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jeudi 28 mars 2024
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Firminy pose les bases d’une vidéoprotection intercommunale

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Caméra vidéoprotection
Caméra de vidéoprotection. Photo d’illustration.

Le centre de supervision urbain (CSU) de la principale ville de l’Ondaine va entrer en service courant avril. Une initiative sur la sécurité qui correspond à une promesse de campagne du maire de Firminy, Julien Luya, élu en 2020. L’investissement – aidé par la Région et l’Etat – est conséquent. Il a été imaginé pour profiter à l’ensemble des communes de la vallée de l’Ondaine qui le souhaiteraient. Parfaite illustration d’une prise en main de la compétence sécurité par les municipalités. L’étape suivante sera-t-elle intercommunale ?

Ils annoncent 40 propositions adressées aux candidats à la Présidentielle autour de la gestion de la sécurité en milieu urbain. France urbaine tient ce 3 mars au Creusot ses « Assises de la sécurité ». Un domaine que co-préside Gaël Perdriau, en tant que président de Saint-Etienne Métropole, au sein de cette association nationale regroupant les grandes villes et agglomérations du pays. Il faut dire que plus les années passent et plus le sujet prend de l’importance au sein des municipalités. Et pas besoin d’être forcément une grande ville. Même si certaines continuent à le refuser par principe, les mairies ont tendance, dès lors qu’elles en ressentent le besoin – et qu’elles en ont les moyens – à gonfler toujours un peu plus leur budget sécurité.

Aidées par des financements de l’Etat auxquels s’ajoutent maintenant ceux de la Région, elles s’équipent d’un maillage de plus en plus intense en vidéoprotection (vidéosurveillance pour ceux qui préfèrent), arment des policiers municipaux toujours plus nombreux, aux missions toujours plus étendues, dépassant même le cadre légal selon certains représentants syndicaux. Mais où doit s’arrêter la notion de tranquillité publique dévolue au maire et où commence celle de la « sécurité publique », fonction régalienne de l’Etat relevant d’une solidarité nationale, entre autres financière ?

Depuis les années 2000, les communes ne cessent de densifier leur réseau de vidéoprotection. Photo d’illustration.

Jusqu’où doivent aller les municipalités ?

Gaël Perdriau, met désormais en avant cette question quand il parle sécurité, interpellant ainsi les responsabilités de l’Etat. Après avoir lui-même fortement musclé sa police municipale lors de son premier mandat, il considère en tant que maire que sa Ville a aujourd’hui « assumé ses obligations en matière de tranquillité publique ». Parallèlement, si depuis la présidence François Hollande, la tendance s’est – globalement – inversée sur les effectifs des nationaux, on est encore loin d’avoir retrouvé les effectifs de police nationale d’avant les années 2000 dans bien des circonscriptions. Le plus gros des dégâts en termes d’effectifs a eu lieu sous Nicolas Sarkozy, faisant appliquer à la police nationale la logique des RGPP (révision générale des politiques publiques) : un fonctionnaire sur deux partant à la retraite non remplacé.

Si bien que dans une circonscription comme l’Ondaine, on est passé d’environ 90 policiers nationaux selon le syndicat Alliance (sans compter une trentaine affectée à Roche-la-Molière en raison de la résidence du préfet) à la fin des années 1990 pour 59 agents réellement en place fin 2019. Les locaux du commissariat secondaire du Chambon-Feugerolles, désertés depuis mi-2019, restent fermés. Mais niveau effectifs, dans cette CSP, « il faut reconnaître que ça va enfin un peu mieux comme pour le matériel aussi, témoigne le maire de Firminy LR Julien Luya. La situation est restée trop longtemps bloquée mais il y a bien eu des affectations et cette amélioration sur la problématique des horaires qui bloquait les affectations »

La montée en puissance des polices municipales est-elle compatible avec une compétence relevant d’abord de la solidarité nationale ?

Enfin une réaffectation pour le commissariat du Chambon ?

