Saint-Étienne
vendredi 29 mars 2024
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Gaël Perdriau : « Trois mandats de maire, ce n’est pas trop long » (partie 1/2)

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Saint-Etienne, la Métropole, son rôle d’élu, sa vision de la collectivité, ses rapports avec l’Etat, Macron, ses ambitions pour sa ville, son agglomération, pour lui, la Présidentielle… Gaël Perdriau s’est confié à If Saint-Etienne, dans un entretien fleuve et exclusif. Nous vous le proposons en deux parties. Propos recueillis par Xavier Alix et Nicolas Bros.

Qu’est-ce qui a personnellement changé pour vous entre le premier mandat et le second ? Entre celui qui aspirait à être maire et l’est devenu et le sortant réélu ?

« A titre personnel, j’ai vécu la réélection comme un vrai soutien de mes concitoyens. Ils me connaissent, m’ont vu à l’œuvre pendant six ans et le fait d’être réélu dans ces proportions montre une adhésion à la vision que je porte pour Saint-Etienne et la Métropole et à ma façon aussi de faire de la politique. C’est évidemment pour moi une grande satisfaction car il n’y a finalement rien de plus cher que la confiance de mes concitoyens. C’est un encouragement à poursuivre dans la même direction.

Politiquement, je dirais que la vision que j’ai construite au fil des ans, en commençant avant même d’être maire, est confortée par les premiers résultats que nous avons obtenus pendant le premier mandat. Les choses vont plus vite parce que j’ai plus d’expérience, parce que j’ai la maîtrise complète des procédures et du contexte de la métropole et de la Ville. Tout ceci, même si la crise sanitaire est venue bousculer énormément de choses. Cela a ralenti la réalisation de certains projets, puisque la priorité a été de faire en sorte que nous traversions tous ensemble cette période sans qu’elle occasionne trop de dégâts. Quand je dis « nous », j’associe les habitants, les commerçants, les entreprises, les associations, les personnels soignants, les agents municipaux et métropolitains… »

Augmenter la fiscalité ? Au regard du contexte, la question se pose, oui. Je ne m’interdis rien.

En parlant de cette crise sanitaire, elle a marqué la fin du précédent mandat et le début de l’actuel. Vous assurez que votre gestion a permis à vos budgets d’encaisser le coup. Jusqu’à quand les finances de la Métropole et de la Ville peuvent-elles assumer leur « quoi qu’il en coûte » ?

« Depuis que je suis maire, en 2014, les finances publiques des collectivités ont subi plusieurs coups de boutoir.

Cela a d’abord été le plan d’économie de François Hollande avec 13 milliards d’euros pris sur le dos des collectivités locales. Tout ceci alors même que la règle d’or s’applique à notre niveau : on ne peut pas emprunter pour le budget de fonctionnement de nos collectivités. Le déficit structurel de l’Etat n’y existe pas. Nous devons toujours être à l’équilibre sinon la collectivité passe sous tutelle de l’Etat. Ce dernier nous a donc demandé ce que lui-même était incapable de faire. Ces réductions de dotation ont été un exercice très compliqué. Nous sommes parvenus à le réussir tout en maintenant la totalité de nos engagements du premier mandat.

Le deuxième coup de boutoir a été la décision d’Emmanuel Macron de plafonner la hausse de nos dépenses de fonctionnement à 1,2 % de l’année précédente. Là aussi, encore une fois, le président nous a imposé ce que lui-même est incapable de faire à l’échelle de l’Etat. Il est manifestement plus facile pour lui d’être exigeant avec les autres qu’avec lui. Bien que je n’aie pas souhaité signer cette contractualisation car je trouve qu’elle va à l’encontre de la liberté constitutionnelle d’administration des collectivités locales, nous avons respecté cette évolution des taux pour ne pas faire subir de pénalité financière aux collectivités que je dirige. Au passage, je vous fais remarquer que cette contrainte a été levée par le président de la République quand il s’est rendu compte que les collectivités locales étaient nécessaires pour subvenir aux besoins immédiats imposés par la crise, comme par exemple acheter des masques pour les personnels soignants. Ce que l’Etat était incapable de faire. Là, les collectivités ont pu dépenser largement plus que les 1,2 % de hausse… Quand l’Etat a besoin de nous, il sait modifier les règles.

