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mardi 3 décembre 2024
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Le Scot Sud Loire adapte ses directives aux défis de la sobriété foncière

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De manière triviale, un Schéma de cohérence territoriale (Scot) peut se définir comme une sorte de « super » PLUI, plan local d’urbanisme intercommunal. Ce dernier doit, justement, être conforme au premier. Celui Sud Loire regroupe Saint-Etienne Métropole, Loire Forez agglomération, Forez Est et les Monts du Pilat, soit près de 600 000 habitants concernés. Sa révision vient d’être actée entre les quatre intercommunalités pour une application espérée fin 2025. Afin donc, via ses projections, de caler ses directives sur les exigences de loi Zan, la fameuse « zéro artificialisation nette ». Restrictions en perspective. 

La loi ZAN vise la préservation des milieux naturels, de la biodiversité et des espaces agricoles, ces derniers ayant reculé de 1 500 ha dans la Loire de 2010 à 2020. ©If Saint-Etienne / XA

« Bien sûr, cette loi peut tout à fait évoluer, anticipait il y a 2 semaines Christophe Bazile. Mais quelle que soit la suite, il faut avancer. On n’a plus le choix. » Le président de Loire Forez Agglomération est aussi celui du Schéma de cohérence territoriale (Scot) du Sud Loire, commun à son intercommunalité, Saint-Etienne Métropole, Forez Est et les Monts du Pilat. Pour rappel, et si l’éventualité d’un assouplissement semble dans l’air, dans l’objectif de « lutter contre l’artificialisation des sols », la loi Climat et résilience du 22 août 2021 exige des collectivités derrière les PLU (plan local d’urbanisme) communaux ou intercommunaux le fameux « zéro artificialisation nette (ZAN) » pour 2050 : toute artificialisation sur un terrain agricole ou naturel se devra à cette date d’être compensée par une renaturation au centimètre carré près. Sachant toutefois que les bâtiments agricoles ne sont pour l’instant pas comptabilisés, implantations de panneaux photovoltaïques compris, précisait Christophe Bazile au regard, sans doute, de l’actualité et donc du croisement de tensions avec le monde agricole.

Tendu, le rapport entre élus locaux et administrés risque de l’être un peu plus vis-à-vis de l’impératif zéro artificialisation, d’ailleurs déjà en chemin. Le Scot Sud Loire, et donc derrière les PLUI et PLU, doit amener à réduire de 54,5 % la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers entre 2021 et 2031 par rapport à la période 2011-2021 (qui a vu 1 528 ha consommés ; l’équivalent de près de 20 % de la superficie de la Ville de Saint-Etienne), comme l’exige la loi, pour préparer l’objectif 2050. Sur les périodes 2031-2040 puis 2041-2050, la réduction du rythme d’artificialisation doit se poursuivre à nouveau de 50 % sur chacune de ces tranches de 10 ans par rapport aux précédentes. Vice-président de Saint-Etienne Métropole chargé de la cohésion territoriale et de la stratégie foncière et vice-président du Scot Sud Loire, Gilles Thizy entamait le 30 septembre, devant le conseil municipal de Saint-Etienne, une tournée des 53 communes de la métropole. Le maire de Marcenod se doit de leur présenter, une à une, le Projet d’aménagement et de développement durable (PPAD) à l’échelle métropolitaine, document « étape » capital dans l’élaboration du Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI).

Encore 264 ha « artificialisables » sur Métropole jusqu’en 2041

Ce lundi 30 septembre, les détails techniques et les calculs des contraintes de sobriété foncière à l’échelle de son intercommunalité avaient été explicités. Pour faire très gros, à ce stade, les estimations réalisées par l’agglomération la placent sur un « reste » théorique « artificialisable » de 264 ha de 2025 à 2041. Soit en 17 ans. Sachant que la consommation sur le même périmètre à périmètre constant, a été de 625 ha, de 2011 à 2021, en 11 ans… « La population n’a pas conscience de tout ça. Si vous saviez la quantité de courriers que nous recevons pour faire passer des terrains en constructible… Il y aura des choix difficiles à expliquer et des déçus », expliquait déjà à If Saint-Etienne, Gilles Thizy en juin 2022 dans un dossier consacré aux chiffres de l’artificialisation des sols dans les deux tiers sud de la Loire. Artificialisation particulièrement marquée vis-à-vis de la moyenne nationale dans le rapport mètre carré urbanisé/nouvel habitant de 2009 à 2019. C’est bien pour tenter d’expliquer tenants et aboutissants de l’application imminente des exigences de cet « horizon Zan » à l’échelle du Scot Sud Loire donc que Christophe Bazile a souhaité rencontrer la presse mi-novembre.  