En décembre, une énième interpellation du député LR Dino Cinieri, ex-maire de la cité, auprès de la place Beauvau en raison cette fois-ci des incendies de voitures à répétition devant le commissariat de police nationale a provoqué la visite sur place du ministre Gérald Darmanin. Ses promesses auraient donc été suivies d’effet après d’autres affectations déjà obtenues en 2021. En outre, La Ricamarie et une petite partie du Chambon-Feugerolles ont intégré le dispositif de Quartier de Reconquête Républicaine (QRR) auquel est affectée une quinzaine d’agents nationaux. « Aussi, je vais remettre en mains propres ce 1er mars au Premier ministre une lettre suggérant que ce service spécifique de la police nationale soit installé dans le commissariat vide du Chambon-Feugerolles », nous annonce Dino Cinieri, contacté par IF Saint-Etienne lundi soir.

Va-t-on trop loin en tant que municipalité ? Je ne vois pas les choses ainsi. Je vois qu’il y a chez moi des sérieux problèmes à régler.

Julien Luya, maire du Chambon-Feugerolles

Son ex attaché parlementaire, Julien Luya, successeur en 2020 de Marc Petit à la tête de la municipalité appelouse n’a pas attendu que les choses bougent depuis le sommet de l’Etat pour appliquer ses promesses électorales autour de la sécurité. Un domaine devenu monnaie courante dans les programmes des Municipales, jusque dans les rangs de la gauche. Julien Luya assume : « Va-t-on trop loin en tant que municipalité ? Je ne vois pas les choses ainsi. Je vois qu’il y a chez moi des sérieux problèmes à régler sur la petite délinquance et des incivilités, toujours plus nombreuses. Et une détresse pour des besoins réels exprimés par mes concitoyens qui constatent une impunité. Alors, pas le choix : je suis adepte de la citation de Kennedy* sur l’Etat. Il a été là pour le Covid, remet des moyens sur la sécurité. Il faut sans doute qu’il aille plus loin mais en attendant, nous, on avance. »

Gérald Darmanin, devant le commissariat de police nationale, lors de sa visite à Firminy en décembre. © NB / IF Saint-Etienne

CSU, policiers municipaux doublés : Firminy met le paquet

Courant avril, dans le centre-ville, entre les rues Jean-Jaurès et Gambetta, c’est un Centre de supervision urbain (CSU) flambant neuf qui entrera en fonction. Au sein d’un « hôtel de police municipal » dans lequel seront transférés les fonctionnaires jusque-là « isolés » à l’unité d’habitation du Corbusier. Deux cabinets médicaux se jouxtant ont été reconvertis pour former cet ensemble de 350 m2. Le CSU disposera d’un « mur d’écrans impressionnant. Il sera digne de grands centres professionnels », promet Dino Cinieri qui rappelle son expertise liée à son passé dans la sécurité privée. Il sera, à terme, relié à environ 140 caméras posés sur l’espace public ou en zone d’activités. Un parc davantage modernisé qu’étendu. Et déjà en partie en service, via une installation temporaire à la mairie.

« Elle rend déjà de grands services, comme lors des incendies de voitures cet automne. Ou encore quand un policier national a été renversé une motocross, note Julien Luya. Pour faire face aux chauffards, aux rodéos, nous effectuons de la vidéoverbalisation : au lancement, on a constaté 27 feux rouges grillés en moins d’un mois. » Dans le même temps, le nombre de policiers municipaux appelous est passé de 6 à 12. Parmi les engagés, 4 « jeunes retraités » de la gendarmerie. De quoi étendre ses horaires jusqu’à 21 h. « A terme, j’aimerais aller plus loin en horaires et passer à 17 agents. Avant notre police municipale était impuissante. Désormais, elle pourra vraiment intervenir. Actuellement, elle ne dispose pas d’armes létales, mais nous allons lancer les procédures administratives pour que cela soit possible dès que nous aurons le budget. »

A terme, 140 caméras de Firminy seront reliées à son CSU. Un parc plus modernisé qu’étendu. Photo d’illustration.