Enfin, le troisième coup de boutoir, c’est la crise sanitaire en elle-même avec 8 millions d’euros de dépenses exceptionnelles et baisse de recettes pour la Ville et 12 millions d’euros pour la Métropole. C’est considérable. Nous sommes en train d’échanger avec l’ensemble des maires de SEM à propos du projet métropolitain qui débouchera sur une discussion à propos du pacte fiscal et financier. »

Une augmentation de la fiscalité liée à la Ville et Métropole est donc possible dans les années à venir ? A fortiori si le Covid devait à nouveau perturber vos finances ?

« La fiscalité fait partie des leviers qui nous permettent d’investir. J’ai tenu l’engagement en 2014, de ne pas l’augmenter à la Ville et à Sem pendant la durée du mandat. Cet engagement est même dépassé puisque s’y ajoute, désormais, une année. Mais dans le contexte actuel, la question d’une augmentation, se pose clairement oui. Il faut tenir un équilibre entre ce qui est supportable par nos concitoyens et ce qui est nécessaire pour préparer l’avenir. Je suis donc dans cette réflexion avec les équipes municipales et métropolitaine. Je ne m’interdis rien. Les leviers sont de toute façon relativement restreints : soit on augmente les impôts, soit on renonce aux investissements, soit on baisse la qualité des services… Je suis fier que nous ayons réussi, jusque-là, à faire tout le contraire sur ces trois paramètres. Par rapport aux 20 plus grandes villes de France, vous pouvez comparer, c’est un exploit. Mon travail, c’est de respecter et maintenir ces équilibres. »

Je suis pour une décentralisation plus forte à condition que l’on nous transfert les moyens.

Mais en cas de nouvelles vagues Covid impactant vos recettes et dépenses, vous n’aurez pas le choix ?

« C’est certain. Il y a deux cas de figure où il n’y aura pas de réflexion possible. Le premier serait que le gouvernement s’attaque encore aux collectivités locales. Je le répète : par la contractualisation l’Etat a contraint nos dépenses. Et par la suppression de la taxe d’habitation, il a contraint nos recettes. Donc nos marges de manœuvre sont désormais très étroites. Alors s’il y avait un nouveau plan d’économie gouvernemental sur le dos des collectivités locales, il n’y aurait pas d’autres choix que de les répercuter sur les impôts. Le second cas serait de vivre une 4e, une 5e ou 6e vague de Covid de la teneur des premières que nous avons vécues. Là encore, il n’y aurait pas d’autres choix que de faire appel à la fiscalité. On peut considérer que ces dépenses exceptionnelles relèvent de la solidarité nationale et devraient être prises en charge par l’Etat. Ce ne fut pas le cas jusqu’ici. Ce serait alors mon premier combat : que l’Etat assume et paie. »

Justement, depuis la fin des années 2000, les gouvernements successifs semblent engagés dans une logique de décentralisation à l’envers : compétences transférées sans moyens, dotations réduites, décisions assumées par les collectivités… L’Etat régalien est-il toujours plus en repli ?

« Je fais effectivement ce constat. Depuis une quinzaine d’années, nous avons un transfert de compétences et en réalité de charges sur les collectivités. On nous demande toujours plus. Sans doute aussi parce que l’Etat a compris qu’on le faisait mieux. Parce que nous sommes plus proches de nos concitoyens, des réalités des habitants et donc, en meilleure capacité de répondre. Mais les moyens ne sont pas transférés. Sans pour autant que la situation financière au niveau national se soit améliorée : la dette et le déficit n’ont jamais été aussi élevés. Les efforts que nous faisons nous, au niveau local, ne permettent même pas d’améliorer cette situation. C’est donc un échec des gouvernements successifs sur ces sujets-là.

Je suis pour une décentralisation plus forte à condition que l’on nous transfert les moyens. Les collectivités locales sont bien placées pour agir et le font beaucoup mieux, on l’a vu avec la crise sanitaire notamment. Mais en revanche, des missions régaliennes – la santé, l’éducation, la justice, la sécurité – ne peuvent pas être décentralisées ou reportées en responsabilité aux collectivités locales. Tout simplement parce que ce sont des missions qui imposent une proposition ou une exécution identique quel que soit le point géographique du territoire concerné. Peu importe le lieu où nos concitoyens habitent : le service est dû par l’Etat avec la même exigence. »

Conditionner les effectifs de police nationale au recrutement de policiers municipaux, c’est scandaleux. 

