670 000 habitants concernés : le nouveau centre de tri de Firminy opérationnel
L’appellation « TrivalLoire » n’aura pas dépassé le processus de l’appel d’offre et des travaux. C’est donc bien le « nouveau centre de tri » des déchets ménagers que six autorités publiques concédantes ont officiellement inauguré jeudi 16 mai aux côtés de Suez, leur prestataire gestionnaire. Une extension/modernisation à Firminy qui doit permettre d’assumer l’amplification du tri exigée par la loi. Il en a coûté à ses 670 000 bénéficiaires une trentaine de millions d’euros.
Observer ce ballet d’ordures a quelque chose d’impressionnant. Il y a le bruit, un peu l’odeur, il y a surtout, désormais, ces 130 tapis de tri faisant circuler les déchets. De toutes sortes, de toutes natures, dès lors qu’ils sont qualifiés pour le tri, erreurs d’aiguillage de la part des usagers exceptées. Les séparer pour les regrouper et ainsi les rendre aptes à leur prise en charge par les filières de recyclage, c’est tout l’objectif. S’y attèlent 2 grappins automatisés à la réception, une mise en balle automatique à la sortie du process, 30 machines de tri, 13 séparateurs optiques et 3 bras robotisés fournis par Siléane, programmés spécialement par la réputée entreprise stéphanoise après une phase « d’apprentissage » sur place.
Des humains, aussi, sont là : 55. Pas tellement plus qu’avant cette montée en puissance en raison de l’automatisation de nouvelles des tâches et de celles préalables les plus pénibles, assure leur employeur Suez, à qui revient – à nouveau – de gérer le site dans le cadre du contrat de concession. « Nos équipes travaillent aujourd’hui davantage sur le contrôle qualité », précise Yves Defour, responsable du site pour Suez. Parmi eux, des salariés en insertion en partenariat avec le groupe ID’EES, pour un équivalent de 36 000 heures d’insertion professionnelle effectuées chaque année et intégrées au « package » du contrat passé avec les collectivités. Le volume traitable est de 45 000 t par an. Il s’agit de la capacité d’absorption du nouveau centre de tri des déchets ménagers de Firminy appartenant, non pas à Saint-Etienne Métropole seule, mais aux deux tiers sud de la Loire.
32 M€ ont été investis
Le périmètre concerné va même au-delà du département : il intègre une petite partie de la Haute-Loire sur sa frontière est (via désormais le syndicat Sympttom) ainsi que la communauté de communes des Monts du Lyonnais, territorialement davantage rhodanienne que ligérienne. Loire Forez Agglomération, Forez Est et le Pilat rhodanien sont aussi de la partie. Au total, ce sont ainsi les ordures jetées par 670 000 habitants qui sont désormais traitées par cet équipement, leur équipement. Et à en croire leurs élus et le prestataire, Suez, il s’agit technologiquement de ce qui se fait de mieux actuellement en France vis-à-vis de la gestion du tri. Tant mieux, ne serait-ce que parce que la modernisation/extension des lieux a coûté à ces six collectivités près de 32 M€. Investissement soulagé toutefois par les aides de l’Etat via l’Ademe – de 2,75 M€ – et celles de Citeo à hauteur de 1,276 M€.
If Saint-Etienne vous a parlé à plusieurs reprises de cette étape qui fera date vis-à-vis de la gestion publique des déchets, sujet à l’importance capitale, civiquement trop souvent mise sous le tapis. Pour rappel, l’extension, l’uniformisation, la simplification des consignes de tri des emballages, donc l’augmentation de la proportion déchets censés être recyclés, était une exigence légale imposée au 1er janvier 2023 aux collectivités compétentes : métropole, agglomérations ou syndicats intercommunaux de gestion des déchets. Ce qui amenait à revoir profondément la capacité à la fois qualitative et quantitative à trier. Le centre de tri de Firminy appartenant jusque-là à Suez n’était donc plus adapté. Il l’est désormais selon les élus locaux et Suez, gagnant du nouveau marché qui le lie à ce groupement public jusqu’en 2034.
Un site passé de 3 300 à 6 100 m2
Le contrat de concession de 12 ans va permettre à ce dernier de récupérer la propriété du site même, le public ayant payé son extension-modernisation. Cette dernière s’est faite sur place et après 20 mois de travaux lancés mi 2022, confiés à 80 entreprises de la Loire ou de la région (l’architecture est signée Rivat, la construction Chazelle et la conception/réalisation du process de tri par les Savoyards d’Aktid) a été achevée presque dans les temps annoncés, c’est-à-dire en décembre 2023. Passé de 3 300 à 6 100 m2, le site, nouvelle version, est progressivement opérationnel depuis cette date et quasiment à 100 % à l’heure de son inauguration officielle organisée jeudi 16 mai. Il a fallu effectuer cette profonde mutation en maintenant l’activité – si besoin en s’appuyant temporairement sur d’autres centres de la région – et même en assumant le début d’accroissement des volumes réceptionnés découlant des exigences légales au 1er janvier 2023. Car pas de dérogation possible en attendant la livraison.
