Rive-de-Gier signe avec l’Etat le second Contrat de Sécurité Intégré de la Loire
Après Montbrison en 2022, la municipalité de Rive-de-Gier qui a perdu son commissariat de police nationale il y a environ 10 ans est la seconde du département à signer avec l’Etat et le Parquet un Contrat de de Sécurité Intégré (CSI). Dans un objectif d’accroître l’efficacité d’une réponse globalisée et adaptée à la délinquance actuelle, il détermine sur 5 ans les engagements de chacun en la matière, plus exactement comme une sorte de mise à jour. Car en réalité, le contrat formalise un mode de fonctionnement déjà en place. Cela sur fond de montée en puissance – une fois de plus – de l’importance de la police municipale…
La signature de ce CSI le réjouit. Reste que « nous avons toujours en vue de retrouver, enfin, un commissariat à Rive-de-Gier », lance d’emblée Vincent Bony, maire de Rive-de-Gier, un sourire aux lèvres tourné vers le préfet. Si obtenir un Contrat de de Sécurité Intégré (CSI) va dans le bon sens, à ses yeux, l’un ne doit pas occulter l’autre, a-t-il signifié ce mercredi à l’occasion de sa signature avec l’Etat, la Police nationale et le Parquet au sein de l’hôtel de ville ripagérien. Pour rappel, la création, par fusion, d’une unique circonscription de police nationale (CPN*) pour la vallée du Gier, actée en 2004 a fini par déboucher sur la fermeture du commissariat de la Police nationale ripagérien en 2015. Il n’était d’ailleurs qu’« en sursis » les dernières années afin de fournir une solution de repli bien tassée à l’ensemble des policiers nationaux du Gier. Le temps d’obtenir du gouvernement puis construire un commissariat neuf de tout autre tout ampleur à Saint-Chamond, le précédent domicilié dans la plus grande ville du Gier ayant vu son toit tomber en miettes en 2010…
S’il n’a jamais souhaité la fermeture à Rive-de-Gier – il était alors dans l’opposition -, s’il souligne que la sécurité relève d’abord de l’Etat au titre de ses fonctions régaliennes, depuis le début de son mandat en 2020, le maire Vincent Bony (PC) dit assumer l’enjeu sécurité côté municipalité en conformité avec son programme électoral. En 4 ans, le nombre de caméras de vidéoprotection a triplé passant de 19 à 63 avec des résultats présentés comme significatifs. Sept recrutements ont été effectués au sein du service portant son effectif à 20 : pas des policiers mais trois ASVP (Agents de surveillance de la voie publique) pour suivre une montée en puissance de la vidéoverbalisation, vis-à-vis notamment de ces « comportements routiers très dangereux et idiots », autrement appelés « rodéos », sujets à inflation aussi. Parmi les recrues enfin, trois médiateurs ainsi que leur coordinateur. Évoquant une dernière fois sa velléité du retour « à demeure » d’un commissariat national, le maire nuance « ce débat qui ne peut pas être tranché ici, ni par le préfet ni par le directeur interdépartemental de la police nationale. Cela se décide bien au-dessus. Et cela n’empêche pas non plus de développer des choses nouvelles.»
Une « sécurisation des inondations plus efficace qu’en 2008 »
Ces choses nouvelles consistent donc cette fois-ci en la signature mercredi dernier d’un « Contrat de de Sécurité Intégré de la Loire » sur 5 ans, le second dans la Loire après celui paraphé en 2022, de Montbrison / Savigneux / Champdieu en zone gendarmerie. Dispositif généralisé quant à sa possibilité de mise en œuvre par une circulaire d’avril 2021 et relative à la « Loi pour une sécurité globale préservant les libertés », issu d’un galop d’essai à Toulouse sous Jean Castex en septembre 2020. Objectif : « permettre de concrétiser à un niveau stratégique le partenariat et l’engagement entre l’État et les collectivités territoriales pour la sécurité de tous. L’objectif de cet outil souple et innovant déployé dans le cadre de la sécurité du quotidien est de formaliser et de renforcer les engagements partagés de l’État et des collectivités territoriales dans le domaine de la sécurité. Il s’adresse prioritairement aux grandes agglomérations ou aux bassins de délinquance les plus importants. » Avec des engagements réciproques entre Justice, collectivité signataire et Etat via sa police nationale.
