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Allongement du congé paternité : un petit pas pour l’homme

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Depuis le 1er juillet et l’entrée en vigueur de la réforme du congé paternité, le second parent accueillant un enfant peut bénéficier de 28 jours auprès de son nouveau-né. Une avancée notable mais qui reste encore timide face aux tâches parentales et domestiques encore essentiellement assumées par les mères. 

« Je suis contente du fait que l’on commence enfin à parler de l’allongement du congé pour le second parent, lance Manuela Spinelli, maîtresse de conférences à l’Université Rennes 2, spécialiste des études de genre, et co-fondatrice de Parents&Féministes. Cela commence à sortir des cercles féministes et à devenir un enjeu sociétal. » En effet, le second parent pourra désormais passer près d’un mois auprès de son nouveau-né. Cette mesure, qui a pris effet le 1erjuillet, était réclamée de longue date. Son objectif est de réduire les inégalités, tant en entreprise qu’au sein du foyer. Mais dans les deux cas, est-ce si simple ?

De nombreux jours inutilisés

Pour Manuela Spinelli, c’est une mesure encore trop timide, qui n’aura pas de réel impact sur le plan de l’égalité hommes-femmes. Car sur ces 28 jours, seulement 7 sont obligatoires, les 21 restants étant facultatifs. « On peut donc se demander quelles sont les catégories socioprofessionnelles qui pourront y accéder, poursuit-elle. Jusqu’à présent, les statistiques rapportent que sur les 11 jours facultatifs dont bénéficiaient le second parent avant le 1erjuillet, seuls 50 % des CDD les utilisaient, contre 80 % de fonctionnaires par exemple. Cela nous dit bien que ce n’est pas toujours un choix. Cela va dépendre de la quantité de travail, de la pression que l’on peut ressentir en interne, bien que l’employeur ne puisse refuser à son salarié de prendre ces jours. » Et côté entreprise, bien que l’on salue cette avancée, tout ne sera pas si facile à mettre en place, notamment pour les petites structures.

Dans une PME, lorsqu’un salarié annonce qu’il vient d’être papa, notre première réaction c’est de nous réjouir, car dans une petite entreprise, on fait tous partie de la même famille.

Daniel Villareale, président de la CPME Loire

Les entreprises composent 

« Tout n’est pas blanc ou noir, c’est évidemment une bonne mesure, et c’est normal qu’un père puisse profiter de son enfant. C’est bon pour l’équilibre du couple et de l’enfant, indique ainsi Daniel Villareale, président de la CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises) Loire. Dans une PME, lorsqu’un salarié annonce qu’il vient d’être papa, notre première réaction c’est de nous réjouir, car dans une petite entreprise, on fait tous partie de la même famille. On est contents pour lui, pour sa famille. Ensuite, bien sûr que 28 jours de congés en plus à caler dans une année, dans une entreprise de cinq personnes par exemple, c’est problématique. C’est un mois de plus qui vient s’ajouter aux cinq semaines existantes. » Ainsi, le président de la CPME se pose la question de savoir si le coût de cette mesure ne devrait pas plutôt relever de la solidarité nationale, au lieu d’être assumé par l’entreprise elle-même. Par ailleurs, il soulève les difficultés de recrutement rencontrées par certains secteurs et qui vont s’accentuer quand il faudra trouver des remplacements d’un mois. 

« Cela diminue fortement le risque de dépression post-partum. »

Manuela Spinelli, maîtresse de conférences à l’Université Rennes 2, spécialiste des études de genre, et co-fondatrice de Parents&Féministes.

 

La charge encore trop maternelle

« Encore aujourd’hui en France, il y a cette idée que c’est plutôt un luxe pour un second parent de rester à la maison à la naissance d’un enfant, souligne Manuela Spinelli. Alors que cela a un impact considérable sur la santé des mères. Cela diminue fortement le risque de dépression post-partum, et facilite le développement du lien affectif avec l’enfant. On commence à le savoir, mais on ne le met pas en pratique. Dès la maternité, le canal d’informations pour les soins du bébé est tourné vers la mère. C’est à elle que l’on s’adresse. » Pour elle, un congé obligatoire signifierait que la charge parentale appartient aux deux parents. Elle le souhaiterait d’une durée égale à celui de la mère, afin que la charge domestique soit totalement partagée. Et c’est désormais chose faite en Espagne. Le pays a allongé le congé paternité de manière progressive, jusqu’à arriver il y a quelques mois à 16 semaines, soit la même durée que pour les mères, et rémunéré à 100 %. 

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