Conseil de développement de SEM : 20 ans, même pas sur les dents
Instance de démocratie participative au titre de l’expertise et des profils variés de ses 134 membres, le Conseil de développement de Saint-Etienne Métropole (SEM) insiste sur son caractère apolitique et transversal. Son rôle n’est d’ailleurs pas de déterminer, ni même de réorienter les politiques publiques envisagées par les élus mais d’émettre des avis sur des thématiques, souvent au-delà de leurs projets immédiats. Il agit d’ailleurs par saisine et « auto-saisine ». Le conseil de SEM a fêté ses 20 ans le 9 décembre en présence d’une « marraine » de marque : Dominique Voynet, ex-ministre verte de Jospin, instigatrice de la loi ayant acté la création de ces conseils.
« Je n’aurai jamais cru à des conseils de développement adaptés aux métropoles, je les voyais davantage pertinents pour les communautés de communes ou les « Pays ». Force est de constater que certaines grandes agglomérations ont su se les approprier à bon escient. Et c’est particulièrement le cas ici : il y a d’ailleurs peu d’équivalents. » Dominique Voynet, membre verte éminente de la « gauche plurielle » sous Jospin (1997 / 2022) était derrière la loi du 25 juin 1999 d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire, dite, du coup, « loi Voynet ». Elle était alors ministre de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement et « sa » loi venait ainsi de créer, entre autres, cette nouvelle instance de démocratie participative. A l’origine donc, celle-ci visait surtout à apporter un soutien en termes d’expertises aux petites intercommunalités alors naissantes et susceptibles d’en manquer dans leurs services balbutiants. Depuis, les conseils sont devenus obligatoires pour toute intercommunalité de plus de 50 000 habitants.
La présence de Christian Brodhag, ex Vert (jusqu’en 1994, parti préalable à EELV) et ex délégué interministériel au développement durable (2004 / 2008) parmi les 11 membres du bureau du conseil de développement de Saint-Etienne Métropole (SEM) n’est peut-être pas étrangère à la venue de Dominique Voynet, de nos jours députée EELV du Doubs à Saint-Etienne le 9 décembre dernier. Ce soir-là, le Conseil de développement de Saint-Etienne Métropole a souhaité sortir de sa relative discrétion en conviant la presse à une soirée solennelle marquant les 20 ans de sa création, au sein du siège de Casino. Rappelons que l’ex-directeur des relations extérieures du groupe, Claude Risac a été président de l’instance de 2015 à 2021 et que Casino continue à être naturellement représenté au sein de son bureau et dans son collège acteurs de l’économie via Gilbert Delahaye. Mais c’est toutefois un syndicaliste, le secrétaire départemental de Force Ouvrière (FO), Éric Blachon, par ailleurs membre du conseil économique et social, à qui est revenue la présidence il y a plus de 3 ans. Il avait été approuvé à l’unanimité par l’assemblée, même si c’est bien le président de Métropole qui propose son nom – et donc, Gaël Perdriau en 2015 et 2021 – un an après les Municipales.
Une activité bénévole
Un leader syndical à sa tête : voilà de quoi donner, a priori, du crédit quant à son caractère « transpartisan », « apolitique » – aucune personne actuellement élue ne peut évidemment en faire partie – ainsi que la sérénité constructive de ses débats tels qu’affichés par le conseil de développement dont l’organisation, la composition faite de membres de la « société civile » ont été, dans une large mesure, laissées par le législateur à la libre appréciation locale. Ici, ses membres sont ainsi proposés et reproposés par l’exécutif métropolitain (lui-même composé de maires aux bords politiques très variés même si celui de la majorité de la Ville centre ressort mécaniquement davantage) au début d’un nouveau mandat. Des personnes, faisant acte de candidature, peuvent l’intégrer toutefois en cours de route. A Saint-Etienne Métropole, ses désormais 134 « acteurs » (un nombre croissant au fur et à mesure de l’agrandissement de l’intercommunalité : ils étaient 75 au départ) en quatre collèges : « économie » de loin le plus touffu avec 55 membres et où se retrouvent des entreprises, chambres consulaires, syndicats patronaux, de branches mais aussi les syndicats représentant les salariés ; « cadre de vie et environnement » ; « culture, sport et éducation » ; « santé, solidarité et lieu social ».