Ce que nous inaugurons là, ce ne sont pas que des chiffres, des mètres carrés, des machines, c’est de l’humain.
François Driol, vice-président de Saint-Etienne Métropole en charge de la gestion des déchets
Interrogé à ce sujet à plusieurs reprises, le groupe Suez assure avoir mis en œuvre une organisation dite « dégradée » (dans le sens « non optimale ») temporaire, de plusieurs mois, permettant aux collectivités d’être en conformité avec la loi. Jeudi 16 mai, au moment de constater que « le pari a été tenu, presque dans les temps », François Driol, vice-président de Saint-Etienne Métropole en charge de la gestion des déchets et coordonnateur du projet pour les six autorités concédantes a eu « une pensée pour Eric Berlivet (maire de Roche-la-Molière, Ndlr), mon prédécesseur qui avait entamé les discussions sous le précédent mandat. Ce que nous inaugurons là, ce ne sont pas que des chiffres, des mètres carrés, des machines, c’est de l’humain. Les femmes et les hommes que nous sommes et qui produisent ces déchets et parmi eux, ceux qui doivent les gérer. Retenons-le comme nous devons retenir que jeter des déchets sans s’en préoccuper au-delà, est une notion à oublier. »
Quelle vie après le tri ?
Antoine Bousseau, DG des services aux collectivités pour l’activité recyclage et valorisation de Suez en France y voit même un enjeu « de souveraineté » insistant sur le caractère innovant du site. Souverain, le groupement des collectivités l’est d’ailleurs aussi sur les « matières » plus tout à fait premières, celles obtenues à l’issue du tri des déchets (qui, pour une partie de la masse actuelle, étaient jusqu’à l’évolution 2023, enfouies à Borde Matin à Roche-la-Molière) sortant du site. C’est sa production et elle peut désormais la revendre à des filières recyclage qui restent encore à structurer mais qui, selon Suez, ont beaucoup progressé dans ce sens ces 15 dernières années. « Oui, il y a bel et bien des débouchés pour l’ensemble des déchets que nous parvenons à accepter et donc traiter ici, assure Yves Defour. Le centre est dimensionné pour une capacité de 45 000 t par an. On est monté en puissance progressivement, le temps que les choses se rodent, que notre fonctionnement et nos équipements se mettent en place. Nous sommes actuellement sur un rythme annuel de réception de 37/38 000 t. »
Les erreurs au moment du geste de tri par les administrés expliquent l’essentiel du pourcentage rejeté sur les tonnes reçues, 20 à 25 % de la masse réceptionné jusque-là dans la nouvelle configuration.
Yves Defour, responsable du site pour Suez
Les choses vont dans le bon sens mais cela dépend aussi des « fournisseurs » de base : nous, n’importe quel habitant administré effectuant le geste de tri au départ. « Ce sont les erreurs à ce moment là qui expliquent l’essentiel du pourcentage rejeté sur les tonnes reçues (et donc brûlé ou enfoui comme avant, Ndlr), soit 20 à 25 % de la masse réceptionné jusque-là dans la nouvelle configuration », ajoute Yves Defour. Il y a les erreurs compréhensibles, celles qui ne les sont pas du tout (comme cette tonne en batteries de voiture réceptionnée en 2023…) plus aptes à la qualification de « fautes ». Il y a, enfin, l’imbrication des emballages entre eux à ne surtout pas effectuer car rendant impropre leur process de tri puis de recyclage.
Ce dernier n’est pas assuré par Suez mais acheté au site que le groupe gère par des entreprises réparties un peu partout en France. Le carton ? Direction Saint-Vallier dans la Drôme. Le papier ancré ? Les Vosges, seule possibilité dans l’Hexagone. Le métal ? Fos-sur-Mer. Le plastique ? Là il y a la Loire mais aussi Bayonne, l’Ile-de-France selon sa nature. Pas de miracle : le recyclage se fait là où il y a des sites pour le faire, là où existent des solutions. Ce qui entraîne du transport. Mais selon Yves Defour, cet univers a malgré tout considérablement progressé par rapport aux années 2000 quand, par exemple, les bouteilles ayant contenu de l’huile alimentaire n’étaient pas recyclables ou encore que les bouchons plastiques étaient refusés.
Une dimension pédagogique dans le panier
Un pot de yahourt ? C’est 1 000 ans. Une barquette de polystyrène ou une bouteille de plastique, 700 ans. Et pour une couche culotte, comptez quatre siècles de digestion par la nature. Autre élément du contrat passé avec Suez : créer une salle pédagogique, dotée de sa scénographie et de ses petits jeux ludiques dignes d’un petit musée. C’est – entre autres – ce genre d’informations, une sensibilisation à des enjeux cruciaux qui nous concernent tous, bien au-delà du simple fait de sortir les poubelles et une éducation aux bons gestes de tri que l’on peut y retrouver. Le site sera donc ouvert aux visites en septembre (testé en juin) avec ce passage dans cette salle pour point d’orgue. Le public visé est celui des scolaires, histoire d’enraciner les consciences dès le plus jeune âge (à partir des cours moyens). Mais des venues d’adultes sur réservations par groupe de 15 minimum seront aussi possibles.