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Barcella : « Se concentrer sur ce qu’il y a de beau »

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L’auteur-chanteur-compositeur Barcella sera sur la scène du théâtre de verdure château de la Roche, dans le Roannais, pour l’ouverture de la saison 2023 de Quartiers d’été, une série de concerts où l’on retrouve également Thomas Fersen, Gaël Faure ou Oldelaf. Rencontre avec cet artiste poète qui nous en dit davantage sur son dernier album Mariposa, sorti en mai dernier.

Barcella © J-P-Trotier

On lit que ce nouvel album affiche une certaine mélancolie mais avec le sourire. En écoutant de plus près, on se rend compte de cette vision sur la vie, sans embellie mais sans pessimisme pour autant. Le tout dans une grande sincérité.

Oui, la sincérité du propos et des mots reste au centre de ma démarche. Il est vrai qu’il a été relevé ce beau jeu de mots d’une « mélancolie souriante » pour qualifier ce disque. Je ne l’ai pas cherché mais un album est un carnet de routes. Mariposa est le carnet de routes des années 2020/2021/2022, des années qui n’étaient pas les plus simples de notre existence. De ce fait, on a des chansons nourries et traversées par une espérance réelle, d’une société en mouvement, d’un monde en souffrance et d’une quête humaine et poétique nécessaire.

Soleil, votre dernier album était sorti en 2018, votre premier roman Les Papillons est sorti entre temps. La composition des titres de Mariposa a débuté pendant le confinement ou est-ce que cela datait d’avant ?

Non, il n’y a pas de chansons qui datent d’avant le confinement. Je me souviens très bien des moments où je compose chaque chanson et non, sur cet album, je ne vois pas de titres écrits avant cette période. Tout s’est écrit entre 2020 et 2022. Elles sont fidèles à ce que je vis et à ce que je vibre. Des témoins des belles choses que j’ai pu traversées, des questions que je peux me poser mais aussi des souffrances que l’on peut connaître. Forcément, une chanson comme Les jours de pluie pose pas mal de questions, ne laisse en suspens que peu de réponses si ce n’est cette phrase « Nous formerons ces fleurs futures qui poussent aux cicatrices des murs » qui est un positionnement poétique. Mais cela reste la chanson la plus écorchée de ce disque. Dans les autres titres, on retrouve les choses qui traversent notre existence comme la solitude sur Donne, l’enfance, le temps qui passe, l’humanité que l’on cherche en soi et chez les autres… C’est un carnet de routes peut-être un peu moins sautillant que les précédents. Et pour autant, je dirais plus intime qui se traduit même dans ma manière de chanter car j’ai retravaillé ma voix en étant plus proche du micro et en cherchant une voix plus basse. Depuis qu’il est sorti, plusieurs médias ont qualifié d’album de la maturité. J’avoue ne jamais avoir trop aimé cette phrase mais je suis heureux qu’on en parle comme cela car c’est un cinquième album qui est un nouveau printemps. On parle souvent de la vie par cycles de quatre, comme avec les saisons, et il est vrai qu’au bout de quatre albums, je vois vraiment ce cinquième album comme le premier d’une nouvelle série de quatre. Il s’appelle Mariposa, qui veut dire papillon, avec des chansons qui rient, des chansons qui piquent et des chansons qui pleurent. Le mot a une justesse et une justice et il est important de mettre des mots sur nos émotions. Une chanson peut devenir une amie de choix sur un chemin d’introspection et parfois de guérison.

Le mot a une justesse et une justice et il est important de mettre des mots sur nos émotions.

Quand on revient sur la chanson Les Jours de pluie, en interview sur franceinfo, vous aviez évoqué le fait que c’était une ode à la volonté d’être heureux. Il y a donc ce côté espoir et que si nous voulons être heureux, au final, c’est aussi une question de posture ?

Je ne sais pas si on peut être heureux en le voulant. Je ne peux pas parler du bonheur comme ça, car c’est un oiseau sauvage, ce n’est pas un état dans lequel on se trouve un jour et qui ne nous quitte plus. En tout cas, je ne le conçois pas comme ça. Je pense que l’on a des moments de bonheur et le soir-même on repasse sur un autre chapitre. Cela dit, on peut choisir de voir le monde avec un regard poétique et de poser son regard sur les fleurs qui poussent. Abd Al Malik avait dit qu’un arbre qui s’écroule fait beaucoup plus de bruit que la forêt qui pousse. C’est un proverbe que j’aime beaucoup. C’est l’invitation à se concentrer sur ce qu’il y a de beau. Bien sûr, ce n’est pas toujours possible et facile. Il y a des drames, comme la guerre, et ca devient très compliqué de regarder différemment les choses même s’il est essentiel de chercher le soleil derrière les nuages malgré tout. Quelque soit le sujet sur lequel tu poses ton regard, tu as deux manières de le voir. Pour revenir sur Mariposa, c’est finalement un regard très tendre sur la vie et ce qui nous entoure. On empêchera pas les larmes de couler et la marche du monde avec des chansons, mais on peut choisir de rester dans sa lumière et son humanité et ne pas devenir quelqu’un qui se renferme sur lui. Mon chemin se fait avec les chansons et ce qui me touche le plus c’est quand les cœurs et chœurs du public nous rejoignent en concert. Quand ton public te touche, tu vies un instant d’éternité, de grâce.