Sur la sécurité, les collectivités – au-delà même des municipalités – sont, en particulier de plus en plus sollicitées et actives. Est-ce le parfait exemple, à vos yeux, d’une dégradation de l’égalité républicaine à l’échelle du pays ?

« Vous avez raison de citer les questions de sécurité. Je suis très investi dans ce domaine à travers la commission de sécurité de France urbaine que je co-préside avec le maire socialiste du Creusot (David Marti, NDLR). La proposition actuelle des contrats de sécurité intégrée, déjà signés dans certaines villes, est en train de transmettre une mission régalienne aux collectivités. Il est absolument inacceptable de conditionner les effectifs de police nationale ou de justice aux moyens consacrés par les collectivités à ces missions régaliennes. J’en parle avec d’autant plus d’aisance dans la mesure où depuis que je suis maire, nous avons doublé les effectifs de police municipale, triplé le nombre de caméras de vidéo-surveillance, équipé nos policiers municipaux de caméras piétons et d’armes. 

Pour la justice, j’ai mis en place les travaux d’intérêt général (TIG) pour offrir aux juges des alternatives permettant malgré tout de sanctionner les exactions. Il y en a l’équivalent de 100, faisant ainsi purger les peines dans les services municipaux. Nous avons aussi mis en place avec le procureur des dispositifs de réinsertion pour les prisonniers mineurs et adultes aux résultats probants sur la récidive. Notre Ville prend largement sa part sur la tranquillité publique et pourrait donc tirer profit des contrats intégrés. Mais conditionner les effectifs de police nationale au recrutement de municipaux, alors que c’est une mission facultative, c’est scandaleux. »

Mais les élus ont-ils seulement le choix ? Et, confrontés aux électeurs, n’alimentent-ils pas cette tendance avec leurs décisions ?

« Nous avons toujours le choix. Le maire de Grenoble, très clairement, a décidé de renoncer à la vidéo-surveillance, de ne pas recruter des policiers municipaux. Celui de Nantes a décidé de ne pas armer sa police municipale. Le choix existe. En revanche, il y a une forme de chantage qui est fait par le gouvernement effectivement en conditionnant des effectifs d’une mission régalienne à des efforts municipaux. C’est contre cela que je m’insurge. La parole de l’Etat a une valeur. Elle doit donc être honorée. Sinon on brise confiance et lien entre citoyen et Nation.

C’est pourquoi Emmanuel Macron a autant de problèmes de remise en cause de sa légitimité, de son autorité. C’est parce qu’il s’est assis sur la parole publique. Quand Bernard Cazeneuve vient à Saint-Etienne en 2016, il promet devant moi, devant les journalistes, 100 policiers supplémentaires que l’on attend toujours. Alors, le chantage actuel du ministre de l’Intérieur ne vaut rien. Dans un autre domaine, l’A45 illustre aussi cette parole que l’on abîme. Il ne manquait plus qu’une signature. Le dossier a été arrêté sans que le gouvernement ne prenne pour autant de position officielle. »

Emmanuel Macron s’est assis sur la parole publique. C’est pour ça que sa légitimité est remise en cause.

Votre programme a beaucoup insisté sur la défense des valeurs de la République, il y a eu cette tribune dans Le Monde sur la société d’ennemis en février… Vous estimez que la société se fragmente : à Saint-Etienne aussi ? Et que peut faire un maire à ce sujet ?

« Cette fragmentation est encore plus prégnante que quand j’ai écrit cette tribune. On l’a vécu au moment des Gilets Jaunes. Je crois que notre pays n’a jamais vécu une crise sociale aussi dure, aussi violente avec des images qui resteront marquées à tout jamais et sans que le pouvoir ne soit capable de faire respecter l’autorité. Celle qui me reste est celle des saccages de l’Arc de Triomphe. Marcher sur la tombe du Soldat inconnu, détruire des pièces historiques, c’était pour moi une violation de notre Etat, de la France. Nous avons vécu la crise du Covid. On peut l’imputer à plusieurs décisions politiques. Sans aller bien loin dans l’Histoire, la décision prise de supprimer 100 000 postes à travers le plan Hôpital, lorsque le ministre de l’Économie et des finances s’appelait Emmanuel Macron et le rapporteur Olivier Véran, a une responsabilité dans ce que nous sommes en train de vivre.