Si dans une très grande ville comme Bordeaux, le CSI qui a fait l’objet de très longues négociations et débats, s’accompagne d’investissements et recrutements supplémentaires de la part de la municipalité et de la part de l’Etat (comme… un nouveau commissariat), Rive-de-Gier ne se place bien sûr pas à cette échelle. En réalité, son CIS formalise, acte une réalité déjà existante quant à la collaboration mairie / police nationale, concluent les partenaires. « Cela fait valoir un engagement, structure officiellement des pratiques déjà existantes, y compris de médiation avec des actions auprès des jeunes, par exemple ceux sanctionnés par leurs établissements scolaires que l’on envoie passer à travailler leurs heures de colles ou de suspension au sein des services municipaux. » Et, argue aussi un représentant de la police nationale présent à la signature, cette évolution, cette collaboration plus étroite conforme aux évolutions et de la délinquance et des rôles de chacun ces deux dernières décennies selon ses défenseurs a justement porté ses fruits les 17 et 18 octobre lors des inondations : « la sécurisation le soir même a été beaucoup plus efficacement déployé qu’en 2008 lors des précédentes inondations avec la venue rapide de policiers nationaux de tout le département. »
« Pas de recettes toute faites et immuablement efficaces »
On s’étonne tout de même de lire que le CSI « engage » la présence des nationaux sur le terrain… « Mais depuis 2004, il y a bien sûr toujours eu une patrouille garantie en permanence dans le secteur de Rive-de-Gier (Lorette et les coteaux en zone police inclus, Ndlr) de la CPN du Gier. Et en plus d’elle, d’autres plus ou moins nombreuses selon les événements, mais issues de l’échelon départementale, comme la Bac par exemple, viennent régulièrement ici prêter main forte. Ce CSI permet plus d’efficacité vis-à-vis de réalités de notre époque. Et il faut comprendre que celles de 2004 et celles de 2024 sont totalement incomparables », étaye lui Yves Cellier, directeur interdépartemental de la police nationale à Saint-Etienne, présent aussi mercredi. Un monde entre les deux qu’il s’agisse de la délinquance ou de la prise en charge, veut mettre en avant celui qui fut justement commissaire ici il y a 20 ans.
Dans un échange que nous avions eu avec Cédric Renaud début 2023, ex directeur de la police municipale de Saint-Etienne, en tant que membre – et ex-président – de l’ANCTS (Association Nationale des Cadres Territoriaux de la Sécurité), celui-ci allait dans le même sens, estimant que « la réponse concrète aux besoins de sécurité ne peut plus être indexée à un modèle uniforme. Un seul type d’organisation démultiplié, décliné ce n’est plus possible. Pour caricaturer, on n’organise pas la sécurité de la même façon à Marseille qu’à Saint-Victor-sur-Loire ! Il n’y a pas de mode d’emploi. Et si l’efficacité de telle police municipale, sur tel ou tel modèle, par sa proximité, est avérée, tant mieux. Il n’y a pas de recettes toute faites et immuablement efficaces. Une organisation territorialisée peut être vectrice de plus de sécurité grâce à cette proximité, cette connaissance du terrain, à condition de ne pas être considérée comme bouche trou. Cela ne plonge pas pour autant la France dans un état fédéral. Ce n’est pas forcément toujours une question d’effectifs qui ont d’ailleurs trop occupé les débats. »
Un budget devenu conséquent pour la Ville
L’évolution législative autour des répartitions de compétences des collectivités locales est souvent ressentie comme un dépouillement des capacités à agir du maire sur une commune. Probable qu’une partie d’entre eux adhère, à ce qui est présenté par certains comme une décentralisation pragmatique, donc davantage de pouvoir. Ces CSI vont en tout cas bien plus loin, en intégrant notamment le Parquet, que les « conventions » – là aussi définies comme une optimisation de coordination – déjà couramment signées avec les municipalités – comme celle que nous avions relatée par exemple à Saint-Chamond. Ils sont « appelées à se multiplier » dans la Loire, nous indique le préfet Alexandre Rochatte. « L’Etat a une compétence régalienne en la matière, expliquait-il un peu plus tôt. Mais un élu comme le maire a aussi une compétence en matière de tranquillité publique et de sécurité et, par définition, peut l’exercer avec davantage de proximité. Il s’agit de travailler du mieux possible ensemble en lien, aussi, côté prévention avec la Politique de la Ville (d’où des postes de médiateurs créés subventionnés par l’Etat). Plus qu’un commissariat où se rendre, c’est la présence de policiers sur le terrain que réclame la population. »
Il n’y a toutefois pas que le contexte autour de la sécurité et de sa prise en charge plus ou moins décentralisée que l’on peut qualifier d’incomparable. Il y a aussi l’argent que la mairie de Rive-de-Gier doit du coup y mettre sur son propre budget. Mais à population équivalente, la nécessité ne l’est pas forcément d’une ville à l’autre. Tout comme leur « richesse »… A Rive-de-Gier, là où il n’y avait que le salaire d’un agent à assumer au début des années 2000, ce sont désormais des centaines de milliers d’euros par an que la municipalité doit consacrer à cette compétence, rien que pour la masse salariale. Sans compter donc l’entretien de locaux, les équipements et autres investissements, comme ces 500 000 € sur les caméras depuis 2020, certes subventionnées par l’Etat et parfois… la Région. Si les effectifs remontent petit à petit – et ce devrait être encore le cas d’ici la fin de l’année -, la CPN du Gier a, elle, perdu selon les syndicats, une quarantaine d’agents nationaux (tous types de postes confondus mais pas seulement « administratifs ») entre 2007 et 2019, soit 22,5 % des postes. L’effet des fameuses RGPP sous Nicolas Sarkozy.
* La CPN comprend 8 communes. Rive-de-Gier correspond à la deuxième ville de la vallée du Gier, avec 20,5 % de la population de la CPN pour 22 % de la délinquance constatée sur la circonscription en 2023. « Si la délinquance générale est stable, la ville est, à l’instar des communes voisines, confrontée aux évolutions récentes des phénomènes de délinquance (trafic de stupéfiants, violences conjugales) et des problématiques de tranquillité publique (occupations illicites des espaces publics et des halls d’immeubles, délinquance routière…). Il est apparu important de renforcer la lutte contre les phénomènes de délinquance et d’incivilités pour répondre à l’exigence forte de sécurité exprimée par la population », notait la préfecture en amont de l’invitation presse.