Pierrick Courbon : « Je plaide au niveau local pour un plan de relance massif »
Pierrick Courbon est conseiller municipal d’opposition et candidat socialiste aux Municipales 2020, qualifié au second tour avec 21,31 % des voix. Comment poursuit-il sa campagne en période de confinement ? Prévoit-il de faire liste commune avec Olivier Longeon (EELV) pour le second tour des Municipales ? Quelles mesures de relance économique pense-t-il mettre en place en cas d’élection ? Éléments de réponses.
Comment faites-vous pour poursuivre votre campagne pour le second tour des Municipales 2020, sachant que la date n’est pas fixée et avec le confinement ?
Pour l’instant, l’heure n’est vraiment pas à la campagne électorale, qui est suspendue. Suspendue à triple titre, puisque d’une part, nos concitoyens sont actuellement très éloignés des préoccupations électorales, parce que d’autre part, les élus ont bien d’autres choses à gérer, à prévoir, à mettre en place pour traverser la crise, et enfin, la campagne est suspendue aux décisions du gouvernement qui doit communiquer d’ici le 23 mai sur la date du second tour, ou sur celle de nouvelles élections à deux tours à l’automne ou plus tard… Néanmoins, je continue de réunir régulièrement mon équipe de campagne, mes colistiers, afin de maintenir le lien, et recueillir avis, idées, propositions pour la gestion de la crise et la préparation de « l’après ». La force de « Saint-Étienne Demain » [nom de la liste menée par Pierrick Courbon, NDLR], c’est l’intelligence et le travail collectifs : je fais tout pour préserver cela.
Selon vous, pourrions-nous voir le second tour des élections municipales se dérouler en juin ? Ou bien préfériez-vous qu’on le reporte à plus tard ?
Je préférerais qu’on le reporte à une date qui garantira le maximum de sécurité sanitaire à la population. Cela doit être la seule boussole. De toute façon, la dynamique de la campagne est cassée, alors la date importe peu. Les intérêts des acteurs divergent. Les maires sortants, pour la plupart, souhaitent voter au plus tôt, car plus tôt on votera, plus ils seront favorisés par un vote « refuge ». Les associations d’élus poussent fortement pour un vote fin septembre, pour bousculer le moins possible le calendrier des élections sénatoriales. Enfin, certains partis alliés ou proches de la majorité présidentielle, dont l’UDI et le MoDem, plaident pour un report en mars 2021, en même temps que les élections départementales et régionales. Quoi qu’il en soit, cette décision, comme beaucoup d’autres, s’imposera à nous.
Est-ce que vous allez faire liste commune avec Olivier Longeon pour ce second tour ?
Si le second tour a lieu en juin, oui, c’est acté. Nous avons déposé une liste d’union de la gauche et des écologistes, le mardi 17 mars. Même si nous savions que le second tour était reporté, il nous a paru important, à Olivier Longeon et moi-même, de montrer que cette union s’est faite naturellement, simplement et sincèrement, sans calculs d’arrière-boutiques. Si nous devions refaire les deux tours, je souhaiterais naturellement que nous proposions d’emblée, dès le premier tour, une liste de large rassemblement, de l’ensemble des forces de gauche, écologistes et humanistes. À cet égard, les résultats du 15 mars doivent pouvoir être lus comme une primaire de toute la gauche et des écologistes.
En cas d’élection, quelles mesures mettriez-vous en place afin de relancer la vie économique stéphanoise ?
Comme toujours, notre territoire saura trouver les ressources pour assurer son rebond. Dès le mois de mars, lors d’un débat télévisé pendant la campagne, j’ai été le premier à évoquer la nécessité d’un « fonds de soutien métropolitain » pour nos acteurs économiques locaux. Depuis, des mesures ont été annoncées, et celles-ci vont dans le bon sens, même si elles restent insuffisantes. Au sortir du confinement, il faudra d’abord faire un état des lieux précis de la situation des entreprises locales, qu’il s’agisse de commerces, de TPE-PME, d’activités artisanales. Un plan de relance local devra être proposé. Il doit pouvoir venir abonder les dispositifs existants au niveau national, tout en accentuant son action sur des domaines d’activité propres à notre territoire ou qui passeraient à travers les grilles des mesures nationales. Il faut que les collectivités locales jouent plus que jamais leur rôle d’accompagnateurs du monde économique, dans un dialogue constant avec celui-ci. Pour que nos aides soient utiles et efficaces, elles devront d’ailleurs être co-construites avec ses représentants, et pas imposées par les « suppositions » des élus. Enfin, elles devront être surtout faciles d’accès et sans lourdeurs administratives inutiles.
Je plaide donc au niveau local pour un plan de relance massif qui doit également nous permettre de changer de modèle de développement économique, en ciblant prioritairement le secteur de la transition énergétique, car la crise épidémique actuelle ne réglera pas la crise climatique qui demeure. L’argent public mobilisé pour « l’après » ne saurait soutenir des activités « climaticides ».
Êtes-vous satisfait de la tenue du conseil municipal par visioconférence ce mercredi 29 avril ?
Oui, parce que nous l’avons demandé avec force ! Depuis le début de la crise, les élus minoritaires du conseil ont saisi le maire à de nombreuses reprises avec des questions et des propositions constructives, souvent sans réponse. Par ailleurs, alors qu’une cellule municipale de coordination a été mise en place, les élus doivent se contenter de lire la presse ou les réseaux sociaux pour avoir un état journalier de la lutte contre le Covid-19 à Saint-Étienne. Cette situation est regrettable dans un contexte où la nécessité d’une totale solidarité est réelle et inacceptable sur le plan démocratique. Il serait particulièrement inopportun d’ajouter à cette crise sanitaire, économique et sociale historique un déficit démocratique facilement évitable. Nous ne pouvions accepter que le seul conseil qui soit systématiquement écarté du processus décisionnel et privé d’informations soit le conseil municipal. Dans cette période troublée et anxiogène, il appartient au maire, conduit par un souci constant de l’intérêt général, de rassembler les élus municipaux, et à travers eux, l’ensemble de la population stéphanoise, dans la lutte contre le Covid-19.
Pourquoi était-ce important pour vous que ce Conseil se tienne ?
Dans cette période particulière, nous devons faire preuve d’un sens aigu des responsabilités et travailler ensemble pour que Saint-Étienne puisse se relever de cette terrible crise. Travailler ensemble, rechercher les meilleures solutions, c’est faire preuve d’humilité tant dans les décisions qui sont prises, décisions qui doivent être au service de la gestion de la crise et non de la gestion d’un plan de communication, que dans les éventuelles contre-propositions voire critiques qui sont faites, parce que personne ne détient de vérité. Aussi, l’attitude qui consiste à faire un procès en irresponsabilité à tous ceux qui osent émettre un avis divergent n’est clairement pas à la hauteur. Cette stratégie de culpabilisation au service d’une recherche de discipline est inefficace et inappropriée. L’unité à laquelle aspirent les Stéphanois vis-à-vis de leurs représentants, cela ne peut pas se résumer à applaudir benoîtement ce qui est dit et fait. C’est, au contraire, créer les conditions pour une vision partagée de la gestion de la crise, sur la sortie du confinement et sur l’après-crise. Pour cela, notre démocratie ne doit pas être confinée car elle est le terrain fertile de l’intelligence collective qui doit être au service de Saint-Étienne.