Quand le même Emmanuel Macron, qui a supprimé ces postes en 2015, appelle aujourd’hui les étudiants en écoles d’infirmières ou les étudiants en médecine afin de pouvoir subvenir aux besoins primaires de notre pays, une des premières puissances mondiales, ce n’est pas normal. Quand Jean Castex initie la T2A (tarification à l’activité, NDLR) qui va causer la disparition de 100 000 lits, il porte une responsabilité dans la situation actuelle. On ne peut pas aujourd’hui faire confiance à l’un qui est devenu Premier ministre et à l’autre qui est devenu président de la République, pour régler une situation dont ils sont la cause. Tout cela participe de la fragmentation de notre société. Alors, oui, je pense que le maire a une responsabilité dans la cohésion de la société, en ayant un comportement qui se situe aux antipodes de celui-là. C’est-à-dire en gardant le contact avec ses concitoyens. »

De quelle manière ?

« Quand je suis en ville, que je participe aux manifestations d’associations dans nos quartiers, à des manifestations culturelles ou sportives, quand je fais mes courses, que je suis livré aux positions, aux avis de mes concitoyens sans filtre, de manière très directe avec ce que cela peut potentiellement engendrer. On a vu dans l’actualité une augmentation de la violence envers les élus qu’heureusement, je n’ai pas eu à expérimenter. Il est important que le maire soit ce lien direct permettant de prendre le pouls de la société, car Saint-Etienne n’est pas différente de la France. Dans la Métropole, nous avons des ouvriers, des chômeurs, des agriculteurs… Nous avons une « petite France » de 405 000 habitants dans sa diversité, ses difficultés, ses espérances et ses atouts. Je suis en prise directe avec l’état de la société et j’en tiens compte dans mes décisions. J’écoute ce qu’on me dit. Les maires constituent la première ligne du pouvoir et c’est aussi pour cela que j’accorde beaucoup d’importance à ma parole, ce que je peux promettre car je suis conscient que cela peut être une des premières causes de fracture entre certains responsables politiques et la population. »

A Saint-Etienne, nous avons une « petite France » de 405 000 habitants dans sa diversité, ses difficultés, ses espérances et ses atouts.

Les élus sont de plus en plus contestés, voire attaqués verbalement et même physiquement : le ressentez-vous ici ? La démocratie représentative a-t-elle vécu, doit-elle évoluer ?

« Ces attaques, oui c’est un fait qui existe, proche d’ici. C’était le cas, il y a encore quelques jours, pour mon collègue de Boën. Il y a eu mon collègue de Farnay et avant cela de Montbrison. Au passage, on voit que ces faits peuvent casser certains clichés sur l’idée que ces faits touchent d’abord les grandes villes. Je n’ai pas eu, comme je vous l’ai dit, à subir ni violence physique, ni verbale. Je suis pourtant souvent dans la rue, je fais mes courses moi-même et il me faut 2 h 30 à force de me faire interpeller par les Stéphanois au point où ma femme ne veut plus m’accompagner !

Quand je suis à l’arrêt de bus, quand je vais chercher mon thé chez Kusmi Tea, on m’arrête souvent pour me parler de quelque chose. Et très souvent, sincèrement, c’est courtois et avec une réelle gêne de me déranger. Mais j’ai conscience de cette montée de la violence envers les élus, jusqu’au sommet avec la gifle assénée à Macron. C’est inacceptable, il faut être intransigeant. Ce n’est pas des personnes qui sont violentées mais c’est ce que nous représentons – la République – qui est attaqué. Je constate aussi une exaspération montante alimentée par le mépris d’Emmanuel Macron pour les gens. »

Les médias sociaux ont pris de plus en plus d’importance dans la vie publique et politique. Vous utilisez notamment beaucoup Twitter, Facebook et LinkedIn. Gérez-vous vos comptes en direct ? Pour aller plus loin, est-ce que ces canaux de communication permettent selon vous de rapprocher l’élu de ses administrés ?