Des membres pour qui cette activité est bénévole. Le budget du conseil, lui, ne dépassant pas les 7 000 € par an, nous précise-t-il, sans compter les deux postes de fonctionnaire – directrice et chargée de mission – spécifiquement détachés par Saint-Etienne Métropole à son activité. « Depuis le lancement du conseil en 2004, soit par saisine de l’exécutif, soit par auto-saisine, plus d’une trentaine d’avis, d’études, de prospections issus de nos travaux ont été remis aux élus de la métropole », estime Eric Blachon, 4e président du conseil après donc après Claude Risac, Jean-Pierre Picolet et feu Claude Faure à qui il a d’ailleurs rendu hommage. Analyse de la situation à l’instant T sur une thématique, atour de choix d’aménagement à effectuer ou de mise en œuvre d’une politique de long terme, ses « contributions » d’aide à la décision des politiques publiques sont effectivement 34 à pouvoir être consultées sur l’onglet spécifiquement consacré au sein du site web de Saint-Etienne Métropole. Le conseil est, par exemple, derrière l’objectif des 40 000 étudiants à Saint-Etienne à l’horizon 2030 dans le cadre d’une projection générale de ce que devrait être l’agglomération à cette date ou encore pas étranger à la constitution d’une stratégie propre à la biodiversité à la demande là de l’exécutif métropolitain en 2021.
Politiques publiques passées, présentes et à venir
On y retrouve des rapports sur des politiques publiques d’actualité, d’un récent passé (la 3e ligne de tramway), sinon plus loin dans le rétroviseur, comme au début des années 2010 à propos de la création de la coopération inter intercommunale qu’était le Pôle Métropolitain, rayée de la carte il y a 2 ans, ou encore du projet « Cœur de Ville » (et donc de facto cœur d’agglomération) de la municipalité Maurice Vincent. Parfois, « l’ancien » rapport se révèle d’actualité comme, à titre d’exemple, le suggère la présentation d’un rapport en auto-saisine de 2009 consacré à la maîtrise foncière traitant « aussi bien du développement économique que de l’habitat, et de manière plus transversale, du développement durable ». Un rapport avait été consacré en 2015 à une partie spécifique du territoire de Métropole, la redynamisation de la vallée du Gier, à la demande là, exceptionnelle du Pôle Métropolitain, puisque considérée comme trait d’union entre les agglomérations stéphanoises et lyonnaises et donc enjeu d’ampleur. Une fois rédigé de manière collégiale, un projet d’avis, préalablement adopté par le bureau, est voté par l’AG avant que sa « promotion » ne soit effectuée auprès des vice-présidences politiques concernées.
Le conseil dit beaucoup œuvrer sur la mobilité en ce moment – comme sur l’eau – et a d’ailleurs émis récemment un rare communiqué de presse pour réclamer à l’Etat et SNCF réseaux, d’enfin prendre la mesure (et les moyens avec) des enjeux de la ligne ferroviaire Saint-Etienne / Lyon aux besoins aussi criants que délaissés au regard de son importance pour une agglomération de 400 000 habitants. Mais pour ce qui est de la géographie, « nous essayons aussi d’avoir des représentants dans toutes les communes ou zones que recouvre le périmètre de métropole ». Bref, alors que l’assemblée politique élue de Saint-Etienne Métropole connaît depuis plus de 2 ans une période de nature conflictuelle sans doute inédite dans sa longueur et son intensité, c’est un message de transversalité, de conduite de l’intérêt commun sans arrière-pensées politiques qui transpirait via la communication de cet anniversaire. Etat d’esprit abondé par Dominique Voynet : « Pour moi, si : un conseil de développement fait de la politique mais dans son sens large, celui relatif à la conduite des affaires publiques. Mais si un homme ou une femme politique cherche à le manipuler par intérêt, là, ça ne peut pas marcher. »