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Les obligations des collectivités en matière d’aménagement cyclable

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Retrouvez un vendredi sur deux notre nouvelle rubrique bimensuelle en partenariat avec l’Ordre : «  Les Pages du Barreau » :

Pour favoriser les déplacements à vélo, les collectivités se sont vues imposer diverses obligations en matière de création et d’entretien d’aménagement cyclable, dont la mise en œuvre est contrôlée par le juge administratif. Par Me Alex Ouvrelle, avocat au Barreau de Saint-Étienne.

Me Alex Ouvrelle, avocat au Barreau de Saint-Étienne. ©DR

Les collectivités locales (c’est-à-dire les communes, leurs établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), les Départements et les Régions) ont la charge des routes situées sur leurs territoires, et sont donc en première ligne sur cette question de la création et de l’entretien d’infrastructures permettant aux cyclistes de circuler. Elles ont ainsi été visées par différentes obligations en matière d’aménagement cyclable.

L’obligation de créer des itinéraires cyclables aménagés lors de travaux sur les voiries

En agglomération

Tout d’abord, les collectivités doivent mettre au point des itinéraires cyclables aménagés lorsqu’elles créent ou rénovent une voie urbaine, c’est-à-dire une voie située à l’intérieur d’une agglomération, à l’exclusion des autoroutes et des voies rapides (art. L. 228-2 du Code de l’environnement).

Pour que cette obligation s’applique, il faut donc être en présence d’une opération de création ou de rénovation d’une voirie. S’il est relativement aisé d’identifier une opération de « création » qui vise à construire une nouvelle route, la notion de « rénovation » est quant à elle fréquemment l’objet de débats.

L’étude des décisions de justice rendues en la matière montre qu’il doit s’agir de travaux immobiliers d’une ampleur suffisante et réalisés sur une voirie existante (réfection complète d’une chaussée, élargissement d’une route, etc.). Une intervention mineure et ponctuelle sur une voirie, ou un simple changement des règles de circulation, n’impliquera donc pas nécessairement d’obligation de créer un aménagement cyclable.

En présence de véritables travaux de création ou de rénovation d’une voie urbaine, la collectivité aura alors l’obligation de prévoir un itinéraire cyclable aménagé et sa seule marge de manœuvre résidera dans le choix du type d’aménagement à créer.

Ce choix n’est toutefois pas laissé totalement libre puisque l’article L. 228-2 du Code de l’environnement précise qu’il doit être tenu compte des besoins et contraintes de la circulation. Le texte énumère également les six aménagements qu’il est possible de réaliser, à savoir :

  • Une piste cyclable, soit une chaussée réservée aux vélos ;
  • Une bande cyclable, soit une voie réservée aux vélos sur une chaussée à plusieurs voies ;
  • Une voie verte, soit une route réservée aux véhicules non motorisés, aux piétons et aux cavaliers ;
  • Une zone de rencontre, soit une chaussée où les piétons peuvent circuler, et où la vitesse des véhicules est limitée à 20 km/h ;
  • Un marquage au sol pour les chaussées à sens unique et à une seule file ;
  • Et lorsque les travaux concernent une voie destinée aux transports collectifs, une signalisation autorisant les cyclistes à emprunter cette voie.

La collectivité devra réaliser l’un de ces aménagements sur l’emprise de la voie créée ou rénovée, ou le long de celle-ci. Les juridictions ont néanmoins reconnu la possibilité de dissocier ponctuellement l’itinéraire cyclable de la voie créée ou rénovée, mais uniquement lorsque la configuration des lieux l’impose, et au regard des besoins et contraintes de la circulation.

Hors agglomération

Des obligations pèsent également sur les collectivités qui envisagent de créer ou de rénover une voie située hors agglomération, à l’exclusion une fois encore des autoroutes et voies rapides (art. L. 228-3 du Code de l’environnement).

En amont des travaux, les collectivités devront évaluer le besoin de réalisation d’un aménagement cyclable et la faisabilité technique et financière de ces travaux. Si l’évaluation, qui fait l’objet d’une publication, conclut à un besoin avéré en la matière, l’aménagement devra être réalisé, sauf impossibilité technique ou financière.

