Un homme dans un milieu de femmes, épisode 4
Elles exercent des professions traditionnellement occupées par des hommes, ils exercent des professions traditionnellement occupées par des femmes… À leur manière, ils font bouger les lignes, et démontrent au quotidien que l’on peut faire aussi bien que son voisin, même si l’on est différent. Dans la Loire, Alexis Bruneteau, apprenti maroquinier, voit surtout les choses évoluer. Portrait.
Il s’appelle Alexis, il a 24 ans, un visage enfantin, une voix douce, calme, posée. A l’adolescence, il a suivi un cursus en ébénisterie. Mais, allergique à la poussière, il a bien vite compris, qu’il ne pourrait pas faire ça toute sa vie. Porté par sa forte affinité avec l’artisanat, Alexis s’est alors réorienté en maroquinerie. Après un CAP en deux ans, il a intégré en septembre dernier le très prisé Tour de France des Compagnons du Devoir : « Cette année, j’ai trouvé un patron, dans une grande entreprise du Forez. Chaque année, on change, cela permet d’acquérir davantage d’expérience et d’expertise, de voir différentes choses », explique le jeune homme.
C’est un métier qui demande de la minutie. Si on se trompe, on en peut pas rattraper le coup.
Alexis Bruneteau, apprenti maroquinier
Depuis lors, Alexis revit. Plus d’allergie, et puis, surtout, un métier qui le passionne chaque jour un peu plus, au fur et à mesure de sa découverte. « C’est un métier qui nécessite que l’on soit très minutieux, puisqu’on est dans un travail du détail. Et puis, le cuir est un matériau mou, très difficile à gérer. Le moindre défaut se voit, donc, il ne faut pas qu’il y ait de défaut, si l’on se trompe, on ne peut pas rattraper le coup ».
Tour de France des Compagnons
Sur la chaîne de production de l’entreprise dans laquelle il travaille, Alexis découvre peu à peu tous les postes. Coupe, refente, piqûre, montage, finitions, pour réaliser des sacs ou des portefeuilles… Des tâches qui, dans de plus petites entreprises, sont généralement effectuées par une seule et même personne. Alors, Alexis optera-t-il pour l’industrie ou l’artisanat une fois sa formation terminée ? Impossible de le dire, pour le moment : « J’aime bien un peu tout, j’aime bien varier. Ce que je voudrais faire plus tard est un peu brouillon pour le moment. Je suis là pour découvrir, alors, je découvre, et mes choix vont s’affiner au fur et à mesure. Mon tour de France va durer 5 ou 6 ans, alors, j’ai le temps… »
Un homme au milieu des femmes
Dans cette profession, Alexis a également découvert une autre ambiance, que lorsqu’il apprenait l’ébénisterie. Beaucoup de gens en reconversion professionnelle, et puis surtout… Beaucoup de filles ! « Ça évolue, il y a de plus en plus d’hommes, mais on reste tout de même très minoritaires. Moi, ce n’est pas quelque chose qui me dérange. Quand on est le seul garçon, on est un peu chouchouté ! A mon avis, c’est beaucoup moins difficile que l’inverse. Je pense vraiment que c’est beaucoup plus compliqué pour une fille qui doit évoluer dans un milieu d’hommes… »
Sa reconversion dans un milieu traditionnellement plutôt féminin, son entourage l’a toujours vue de manière positive… De même que tous les gens à qui il a eu l’occasion d’en parler, ou même, les femmes avec lesquelles il travaille : « Je n’ai jamais eu de remarques frontales à ce sujet. Les gens ne sont pas choqués, ils n’ont pas de préjugés. Et puis… En maroquinerie, c’est parfois utile, d’avoir un garçon sous la main, pour les opérations plus physiques, comme porter les peaux, qui sont très lourdes, lors de la première opération de coupe. Je crois vraiment que les choses évoluent. La preuve : quand j’ai démarré mon cursus en CAP ébénisterie, il n’y avait que deux filles. Et pour mon BMA, il y avait autant de filles que de garçons. »