Mis en place il y a une vingtaine d’années, le Scot Sud Loire a vu son périmètre s’élargir en 2018. Il s’agit de sa 3e révision mais sans doute la plus marquante. Photo d’illustration

Avec quatre intercommunalités, l’enjeu concerne tout le monde et tous les territoires urbains, périurbains, semi-périurbains et ruraux et donc, à l’échelle du Scot Sud Loire, 198 communes sur 2 904 km2, 597 000 habitants, 224 440 emplois, 2 660 agriculteurs et 267 100 résidences principales. 1 675 logements y ont été construits de 2013 à 2022. La gouvernance de ce Scot, tenue par les élus des différentes intercommunalités, vient de se mettre d’accord sur une procédure de révision – via le Projet d’aménagement stratégique (PAS) – et donc une intégration de l’objectif Zéro artificialisation conforme à son dernier opus législatif datant du 20 juillet 2023. Cette procédure de révision doit se terminer en fin d’année pour une mise en application du au sein du Scot espérée fin 2025. Forcément, cela entraînera des conséquences gigantesques sur le droit à urbaniser, les capacités d’aménagement de chaque municipalité. Pour l’habitat comme pour l’économie, à l’exception du secteur agricole dont la préservation est justement un des objectifs.

« Le compteur tourne depuis déjà 2021 »

Mais au moins, et c’est l’intérêt d’un Scot ici techniquement orchestré par l’agence parapublique d’urbanisme Epures, la mise en place est élaborée dans le cadre d’une coordination des différents territoires avec l’idée affichée de prendre en compte les réalités de chaque territoire. Des réalités actuelles d’où découlent aussi des projections dans le futur fatalement théoriques (il s’agit de se projeter sur 25 ans) guidant cette élaboration et sa mise en place. A commencer par la démographie. Sur trois scenarios, « nous avons choisi le scenario central : une hausse de la population jusqu’en 2057 (+ 29 000 habitants jusqu’en 2051) avant une stabilisation puis un léger recul », explique Christophe Bazile. Côté habitat, cela permet, en cohérence avec le marché local, d’évaluer les besoins en logements supplémentaires dans le périmètre sur les trois tranches décennales : 2 550 par an entre 2021 et 2031 ; 2 200 par an entre 2031 et 2041 et 2 150 entre 2041 et 2051.

Le temps des pavillons neufs, des lotissements comme nous l’avons vécu, c’est fini.

Christophe Bazile, président du Scot Sud Loire

Cela en respect, donc, de la consommation foncière maximale autorisée et applicable à chaque document d’urbanisme (que l’on ait ou pas un PLU ou PLUI) : « Il faut avoir conscience que le changement de paradigme n’est plus à envisager mais à prendre à compte et vite si cela n’a pas déjà commencé. N’oublions pas le compteur de cette consommation tourne depuis déjà 2021 », avertit Christophe Bazile. Ce qui est consommé depuis et actuellement compte et ce sera autant de moins « autorisé » ensuite. « Il faut vraiment que tout le monde ait conscience de l’enjeu sinon on pourrait dès la mise en application du Scot ne plus avoir d’hectares à consommer ! », insiste le président du Scot arguant de la pertinence des PLUI pour mieux y arriver, quelque soit la taille de la commune. Et même si les collectivités parviennent à accélérer sur le recyclage des friches qu’elles deviennent logements ou autres (et elles ne partent sûrement pas de zéro à ce sujet), ce ne sera pas suffisant pour compenser. « Le temps des pavillons neufs, des lotissements comme nous l’avons vécu, c’est fini », assume Christophe Bazile.

L’eau, l’économie et la mobilité aussi dans le coup

 ©Epures

Déclaration probablement inimaginable pour un élu du Forez dans les années 1970, 80, 90, voire au-delà, quand une très grande partie de ce territoire donnait lieu à un processus de périurbanisation presque « d’école ». Mécaniquement, au sujet des choix d’habitat, et dans une logique de densification, reprises des « dents creuses », de la vacance dans chaque territoire aussi bien dans les villages, que les petites, moyennes et la grande ville qu’est Saint-Etienne, on ne peut pas s’empêcher de se dire que les prix de ce qui restera disponible à construire – ou à racheter – en zone périurbaine, celle des lotissements, vont exploser. Du moins si la population continue à augmenter ou à émettre la volonté de quitter les zones urbaines denses dès lors que c’est envisageable. Et si obtenir cette « tranquillité », le droit à s’installer hors de la densité devenait du coup plus que jamais, seulement accessible aux portefeuilles les plus épais ? « Encore une fois, il y a beaucoup de craintes compréhensibles autour de cette loi. Elle a ses problématiques, ses écueils sont remontés. Mais ici, nous ne faisons pas la loi, nous faisons en sorte, et nous le faisons collectivement, que nous puissions être en conformité. Sinon, c’est l’arrêt pur et simple des autorisations permis de construire. Du jour au lendemain. »

Intimement liés aussi à cette conformité et à ce qui s’envisage sur l’habitat, l’économie et les infrastructures de mobilités. Les deux sont aussi impactés avec le fil rouge ne plus éloigner le logement des lieux de travail mais au contraire de les rapprocher. Le Scot du coup doit, à terme, accorder plus de place d’hectares consommables à l’activité économique qu’aux nouveaux logements dans une proportion de 60 / 40 % d’ici 12 environ. Projection qui intègre des projets de nouvelles zones encore non actées comme Stelytec II dans le Gier. Mais aussi, changement de temps encore, les ressources en eau et la capacité d’une zone géographique à absorber les nouveaux venus, habitants ou entreprises. Surtout que la hausse des besoins agricoles en la matières sont estimés à + 16 % d’ici 2050…  

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