« Je suis plus assidu sur Facebook que sur les autres réseaux sociaux. Depuis 2013, tous les jours, à quelques exceptions près mais il y en a très peu, je rends compte à mes concitoyens du mandat qu’ils m’ont confié. Je gère moi-même l’ensemble des réseaux sociaux qui portent mon nom. C’est astreignant car cela prend du temps, mais je le fais pour deux raisons. D’abord car c’est un moyen de contact direct avec mes concitoyens et puis parce que les mots ont de l’importance pour moi. Je ne doute pas que si quelqu’un d’autre s’en occupait ce serait très bien écrit mais ce ne seraient pas mes mots. De plus, il y a une sensibilité personnelle que je veux partager. Quand j’écris quelque chose, je sais ce que je voulais dire. Je peux parfois commettre une erreur de vocabulaire ou de formulation. Mais je me dis que la meilleure personne pour expliquer l’emploi de tel ou tel terme, cela reste encore moi-même. Je dois avoir un peu plus de 21 000 personnes qui me suivent sur Facebook. C’est un moyen fort de communication. »

Je gère moi-même l’ensemble des réseaux sociaux qui portent mon nom.

Vous êtes-vous déjà senti agressé sur les réseaux sociaux ?

« Non, jamais. Il y a bien sûr parfois des commentaires durs mais je ne les enlève pas sauf s’ils sont discriminatoires ou insultants. Mais cela a dû m’arriver deux fois en sept ans. Je ne censure pas mes réseaux. »

Vous n’avez pas lancé de compte TikTok comme Roanne et Yves Nicollin, son maire l’ont fait ?

« Non, je n’ai pas TikTok et Snapchat. Déjà, j’utilise relativement peu Twitter car je trouve dangereux et trop réducteur d’exprimer une pensée en si peu de caractères. C’est pour cela que je suis davantage fidèle et assidu à Facebook. »

Vous parliez tout à l’heure d’attractivité. L’immobilier stéphanois reprend des couleurs ces derniers temps avec des prix qui ont tendance à augmenter. Pensez-vous que vous être en train de faire revenir des classes moyennes et supérieures à Saint-Etienne ?

« En 2014, j’ai établi une stratégie très volontariste avec des objectifs ciblés et marqués. Je souhaitais retrouver une démographie positive à Saint-Etienne, offrir des logements de meilleure qualité à mes concitoyens dans un environnement et un cadre de vie plus agréables. Pour cela, j’avais pris l’engagement de démolir 6 000 logements et d’attirer de nouveau des promoteurs pour construire des logements neufs adaptés aux besoins actuels. Parallèlement, nous avons mené une politique de réhabilitation et de rénovation de logements sociaux et dans le secteur privé, avec des subventions.

Parfois, certains me critiquent en disant que je vends la Ville aux promoteurs, mais je suis simplement conscient que la puissance publique à travers les moyens qu’elle peut consacrer à l’investissement, n’est pas capable de financer seule tous ces projets. Nous avons forcément besoin du soutien du secteur privé. Le Ville de Saint-Etienne n’a pas la capacité d’investir seule pour construire des centaines de logements et ce n’est d’ailleurs pas son rôle. Elle est là pour faciliter la construction de logements sociaux pour que chacun ait un toit confortable quels que soient ses moyens.

L’immobilier reste pour moi la pierre angulaire d’une politique d’attractivité de la Ville.

Je suis très fier qu’avec Christiane Jodar et Jean-Pierre Berger, nous ayons réussi notre pari, car la question de l’immobilier est centrale en termes de qualité de vie, d’attractivité des commerces… Je rappelle que dans la période 2008/2014, Saint-Etienne a perdu 350 commerces et 8 % des emplois liés aux commerces. Depuis 2014, nous avons vu l’ouverture de 500 commerces et cette dynamique est encore très vivante. Les moyens que nous avons mis en œuvre pour la reconquête des rez-de-chaussée vacants, la foncière commerciale qui entre en action, portent leurs fruits. C’est très encourageant pour la suite. Je vois que les prix de l’immobilier remontent, les durées de commercialisation sont beaucoup plus courtes… Quand nous faisons des appels à projets pour des terrains municipaux à construire, nous avons des dizaines de propositions qui arrivent. Cela fonctionne alors que ce n’était pas gagné d’avance comme pour l’impasse Clémenceau à Montchovet ou encore le lotissement communal du quartier Séverine. L’immobilier reste pour moi la pierre angulaire d’une politique d’attractivité de la Ville. On ne peut pas accueillir des emplois, des entreprises ou des étudiants si l’on n’a pas de quoi les loger. »