Vous passez une partie de l’année en Ardèche, dans un petit village, où vous avez d’ailleurs écrit votre premier roman et donc composé plusieurs chansons de ce dernier album. Pourquoi avoir fait ce choix d’avoir un pied à terre là-bas, avez vous des origines ardéchoises ?

Non, je suis tombé en amour de ce territoire il y a déjà longtemps et ma nature est proche d’un enfant des rivières. Je suis un peu Vénitien, j’ai les yeux très clairs, il me faut de l’ombre, j’aime l’eau douce, la rivière car c’est très inspirant… J’aime tout ici car ici, une journée de beau temps est une véritable journée de beau temps, quand il y a un orage, c’est un vrai orage cataclysmique, quand ca souffle, c’est pour de vrai. C’est absolument authentique et j’adore ça. J’ai l’impression de revivre la vie de mes arrières grands parents. Le temps passe plus lentement et donc on a le temps de l’inspiration. Mais je n’enlève rien à la ville de Reims qui m’a vu naître et qui est un lieu important pour moi.

Quand ton public te touche, tu vies un instant d’éternité, de grâce.

Vous avez d’ailleurs été à l’origine d’un festival, Charabia, qui se déroule chaque année à Reims. Est-ce que ca a changé votre manière d’être un artiste de passer de l’autre côté, celui de l’organisation ?

Je ne gère pas ce festival mais j’ai fédéré toutes les personnes qui participent à la création de ce festival. Je suis garant de la ligne poétique de cet événement mais je n’en suis pas le directeur ou le gestionnaire. Chacun son boulot. Effectivement, j’ai fait naître ce festival avec les copains d’Ulysse Maison d’artistes dans la ville de Reims, dans ma région Grand Est et j’en assure la pérennité poétique. Ensuite, sur ce que ca a changé dans ma vie d’artiste, ça me permet de faire vivre ma passion par la chanson des autres, j’en profite pour prendre aussi l’espace d’un instant la position du spectateur ému parce qu’on est dans des métiers où quand on est sur scène ou dans un tournée, en composition, on en oublie que d’autres font de très belles choses. C’est important pour moi de prendre ce temps-là. Je me délecte pendant cette semaine de festival et je prends beaucoup de plaisir à écouter les têtes d’affiche mais aussi et surtout les découvertes. Enfin, comme ma mère était prof de lettres et qu’elle m’a transmis cette amour de la langue française, je suis convaincu que d’avoir créé un festival autour de cette dernière est important dans un contexte où la langue et la culture anglaise prennent beaucoup de place. Le français possède une poésie folle, nous avons tellement d’adjectifs permettant de qualifier nos émotions… Je ne me considère pas comme un chanteur avec une grande voix mais j’aime raconter des histoires et j’aime aussi en écouter.

Barcella © J-P-Trotier

Concernant le concert de Saint-Priest-la-Roche, ce n’est pas la première fois que vous vous produisez au château de la Roche ?

Non, ce sera la seconde fois. C’est un lieu magnifique et on aime beaucoup l’équipe. En plus, j’aurais plusieurs enfants qui vont venir me rejoindre sur quelques morceaux. C’est très émouvant d’avoir cette jeunesse qui s’approprie ses textes et vient les enrichir de voix solaires avec envie et fraîcheur. Cela me touche beaucoup et c’est une sacrée fierté.

Sur scène, vous évoluez avec beaucoup d’énergie et avec une installation un peu particulière où vous vous balader un peu où vous voulez, notamment au-dessus de vos musiciens. Est-ce que c’est toujours le cas avec cette tournée ?

Oui, nous avons même agrandi les possibilités de perchoirs. Nous avons une scénographie encore plus ambitieuse où je vais toujours sur le piano, au milieu des gens mais je vais aussi avec le batteur et le bassiste car j’ai une passerelle qui me relie à eux. Il y a quelque chose d’un peu circassien dans notre organisation. Je suis beaucoup dans le mouvement, je ne chante pas uniquement de manière statique. La culture du cirque m’a éduqué. A Chalon, nous avons le CNAC, le Centre national des arts du cirque, qui travaille un rapport à l’espace assez exceptionnel et qui m’inspire forcément. J’ai eu très vite l’envie de créer des possibilités de mouvement sur scène avec l’aide des techniciens lumières par exemple. Nicolas, derrière les lumières, ne s’ennuie pas. C’est du Spectacle Vivant et c’est très important pour nous que ça le reste!

Barcella, samedi 1er juillet à 19h30 au château de la Roche à Saint-Priest-la-Roche
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