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A45 : ce qui pourrait pousser ou non sur sa tombe (1/3)

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Le pont de Givors © GladiusTM / CC BY-SA

Un nouveau pont routier sur le Rhône d’ici 2030 (1/3)

Elle est enterrée depuis la caducité de sa Dup (Déclaration d’utilité publique) le 16 juillet. Mais dès juillet 2018, la préfecture de Région a lancé une « démarche globale d’amélioration de la mobilité dans le corridor entre Saint-Étienne et Lyon » bénéficiant des 400 M€ promis à l’origine par l’État pour l’A45. Le volet 1 de notre dossier détaille l’idée d’un nouveau pont routier sur le Rhône. Dans un second, nous évoquerons les autres projets de la démarche. Enfin, dans un troisième, le débat politique qu’elle suscite. Pour la concrétiser, l’État compte en effet sur les 393 M€ des collectivités, cumul des subventions promises à l’A45 par la Région Auvergne-Rhône-Alpes, Saint-Étienne Métropole et le Département de la Loire…

Élus, techniciens de collectivités locales, de l’État, des agences d’urbanisme des agglomérations lyonnaises et stéphanoises ainsi que des bureaux d’études privés : du Rhône ou de la Loire, ils sont des dizaines, depuis 2018, à participer aux réunions du comité de pilotage général de la démarche. Sinon, à l’une de ses quatre instances spécifiques : « traitement du nœud de Ternay et de Givors », « vallées de l’Ondaine et du Gier » (améliorations de l’A47 et RN88), « aspects ferroviaires et l’intermodalité »,  « aspects routiers sur le plateau de Mornant et l’arrivée de l’agglomération lyonnaise ». Si la préfecture de Région nous a transmis par courriel un récapitulatif général, pas question, en revanche, de parler des avancées avec un technicien des services d’État. Mais nous avons pu nous procurer plusieurs documents de travail, en particulier sur le traitement du nœud de Ternay et de Givors…

S’il se concrétise, ce sera le projet le plus marquant et sans doute le plus clivant. Probablement aussi, le plus coûteux au kilomètre linéaire. Lancée en septembre 2018, l’instance sur le « traitement du nœud de Ternay et de Givors » tiendra son quatrième comité de suivi ce vendredi 2 octobre. Même si elle « intègre les enjeux des autres modes, d’intermodalité et d’urbanisme », insiste la préfecture de Région, il s’agit bien de valider la réalisation d’un nouveau pont routier sur le Rhône. L’objectif est bien sûr de faire sauter la principale source de bouchons de l’A47 provoquée par la traversée ardue du centre de Givors puis du fleuve. Une galère bien connue des Ligériens. Deux options sont sur la table.

Le passage de l’A47 à 2×3 ou 2×4 voies entre Givors et Ternay à l’étude

La première : un pont « local » pour détourner le trafic interne au périmètre d’études* de l’actuelle traversée autoroutière du fleuve. Cinq variantes sont étudiées. Une au sud du pont actuel depuis les berges du Gier à Givors et débouchant au sud de l’échangeur de Chasse-sur-Rhône. Au nord, les quatre autres arriveraient toutes sur le territoire de Ternay : deux depuis Grigny et deux autres encore depuis Givors en longeant respectivement, pour ces dernières, les viaducs  autoroutier et ferroviaire actuels du Rhône.

Extraits du compte rendu de la réunion du 2 décembre 2019 du comité de pilotage général de la démarche

Seconde option : mettre « à deux fois trois ou quatre voies de l’A47 entre Givors et Ternay ». Ce qui signifie, une emprise foncière urbaine forte dans Givors même ainsi que deux nouveaux viaducs adjacents aux actuels : celui qui franchit le Rhône sur 250 m environ et le suivant sur 450 m qui passe au-dessus des lignes de chemin de fer et va des échangeurs de Chasse au nœud de Ternay, là où s’emmêlent A47, A7 et A46. Dans son point général d’avancement de décembre 2019, le comité général de pilotage de la démarche précise que « ces pistes ne sont pas exclusives l’une de l’autre et pourront se combiner ». À ce même stade, la mise en service des aménagements était estimée « entre 2025 et 2030. Le calendrier sera précisé une fois les aménagements définis. »