A propos d’attractivité, vous avez déclaré il y a quelques mois que l’ASSE avait besoin d’un nouveau souffle. Le club n’est toujours pas vendu à l’heure actuelle. Êtes-vous inquiet pour son avenir ?

« Je ne me suis pas permis deux choses : faire de l’ingérence sportive. Et faire de l’ingérence dans l’entreprise. J’ai, à l’époque, simplement demandé deux choses. La première : que les deux présidents clarifient leur volonté ou non de vendre le club, une arlésienne. Sur ce point, ils ont répondu : ils souhaitent bien vendre et ont mandaté le cabinet KPMG. La seconde chose que j’avais demandée, sachant que les co-présidents assurent que le montant de vente n’est pas le sujet, c’est qu’ils annoncent leur prix. Ils n’ont pas été jusque-là. Des négociations sont en cours qui ne me regardent pas. La suite me regardera quand on connaîtra l’identité du nouveau propriétaire en raison du stade qui, lui, est la propriété de la métropole. Il est important de faire savoir les priorités et points non négociables de la collectivité. Sur le plan sportif, je salue la politique de Claude Puel et de son adjoint Jacky Bonnevay qui vise à s’appuyer sur le centre de formation. C’est un véritable atout de notre club qui s’est révélé plusieurs fois dans son histoire mais abandonné à plusieurs reprises. C’est bien qu’on y revienne et de voir des garçons comme Etienne Green, sympathique et humble, en formidable ambassadeur. »

Il n’y a pas eu de maires stéphanois ayant enchaîné trois mandats depuis Alexandre de Fraissinette. C’était il y a bientôt 60 ans. Pensez-vous que trois mandats, c’est trop pour un maire dans les années 2020 ?

(Rires puis pause marquée) « Je pense que quand on porte une vision pour un territoire, de la longueur qu’il faut pour mener des projets et transformer en profondeur une ville en prenant soin de respecter son Histoire, son identité, ce qu’elle est, par ses habitants, il faut du temps. Tout ce que j’ai pu semer dans le premier mandat, on en verra les effets au cours de celui-ci. Les prix de l’immobilier augmentent ? C’est le résultat d’un travail de longue haleine. Ce que je suis en train d’effectuer pour faire reconnaître Saint-Etienne comme la ville étudiante qu’elle est déjà, je le fais avec un objectif visant 2030. Cela s’inscrit dans la durée.

Cette vision en tant que maire, c’est un peu comme être un jongleur d’assiettes chinoises. Un projet territorial, c’est une multitude d’assiettes à faire tourner en permanence, sans en oublier une seule. En ne perdant jamais de vue toutes les dimensions. Une seule à terre et c’est tout l’édifice qui se déséquilibre. Je suis attentif aussi bien au développement économique qu’à la cohésion sociale, qu’à la santé. Dans le précédent mandat, j’ai obtenu 70 M€ de l’Etat pour investir dans le CHU. Le plan existe et va se dérouler sur ce mandat-là. Lors de la venue de Jean Castex cet automne, j’ai demandé le doublement de l’enveloppe pour aller plus loin et moderniser pôle mère enfants et cancérologie. J’attends une réponse. Si je l’obtiens, ce serait historique, cela se fera sur 5 ou 6 ans.

L’action politique sur un territoire s’inscrit dans un temps long, la réalisation d’une décision prend du temps en consultation, en technique, en réalisation. Donc, trois mandats, ce n’est pas trop long. D’ailleurs, le législateur a inscrit dans la loi (une étape votée en 2018 sur le non-cumul, NDLR) la possibilité de trois mandats successifs pour un maire à partir de 2020. Il estime donc, lui aussi, que c’est une durée nécessaire… »

Retrouvez la deuxième partie de l’entretien avec Gaël Perdriau ici :
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