Les associations dans la Loire, combien de divisions ?
C’est l’un des premiers observatoires de la vie associative à l’échelle d’un département. Un nouvel outil d’enquête statistique destiné à l’aide à la décision – élus, entreprises et… associations – porté par… une association. Emploi Loire Observatoire (Elo) a en effet pris le relais de feue Asso 42 en ajoutant à ses dispositifs existants : « Pass’1901 ». Parmi ses activités, la création de cet observatoire qui publie les premiers résultats d’une enquête menée de mai à septembre 2022.
Quel est le poids des associations dans le département ? Comment évolue-t-il ? Combien de salariés ? Dans quels secteurs ? Quels sont leurs besoins ? Dans quel état sont-elles après avoir encaissé le Covid ? Sans sous-estimer pour autant les impressions des dirigeants associatifs, rien ne vaut des chiffres consolidés et analysés, justement recueillis auprès d’eux et leurs équipes. C’est l’objet de l’Observatoire de la vie associative dans la Loire lancé par Emploi Loire Observatoire (Elo) l’an passé. Elle-même association loi 1901 siégeant à Saint-Etienne et créée en 1990, Elo a pour objectif « d’améliorer l’adéquation entre les besoins des structures et les ressources humaines du département ». Elle compte une dizaine de salariés et une foule de partenaires comme de financeurs : services de l’Etat, collectivités locales, chambres consulaires, organisations patronales et professionnelles mais aussi syndicales.
A son observatoire déjà très rodé de l’emploi (participant-fondateur de l’étude annuelle orchestrée par Epures : Evolutions économiques dans la Loire) s’ajoutent des activités d’accompagnement pour le recrutement et l’aide à l’intégration des salariés. Ainsi que des actions territoriales ciblées sur l’orientation de demandeurs d’emplois vers les « métiers en tension ». Et depuis 2021 aussi, « Pass’1901 » en référence à la loi 1901. Un dispositif de « conseil et d’accompagnement des acteurs du monde associatif dans leur quotidien » qui propose des rendez-vous personnalisés, des formations gratuites aux bénévoles, des solutions d’externalisation de paie pour celles disposant de salariés, des conseils sur le financement, la communication, les statuts etc. Une activité qui portait l’Asso 42 UASEL (Union des associations de Saint-Etienne et de la Loire). Cette dernière dissoute en 2020, Elo a décidé de prendre le relais. Et repris une de ses salariés aussi, Alexandra Tarel, qui y avait développé pendant 12 ans le « Point d’appui à la vie associative ».
Plus de salariés que dans la métallurgie !
Si la Loire compte 15 500 associations, « il s’agit de s’adresser avant tout à celles dépourvues d’un encadrement national via par exemple, pour celles d’ordres sportives d’une fédération, explique Alexandra Tarel. Je souhaitais depuis longtemps créer un observatoire statistique de la vie associative. Mais le recueil et le traitement des chiffres demandent des moyens et une expertise que je n’avais pas. » Ce savoir-faire, en revanche, Elo l’avait déjà. « J’ai travaillé sur cet observatoire avec David Frachisse, expert en collecte et traduction de données. » Trois bonnes raisons sont avancées pour réaliser cet observatoire : apporter une meilleure connaissance des associations aux élus et aux décideurs, identifier les besoins pour mieux y répondre, relayer leurs difficultés exprimées. Plutôt bienvenu à l’heure où la plus grande ville de la Loire est le théâtre d’âpres débats entre majorité et opposition municipales sur les coupes budgétaires touchant les associations qui y sont domiciliées.
Je souhaitais depuis longtemps créer cet observatoire. Mais le recueil et le traitement des chiffres demandent des moyens et une expertise dont Elo dispose.
Alexandra Tarel, chargée depuis 2021 sur la vie associative à Elo
Cela après l’indéniable secousse Covid dont l’impact réel doit cependant se mesurer à la lumière de données factuelles et non de ressentis ou de constats isolés par structure. Il faut prendre conscience de l’enjeu : les associations dans la Loire, ce sont non seulement 150 000 bénévoles (l’équivalent d’un habitant sur cinq) mais aussi 1 800 établissements associatifs employeurs de près de 27 000 salariés, soit, même si la proportion de temps partiels y est très forte, plus que l’UIMM, fédérant pourtant dans la Loire avec 22 500 postes de la métallurgie, la moitié des emplois industriels du département ! Qui dit enquête statistique, dit méthode. Celle menée par Elo de son élaboration au traitement des données, de mai à septembre 2022, a été adressée à environ 4 000 associations et relayée par l’Udaf, le CDOS, l’AMF 42, Loire Profession Sport et l’université Jean-Monnet avec le soutien financier du Crédit Agricole Loire/Haute-Loire.
