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jeudi 28 mars 2024
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Violences conjugales : la Région distribue 1 000 boutons d’alerte aux associations

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La Région a mis à disposition 1 000 boutons d’alerte connectés, à destination des victimes de violences conjugales. Ils seront distribués par les associations d’aide aux victimes.

Monsherif
Le bouton peut se dissimuler facilement étant donné sa taille. © JT

En 2021, 113 femmes décédaient sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint. En 2022, elles sont déjà 21. Face à ce constat, la Région Auvergne Rhône-Alpes a choisi d’apporter une solution supplémentaire aux associations. Elle s’appelle MonSherif. Il s’agit d’un bouton connecté, conçu et produit dans le Rhône par la société Domie Digital. Il n’est pas plus gros qu’une pièce de deux euros et se dissimule ainsi facilement. La Région en a acheté 1 000 à 39 euros l’unité, afin de les distribuer aux associations d’aide aux victimes. Un dispositif qui vient compléter ceux déjà existants, et qui se veut être un outil permettant d’agir en amont.

Déposer plainte reste difficile

Car s’il existe le bracelet anti-rapprochement, ainsi que le téléphone grave danger, ils n’interviennent qu’en cas de procédure judiciaire. Or, il n’est pas rare qu’en début de procédure ou en amont, les femmes victimes de violences conjugales soient coincées chez elles avec leur agresseur. Par ailleurs, porter plainte reste une étape difficile à franchir et elles sont encore nombreuses à ne pouvoir la franchir. La Région souhaite ainsi proposer une solution discrète qui permette à la victime ainsi qu’à son entourage d’agir en amont, car elle est elle-même concernée. « Nous avons assisté à un drame terrible qui a concerné un agent de la Région, raconte Sandrine Chaix, vice-présidente de la Région déléguée à l’action sociale et au handicap. Son conjoint la battait. Alors qu’elle était enfin sortie de cette situation dramatique, son mari l’a retrouvée et assassinée. Ce jour-là, tous autant que nous sommes, nous nous sommes dits que ce n’était pas possible. Nous avons travaillé sur la question de l’hébergement d’urgence, la sensibilisation dans les lycées. Puis nous avons rencontré la femme qui a créé le bouton MonSherif. Ça nous a semblé être un outil complémentaire et sécurisant. » Aussi petit soit-il, il dispose pourtant de nombreuses fonctions.

Monsherif
Sandrine Chaix présentait le dispositif aux associations, en compagnie du député Dino Cinieri. © JT

Géolocalisation, appels, sms, enregistrement…

Connecté en Bluetooth à un téléphone, il suffit à la victime de rentrer cinq contacts à prévenir en cas de danger, qu’il s’agisse d’amis, de membres de la famille ou de voisins. Peu importe qu’ils soient proches géographiquement ou non. Un clic sur le bouton leur envoie un SMS d’alerte, les prévenant d’une situation à risque, avec la géolocalisation précise de la victime. Avec deux pressions, un appel préenregistré est lancé en cas de grave danger, toujours avec la localisation. Enfin, une pression continue déclenche une alarme en plus des appels, afin d’alerter les alentours ou de déstabiliser l’agresseur, et permet d’enregistrer l’environnement sonore autour de la victime comme constitution de preuve. « Les cinq contacts reçoivent également un lien pour être en connexion et s’organiser, détaille Sandrine Chaix. L’atout de ce bouton est aussi sa discrétion car les trois quarts du temps, un conjoint violent s’empare du téléphone de la victime. Une femme victime de violences, son histoire doit s’arrêter, mais pas avec un drame. » Pendant six mois, le dispositif sera testé sur le territoire, et la Région attend le retour des associations pour élargir son usage.

L’atout de ce bouton est aussi sa discrétion car les trois quarts du temps, un conjoint violent s’empare du téléphone de la victime. Une femme victime de violences, son histoire doit s’arrêter, mais pas avec un drame.

« Si seulement j’avais eu ce bouton »

Leila*, autrefois victime de violences conjugales était venue témoigner de son expérience, lors de la remise des boutons MonSherif. « Une fois, alors qu’il me frappait, j’ai réussi a envoyé un SMS à mon frère, qui est intervenu rapidement. » Entre temps, son compagnon a le temps de lui causer un traumatisme crânien et de lui casser le bassin. « Après avoir porté plainte, mon conjoint était en cavale durant quatre ans. Il a ensuite été arrêté. Il m’a écrit des lettres en détention, exprimant ses regrets, me disant qu’il s’excusait et qu’il m’aimait. Je suis donc retournée à la gendarmerie, je ne l’ai heureusement plus jamais revu. Si seulement j’avais eu ce bouton ». Malheureusement, près de dix ans plus tard, elle a été victime d’une agression à Saint-Étienne qui n’a pas de lien avec cette affaire. Un individu l’a violée et poignardée après l’avoir traînée dans une cour. L’enquête est toujours en cours, et depuis, Leila ose à peine sortir près de chez elle quand elle est seule. Là aussi, le bouton aurait pu s’avérer efficace. Disponible à l’achat pour les particuliers, il est notamment utilisé par des joggeuses, des femmes qui finissent le travail tard, etc. Il peut certes se dissimuler dans une poche, sur une bretelle de soutien-gorge, mais aussi prendre la forme d’un bijou, d’un porte-clés. Après son témoignage, Sandrine Chaix a offert son propre bouton à Leila, espérant que cela puisse la sécuriser davantage.

*Le prénom a été modifié pour des raisons de confidentialité.

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