Cette obligation hors agglomération est donc moins contraignante puisque les aménagements n’auront à être réalisés qu’en cas de besoin avéré, et sauf impossibilité technique ou financière. Le choix de l’aménagement est également laissé à la libre appréciation des collectivités.

L’obligation d’appliquer la réglementation sur le double sens cyclable

Depuis 2015, le double sens cyclable est la règle pour toutes les voies de circulation pour lesquelles la vitesse maximale autorisée est inférieure ou égale à 30 km/h, et pour les aires piétonnes (art. R. 412-28-1, R. 431-9 et R. 110-2 du Code de la route).

Cela signifie que sur une voie où les automobilistes circulent à sens unique et à 30 km/h maximum, les cyclistes doivent pouvoir rouler dans les deux sens de circulation.

L’autorité qui dispose du pouvoir de police de la circulation (le maire ou, dans certains cas, le président de l’EPCI) devra alors mettre en place une signalisation adéquate aux entrées et sorties des zones où le double sens cyclable s’applique (une réponse ministérielle le précise).

Si cette même autorité peut par exception prendre un arrêté interdisant le double sens cyclable, cette décision devra être justifiée par des considérations techniques ou de sécurité (par exemple le volume du trafic routier ou l’étroitesse de la route).

En présence de véritables travaux de création ou de rénovation d’une voie urbaine, la collectivité a l’obligation de prévoir un
itinéraire cyclable aménagé et sa seule marge de manœuvre réside dans le choix du type d’aménagement à créer.

Les conséquences de la méconnaissance de ces obligations

Toute décision prise par une collectivité en méconnaissance de ces textes pourrait être considérée comme étant illégale et faire l’objet d’un recours devant les juridictions administratives.

Cela peut par exemple concerner les décisions suivantes :

  • Les délibérations des communes ou de leurs EPCI (communautés de communes ou d’agglomération, ou métropoles) approuvant la création ou la rénovation de voies sans inclure d’itinéraires cyclables ou optant pour un aménagement inadapté ;
  • ou les arrêtés de l’autorité de police interdisant la circulation des cyclistes à double sens sur une route.

Si aucune décision n’a été prise par la collectivité, mais que des manquements sont constatés, les administrés peuvent également solliciter le respect de ces obligations. Par exemple, une personne concernée par des travaux sur des voiries pourrait demander à la collectivité de modifier son projet, si celui-ci n’est pas conforme aux règles relatives aux aménagements cyclables, et en cas de refus, saisir le juge administratif pour le contester.

Il en va de même pour le riverain qui demanderait la mise en place d’une signalisation autorisant le double sens cyclable sur une route à 30 km/h, et qui se heurterait à un refus.

Saisi d’un recours contre ces décisions, le juge administratif pourrait les annuler s’il constate une méconnaissance des textes applicables, et dans ce cas ordonner à la collectivité de réaliser des aménagements cyclables conformes aux règles précitées.

L’obligation d’entretenir les aménagements cyclables

Quand ils existent, les aménagements cyclables peuvent parfois s’avérer difficilement praticables : présence d’obstacles, de travaux, etc. Ces problématiques sont susceptibles d’engager la responsabilité des collectivités en leur qualité de gestionnaire d’ouvrage public. En effet, les collectivités sont soumises à une obligation d’entretien normal de leurs ouvrages publics, et peuvent être responsables des dommages résultant d’un défaut d’entretien.

L’exemple fréquent est celui de la chute d’un cycliste causée par un obstacle non signalé (poteau, grille, chaîne, etc.), qui peut engager la responsabilité du gestionnaire de l’aménagement cyclable. Sur ce même fondement, il a été jugé que la collectivité, alertée de problèmes récurrents et gênants d’encombrement de voies et pistes cyclables, pouvait voir sa responsabilité engagée pour ne pas avoir remédié à cette situation.

Dans ce cas, l’objectif d’un tel recours sera moins indemnitaire, que d’obtenir la condamnation de la collectivité gestionnaire à prendre les mesures nécessaires pour assurer la continuité de ses itinéraires cyclables aménagés.

Diverses obligations pèsent donc sur les collectivités en matière d’aménagement et d’entretien des voies cyclables. Les décideurs, tout comme les administrés, ont donc intérêt à connaître ces règles pour s’assurer de leur correcte application, et ainsi contribuer au développement des déplacements à vélo.

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