L’extraordinaire M. Brun, l’inventeur de Montverdun
Il est sans doute davantage connu dans le nord-ouest du Forez pour avoir été maire de sa commune, Montverdun. Et avant cela, vice-président à l’économie du feu Pays d’Astrée. Mais ce n’est pas la politique qui a mené et mène sa vie, davantage sa débrouillardise, sa capacité à mettre une solution technique simple face à un problème et, derrière, à la commercialiser. Michel Brun est inventeur. Son dernier né s’appelle Nicotube et sert à arrêter de fumer. Portrait.
Nous ne nous étalerons pas sur sa mini centrale hydroélectrique maison. Elle exploite le ruisseau qui parcourt sa propriété où se dresse un ex-moulin du XVIIIe siècle et lui vaut un brevet. Nous n’étayerons pas non plus son ex-activité de balnéothérapie pour chevaux. Même si elle lui a longtemps valu des sollicitations intenses du monde hippique hexagonal. Il y a déjà tant à dire sur son activité principale…
A 67 ans, Michel Brun n’envisage pas une seconde de l’arrêter. Si vous connaissez les joies du mouche bébé, il y a de grande chance que vous utilisiez un appareil tout droit sorti de ses courantes réflexions nocturnes. Des inventions, l’homme en cumule des dizaines depuis une trentaine d’années. Vous avez une forte probabilité des les avoir utilisées ou de les utiliser encore dans votre quotidien. A l’écouter, ce n’est pas compliqué. « J’identifie un problème. La nuit, je réfléchis comment le solutionner. Le lendemain, j’ai trouvé. Mais vous savez, pour faire ce que je fais, il suffit d’être curieux et de vouloir bosser. »
Pour faire ce que je fais, il suffit d’être curieux et de vouloir bosser.
Michel Brun
Une première vie professionnelle avec Formuling
Ajoutons un sacré sens technique que ne dément pas ce monte-charge industriel récupéré et installé à son domicile pour faire office d’ascenseur ! Si on cherchait une nouvelle définition d’autodidacte, « Michel Brun » irait très bien. D’une famille originaire de l’Allier, l’ex-maire de Montverdun ne témoigne pourtant d’aucun diplôme d’ingénieur. « Je suis à l’aise avec la mécanique, l’usinage, le plastique, le thermoformage, etc. Tout cela mais en revanche pas du tout sur l’électronique ! »
Ce fils de commerçants n’a donc « que » le bac en poche quand il rejoint ses frères au sein de l’entreprise « Formuling » à Unieux. Elle conçoit et vend des accessoires automobiles : volants de sport, tapis, sièges auto, enjoliveurs, rehausseurs, etc. Et Michel Brun, qui se reconnaît « bricoleur depuis tout petit », va vite contribuer au développement du bureau d’études. Il va ensuite diriger pendant des années la PME qui grossit jusqu’à atteindre les 200 collaborateurs environ au tournant des années 90.
La puériculture : une constante autour de ses inventions
Michel Brun est partout : innovation, produits, marketing, administration, vente. C’est stressant et beaucoup plus que prenant. Beaucoup trop en fait : ce gros fumeur subit un infarctus qu’il juge aujourd’hui « salutaire ». Nous sommes en 1995 et bien plus que d’arrêter la cigarette, il décide alors de changer de vie. « J’ai pris une feuille. J’ai fait deux colonnes : « ce que je veux », « ce que je ne veux plus ». » Direction le calme, la campagne et Montverdun pour y créer son activité d’inventeur indépendant. L’entreprise EMPS est née.
Sa première innovation sera vendue pendant des années par la grande distribution jusqu’à ce qu’une certaine marque nommée Febreze ne la chasse du marché, tel un rouleau compresseur. Sous les marques Deopro, Splendair ou encore Odolyse, le destructeur d’odeurs sans parfum conçu par Michel Brun l’avait précédée. « Je détestais les diffuseurs de parfum dans les voitures, alors j’ai eu cette idée. Mes clients m’ont prévenu de l’arrivée de Febreze. Comme je ne suis pas Don Quichotte, j’ai tout de suite arrêté. » Il passe vite à autre chose, et commence à s’intéresser à une constante de ses inventions à venir : la puériculture.