La Région de plus en plus portée sur la sécurité

Car en plus de cet investissement dans des salaires et du fonctionnement, celui matériel – le bâtiment de la police municipale et son CSU, les nouvelles caméras et le travail sur les réseaux induit – totalise 2,8 M€ étalés sur cinq ans. Une somme subventionnée par l’Etat pour plus de 100 000 €. Mais aussi par la Région Auvergne-Rhône-Alpes pour un total de 157 000 €. Normalement totalement déconnectée des questions de sécurité, la collectivité depuis l’arrivée de Laurent Wauquiez à sa tête fin 2015 développe elle aussi une politique en matière de sécurité plus en plus poussée. Elle a même voté pour ce second mandat un plan d’investissement de 300 M€ pour équiper ce qui relève d’elle, comme les lycées (avec même le projet d’une brigade de sécurité régionale dédiée) ou les transports ferroviaires. Mais aussi pour aider les initiatives municipales, comme celle de Firminy.

Un coup de main que la Région a souhaité mettre en évidence devant la presse vendredi avec la visite de ses conseillers ligériens que sont Dino Cineri, Sylvie Fayolle, Nicole Peycelon ou encore Aline Mouseghian. Maire de Mornant dans le Rhône, Renaud Pfeffer, vice-président régional délégué à la sécurité (fonction créée par Laurent Wauquiez) était aussi du déplacement. Outre des élus appelous, la conférence de presse s’était aussi faite en présence d’une délégation du Chambon-Feugerolles avec, à sa tête, son maire David Fara. Et pour cause : la voisine de Firminy est très intéressée pour s’associer au dispositif de vidéoprotection de Firminy.

La Région a voulu mettre en avant vendredi son aide à Firminy au chapitre sécurité. Au premier rang, Julien Luya, maire, Renaud Pfeffer, vice-président à la sécurité, Sylvie Fayolle, conseillère régionale et maire de Saint-Paul-en-Cornillon, Dino Cinieri, député et conseiller régional.

Une mutualisation du CSU sur la table du Sivo

Il a même été pensé pour ça, explique Julien Luya. « Maintenant qu’il est va être en place, le plus dur est fait et on pourra y relier facilement le parc des caméras des communes voisines si elles le souhaitent. Il n’y a pas que Le Chambon-Feugerolles qui est intéressée mais aussi Çaloire, Saint-Paul-en-Cornillon ou encore Saint-Maurice-en-Gourgois avec qui nous avons passé une convention pour une mise à disposition d’effectifs de policiers municipaux. Tandis que Fraisses s’interroge, et même La Ricamarie désormais, jusque-là plutôt opposée à l’idée. Seule Unieux reste totalement contre. »     

Une prise de compétence à l’échelle intercommunale serait pertinente.

Julien Luya, maire de Firminy

En fait, c’est carrément l’idée d’une mutualisation du CSU (et donc aussi une contribution sur les ressources humaines nécessaires à l’échelle de chaque commune) qui a été posée sur la table du Sivo, Syndicat Intercommunal de la Vallée de l’Ondaine que préside David Fara. C’est-à-dire à l’échelle de ses 9 communes. De quoi d’ailleurs, aux yeux de certains élus locaux, redonner un sens à cette intercommunalité, héritage de la première ère intercommunale, celle pré métropolitaine et ayant depuis perdu la plupart de ses compétences pour se concentrer sur la culture. Il y a 15 jours, le financement d’une étude de faisabilité de l’idée a été voté au conseil du Sivo.

Julien Luya réclame plus de prérogatives pour les municipaux

Les premières bases d’une vidéoprotection intercommunale ? Julien Luya, lui, dit militer « à travers des courriers envoyés au ministère de l’Intérieur et au Président de la République pour que nos polices municipales puissent aller plus loin dans leurs prérogatives, par exemple pouvoir plus facilement interpeller, contrôler ou encore fouiller des véhicules ». Ce qui donnerait alors toujours plus à assumer de la part des municipalités ? « C’est vrai. Et c’est pour cela qu’une prise de compétence à l’échelle intercommunale serait pertinente… »

*Le fameux : « Ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays » lors du discours inaugural du président John Fitzgerald Kennedy en 1961.

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    Caméra de vidéoprotection. Photo d’illustration.
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