un rapport médical sera transmis à la commission, qui devra rendre un avis sur les dommages que vous avez subis et le régime d’indemnisation applicable.

Dans l’intervalle de la réception du rapport par la commission et de l’audience qui se tiendra pour évoquer votre situation, vous ou votre avocat pourrez déposer des observations sur les conclusions médicales retenues, notamment si celles-ci ne vous sont pas favorables.

En effet, la commission n’est pas tenue de suivre les conclusions des experts ; elle est souveraine dans la détermination des responsabilités mais également de la fixation de vos préjudices.

Aussi, soyez convaincant dans vos observations, rien n’est gravé dans le marbre !

À la suite de l’audience, la commission peut soit :

  • Conclure que les faits relèvent d’un accident médical non fautif : dans un délai de quatre mois, l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (Oniam) devra vous proposer une indemnisation que vous pourrez accepter, discutez ou refusez. Dans les deux derniers cas, vous disposez toujours de la faculté de saisir un juge.
  • Conclure que les faits relèvent d’un accident médical fautif : dans le même délai de quatre mois, l’assureur de l’établissement ou du professionnel de santé professionnel de santé devra vous proposer vous proposer une indemnisation que vous pourrez accepter, discutez ou refusez, avec toujours la possibilité de saisir un juge.

Il me faut vous préciser que l’avis rendu par la commission n’a pas de valeur contraignante, ni pour vous ni pour l’assureur, qui peut volontairement réduire vos préjudices voire les nier en refusant de vous indemniser, ce qui n’est malheureusement pas rare.

Dans cette hypothèse, à votre demande expresse, l’Oniam pourra se substituer à lui et vous proposer une indemnisation, sans que cela ne soit une obligation.

Mais si l’avis de la commission ne contraint pas l’assureur, il ne vous contraint pas également.

Vous disposez de la faculté accepter l’avis rendu par la commission. Dans ce cas, vous devrez saisir le tribunal compétent afin de solliciter :

  • Une nouvelle expertise

ou

  • Votre indemnisation sur la base de l’expertise réalisée dans le cadre de la procédure amiable

Une procédure amiable où l’avocat reste essentiel

Si la procédure devant la commission ne requiert pas l’assistance d’un avocat, il me semble important, sans pour autant prêcher pour ma paroisse, de vous conseiller de contacter un avocat expert en dommage corporel, qui saura vous accompagner au mieux dans ce parcours et la reconnaissance de vos droits.

En effet, lors de l’expertise, l’établissement ou le professionnel de santé sera, soyez-en certains, représenté/assisté par des avocats et de médecins missionnés par leur assureur, créant un déséquilibre en votre défaveur.

La présence à vos côtés a minima d’un avocat rompu au dommage corporel, vous permettra de vivre l’expérience d’une expertise médicale plus sereine ; sa fonction consistant à rompre ce déséquilibre, qui même dans un cadre amiable perdure toujours face à un professionnel.

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