Il réalise prototypes, tests et moules depuis chez lui
Le voilà créateur d’une sucette pour bébé testeuse de fièvre. Puis s’enchaîne toute la série des certes très utiles mais peu ragoûtants mouche-bébés que l’on a pu retrouver à l’étranger, jusqu’aux Etats-Unis. La solution est alors novatrice. Bébé confort, Bébisol, Steripan, Stérimar, Tigex, Mercurochrome… : si vous êtes parents ou grands-parents, ces marques de puériculture, pour ne citer qu’elles car il y en a une quinzaine concernée, vous disent peut-être quelque chose… Elles comptent dans leurs gammes des modèles créés par Michel Brun.
Ce dernier travaille ainsi comme grossiste pour des marques et directement pour la grande distribution et des réseaux approvisionnant les pharmacies. EMPS ayant d’ailleurs aussi ses propres marques. Dans tous les cas, il réalise prototypes, tests et moules chez lui, dans son atelier. Avant de les confier à des sous-traitants en France ou en Europe chargés de la production des séries. Sa logistique est confiée à un centre de Saint-Quentin-Fallavier, paradis du secteur en Nord Isère.
Michel Brun est derrière au moins 35 brevets
Puériculture (on peut encore citer cet étuis à écouvillons) donc, mais aussi hygiène (un système de cotons tiges rechargeable) ou encore paramédical avec ce pilulier intelligent permettant de faciliter la prise de médicaments, même par un aveugle : les inventions de Michel Brun visent à faciliter le quotidien des gens avec des innovations simples mais auxquelles il fallait penser. De mémoire, il a comptabilisé ainsi au moins 35 brevets. Tout n’a pas toujours marché, comme cette idée de vendre dans les années 2000 une gamme de produits auto dans des pots en carton recyclable. Elle était arrivée, commercialement parlant, trop tôt aux yeux de la grande distribution qui l’avait refusée…
« Je ne travaille pas, c’est passionnel », considère Michel Brun dont l’entreprise est cet automne à un tournant. Sa fille Sophie, elle pour qui, « il était compliqué d’expliquer, petite à l’école, ce que faisait papa » l’a en effet rejoint cette année dans sa société pour l’aider à lancer EMPS Pharmacie tout en continuant les activités de grossiste. « Je vais devenir mon propre concurrent avec d’autres produits ! », s’en amuse Michel Brun. Sur ces gammes-là, Sophie va développer l’aspect marketing et commercial direct donné clé en main aux pharmacies, allant jusqu’à leur fournir des démonstrations vidéos à exposer dans leurs officines.
Nicotube, « sa plus grande invention »
Il faut dire que l’entrepreneur annonce mettre en vente via ce canal ce qu’il considère comme « sa plus grande invention » : la solution Nicotube, déjà disponible sur le web, pour arrêter de fumer, attendait dans les fichiers depuis plus de 13 ans. Le principe : proposer aux fumeurs d’utiliser successivement une série de huit embouts réduisant à chaque fois un peu plus – selon le rythme souhaité – le volume de la fumée. « Se débarrasser de l’addiction est ainsi facilité. Et je connais très bien le problème : c’est une réponse de fumeur à un problème de fumeurs », souligne Michel Brun.
« Les tests ont montré une efficacité à 92 %. Pour moitié, un arrêt total en quelques mois, sinon une consommation très réduite. Alors que les substituts nicotiniques amènent 84 % de rechute. » Sur ce produit, l’inventeur a fait appel à deux entreprises de la Loire. Duwa (Saint-Etienne) pour produire les écouvillons nettoyage. Et e-Obs (Roanne) pour produire le développement web.