Extraits du compte rendu de la réunion du 2 décembre 2019 du comité de pilotage général de la démarche

La première phase d’études – diagnostic et champ des possibles – menée par le groupe d’ingénierie Ingérop, mandataire d’un groupement de sept bureaux, vient de s’achever. Elle met à jour les chiffres de fréquentation de la traversée du Rhône via l’A47 (85 000 véhicules dont 12 % de poids lourds) et confirme ce que l’on sait déjà : la fluidité du trafic est particulièrement plombée par la forte fréquentation des bretelles de sortie et d’entrées de Givors directement connectées à la voirie centrale de la ville (RD386) et ses « dysfonctionnements » qui plus est, empruntées par les usagers des communes venant du nord. Dans cette zone, l’accidentologie est dense, surtout que les bandes d’arrêts d’urgence y présentent des écarts avec les règles, voire en sont absentes. Ainsi, de début 2017 à début 2020, 250 accidents de la sortie Givors ouest au nœud de Ternay dont au moins 25 % du centre de Givors à la sortie de Chasse.

L’analyse des origines et destinations des véhicules empruntant le franchissement du Rhône par l’A47 démontre 37 % de trafic « d’échanges » (origine ou destination dans le périmètre d’étude) et 11 % « interne », soit 48 % de « flux locaux » : de quoi rendre pertinent un nouveau franchissement local et non autoroutier ? Sauf que, conclut l’étude, « (…) la multiplicité des origines et destinations de ces flux posent la difficulté d’en capter une part importante ». Et afin de les capter efficacement, « il semble pertinent d’étudier un nouveau franchissement à proximité du pont actuel de l’A47 ou un élargissement de ce dernier. »  L’impact des six variantes de ponts (cinq « locales » et le doublement de l’A47) doit donc être simulé finement lors d’une phase 2, dont l’échéance est envisagée pour mai 2021. Après quoi, il faudra réduire le choix à deux ou trois variantes et passer à la phase de concertation dont le bilan sera dressé début 2022 pour déboucher sur le « choix préférentiel ». Puis, enfin, passer à l’enquête publique préalable à la DUP.

Bien d’autres facteurs viendront compliquer la tâche. Et considérablement : impacts sur les niveaux de pollutions atmosphériques et sonores du nouvel ouvrage, sur la biodiversité (dans le périmètre, une partie des berges du Rhône accueille des espèces protégées et sensibles), problématiques d’insertion urbaine, paysagère, cohérence avec les plans de prévention des risques industriels, d’inondations, et même miniers. Il y a enfin, les captages d’eau potable à préserver : notamment ceux de la nappe alluviale du Rhône susceptible d’accueillir les fondations d’un ouvrage : champs captants de Grigny en rive droite, de Chasse-Ternay en rive gauche. Ils concernent un total de 218 000 habitants et 104 communes.

Bref, le chemin risque d’être long et d’aboutir davantage en 2030 qu’en 2025. Côté coût, l’étude confiée par la Région au cabinet Artelia, très contestée par les anti-A45 qui mettaient en cause son honnêteté, annonçait en 2016 190 M€ (dont 25 pour acheter les terrains et exproprier) pour réaménager et élargir l’A47 de Givors centre à Ternay. En 2005, c’était 136 M€ selon l’étude du Cete de Lyon (Centre d’études techniques de l’équipement, devenu Cerema) qu’Artelia avait reprise…


* Un rayon allant au nord, jusqu’à Vernaison inclus, à l’ouest jusqu’à l’échangeur n°10 de Givors, à l’est, jusqu’à Communay, au sud, jusqu’à Loire-sur-Rhône

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