Avoir un local prêté, premier besoin exprimé
« Sous l’égide du Réseau des Maisons des associations, nous avons suivi la méthode de Viviane Tchernonog, chercheuse au CNRS, précise Alexandra Tarel. Cela avait déjà été fait au niveau de villes, d’agglomérations mais jamais à l’échelle d’un département si on excepte l’observatoire groupé des deux départements d’Alsace. Nous avons obtenu le retour de 800 réponses dont 600 réellement exploitables. Une étude comme celle-ci réclame d’affiner les retours avec précaution pour une meilleure interprétation et restitution. » Reste qu’un premier document de résultat est là en attendant la parution en juin d’une enquête complète permettant de brosser le portrait des associations ligériennes. « Il s’agit d’aller plus loin que des vues d’esprit même si elles ne sont pas forcément fausses : on dit que Saint-Etienne est une ville très associative avec beaucoup de bénévoles. Certes, mais selon nos premiers retours, ces derniers sont vieillissants et les associations y bénéficient moins que dans d’autres villes comme Roanne d’un renouvellement de générations. » A ce stade, les résultats déjà consolidés de l’observatoire ne manquent cependant déjà pas d’intérêts.
Justement, sur les bénévoles par exemple : 61 % des associations ligériennes disent ainsi en manquer. Avec pour les deux premières raisons évoquées, le manque de temps (63 %) et, plus nuancé, un manque d’implication dans le temps (58 %). Les principales fonctions manquantes ? « De l’aide ponctuelle » pour 54 % des réponses, des « membres du conseil d’administration » pour 47 %, des « personnes pour l’animation » pour 46 %. Le nouvel observatoire d’Elo publie aussi les principaux besoins jugés « importants ou nécessaires ». 14 différents ont été proposés dont 10 d’entre eux ont été jugés importants ou nécessaires par plus de 50 % des associations. Le prêt de locaux arrive largement en tête, à 76 % devant la sécurité des financements et la simplification des procédures administratives (66 % chacun). Suivent, à 63 % chacun, l’accompagnement en communication et la rapidité du versement des aides publiques.
Un premier retour sur l’effet Covid
Et l’impact Covid dans tout ça ? 9 % des associations disent n’avoir pas subi d’arrêt durant la « période Covid », 50 % partiellement, 41 % totalement. Une association sur deux déclare avoir subi une baisse du total des comptes et de leurs résultats, 50 % encore une baisse de leurs financements privés. En revanche, plus positif, 74 % disent avoir obtenu un maintien, voire une hausse des financements publics. Cependant, 56 % d’entre elles ont vu le nombre de leurs adhérents baisser. En ce qui concerne les seules associations employeuses, « seulement » 6 % d’entre elles ont supprimé un poste en raison des circonstances imposées par la pandémie.
14 % ne l’avaient pas encore fait mais l’envisageaient, courant 2022, « dans un avenir proche ». Cependant, la « crise ouvre aussi de nouvelles perspectives de collaboration » : 25 % envisagent de nouvelles coopérations, 22 % une mutualisation de moyens et 8 % pensent à une fusion. Courant 2022 encore, 61 % des associations avaient confiance en l’avenir (dont 11 % très confiance) pour 25 % qui étaient inquiètes et 6 % de très inquiètes.
Salaires et profils de l’emploi
L’enquête d’Elo a aussi pour grand intérêt de démontrer le rôle d’acteur économique qu’endosse le monde associatif. Elles représentent 8 % des entreprises ligériennes (9 % à l’échelle régionale), 10 % des postes salariés (9 % en Aura), 7 % des rémunérations brutes (salaires et primes) versées dans le département, soit 550 M€. 87 % des postes sont « non annexes », c’est-à-dire que ces postes proposent un minimum de volume d’activité, selon la définition de l’Insee, au moins trois smic mensuels sur l’année, 30 jours de contrats pour plus de 120 heures. Ils sont à 27 % en temps partiel (contre 15 % tous secteurs confondus dans la Loire). La rémunération moyenne annuelle (pas que le salaire) pour un équivalent temps plein s’élève à 28 200 € dans les associations ligériennes contre 33 900 € tous secteurs confondus dans la Loire. Les emplois sont féminisés à 73 % contre 50 % tous secteurs confondus dans le département.
Enfin par rapport à l’ensemble des associations employeuses, on observe en termes de type d’emploi, une sur représentation flagrante de l’action sociale : 49 % des emplois pour 14 % des associations. Sans doute à mettre sur le compte du poids des emplois des aides à domicile, très souvent fournis dans un cadre associatif, type AIMV ou ADMR. Au contraire, l’emploi venant des associations culturelles et sportives est, lui, sous représenté, avec 8 % du total (5 % pour le sport ; 3 % pour la culture) par rapport à leur poids, c’est-à-dire 30 % des associations de la Loire (15 % dans la culture ; 23 % dans le sport).