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lundi 20 mai 2024
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Marina Ferrari : « Pour un numérique plus souverain, plus durable et plus responsable »

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La députée MoDem Marina Ferrari a été appelée au gouvernement en février dernier pour occuper les fonctions de secrétaire d’État chargée du Numérique. Elle détaille ses premières actions en la matière, et précise sa feuille de route.

Propos recueillis par Victor Guilbert.

©Gezelin-Gree

En croissance d’activité continue, quels sont les chantiers que doit engager le secteur d’activité français du numérique ?

Comme tous les autres secteurs, le numérique français doit s’adapter, en permanence, aux mutations de son environnement, et elles sont encore plus rapides et encore plus importantes dans la tech. Aujourd’hui, nous devons bâtir un numérique plus souverain, plus durable et plus responsable. Plus souverain en investissant davantage dans les infrastructures numériques critiques et je pense en particulier au stockage des données : nous devons renforcer la position des acteurs français sur le marché du cloud – et c’est d’ailleurs l’objet de l’appel à projets que j’ai présenté aux Rencontres numériques de Strasbourg pour bâtir un cloud de confiance –, y compris dans le domaine de l’intelligence artificielle.

Plus durable, en encourageant le développement d’un numérique écoresponsable : cela passe notamment par davantage de sobriété pour nos centres de données et réseaux de communication. La piscine olympique de Paris 2024 inaugurée le 4 avril par le président de la République sera chauffée grâce à l’énergie d’un data center : ce ne doit plus être une exception, mais la règle ! Plus responsable enfin, en poursuivant le travail de régulation engagé, notamment à l’échelle européenne pour que ce qui est illégal hors ligne soit aussi illégal en ligne : c’est tout le sens du DSA et du DMA qui ont vu le jour sous l’impulsion de la présidence française de l’Union européenne et grâce à l’action d’Emmanuel Macron.

Après une première décennie d’existence portée principalement par les entreprises du numérique, comment comptez-vous poursuivre l’accompagnement de la mission French Tech ?

Ma priorité, c’est évidemment de soutenir la croissance de nos entreprises dans les secteurs numérique et technologique, tout en participant à maintenir le climat favorable à l’innovation que nous avons réussi à installer depuis 2017 grâce à notre action. Pour y arriver, nous devons continuer à prendre le virage des deeptech, les technologies de rupture, en particulier dans le domaine du cloud, de l’intelligence artificielle, du quantique, mais aussi plus largement de la transition climatique et énergétique. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de lancer il y a quelque temps, un appel à projets doté de près de 44 millions d’euros qui va nous permettre de faire émerger les futures pépites de ces secteurs.

Si la France est aujourd’hui une championne des deeptech, c’est parce que nous nous sommes donné les moyens de nos ambitions et parce qu’État, acteurs privés et secteur de la recherche ont uni leurs forces. On doit poursuivre sur cette voie et accélérer. Rien ne serait pire que de s’arrêter au milieu du gué ou de décrocher le mousqueton à quelques mètres du sommet ! Je suis convaincue qu’en investissant aujourd’hui dans ces secteurs stratégiques, on bâtit la croissance de demain et on garantit la souveraineté et l’indépendance de notre pays pour les décennies à venir.

Vous avez lancé le plan de la « décennie numérique » le 25 mars dernier. Que prévoit ce dispositif en faveur des collectivités locales et des entreprises, en particulier ?

Cette feuille de route, ambitieuse, doit nous permettre de continuer à innover tout en rapprochant nos concitoyens du numérique, quel que soit le territoire dont ils sont issus. Et de ce point de vue, toutes ces mesures auront un impact positif sur le développement de nos collectivités et leurs entreprises. S’agissant des dispositifs spécifiquement en faveur des collectivités locales et des entreprises, je souhaiterais en citer deux qui sont pour moi essentiels. Le premier concerne notre cybersécurité : il s’agit des parcours cyber de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI), dont ont bénéficié et vont bénéficier collectivités et entreprises avec un kit d’exercice pour être plus résilients et anticiper les risques. Sur le même modèle, l’initiative Cyber PME permet un accompagnement sur-mesure de nos ETI et PME pour déjouer les cyberattaques, bâtir des plans d’action ou tout simplement réaliser un diagnostic personnalisé de sécurité.

On ne peut pas laisser notre tissu économique sans solution face aux cybermenaces et je veux ici saluer le remarquable travail accompli par l’ANSSI qui est à l’écoute de nos entreprises à un moment où les tensions mondiales alimentent la montée de la cybercriminalité. Le second concerne l’amélioration du partage et l’utilisation des données par les collectivités : sur la base des préconisations de la mission qui avait été engagée par Stanislas Guérini, nous allons lever les freins qui existaient encore et favoriser le partage de données entre les collectivités elles-mêmes et entre les collectivités et l’État. C’est aussi un gage de simplification des démarches et des relations entre administration centrale et services locaux.

On ne peut pas laisser notre tissu économique sans solution face aux cybermenaces.

Marina Ferrari, secrétaire d’État chargée du Numérique.

Emmanuel Macron a promis le déploiement généralisé de la fibre optique à l’horizon 2025. Cet engagement sera-t-il tenable, en particulier dans les territoires de montagne ?

Emmanuel Macron a pris cet engagement devant les Français. Et il sera tenu. 100 % des Français, qui demanderont la fibre, auront la fibre. Ce n’est pas seulement une question d’égalité entre les territoires. C’est d’abord une question d’égalité entre les citoyens. J’ai d’ailleurs signé au début du mois de mars un accord avec Orange pour accélérer le déploiement de la fibre optique qui avait ralenti en 2023. Il prévoit notamment des raccordements à la demande : dès l’instant où une personne demandera à être raccordée, l’opérateur devra y donner suite dans les six mois. Dans de très rares cas, certains locaux ne sont pas raccordables, en raison de difficultés exceptionnelles qu’il est impossible de contourner techniquement. C’était d’ailleurs déjà le cas pour l’accès au téléphone via le cuivre qui ne desservait pas, par exemple, certains refuges isolés. Mais je vous confirme que la couverture de la fibre sera sensiblement la même que celle du cuivre.  

Le président de la République a commandé en janvier dernier un rapport et des recommandations pour encadrer l’exposition des enfants aux écrans. Quelle est votre position sur ce sujet ?

Je me félicite de cette démarche et de cette méthode. Pour éclairer les décisions et les éventuels futurs arbitrages gouvernementaux, nous avions besoin de réflexions qui se déroulent dans la sérénité, où tous les points de vue sont entendus, où tous les acteurs sont écoutés. Qu’il s’agisse de représentants de l’écosystème numérique, d’acteurs associatifs, de scientifiques, d’universitaires mais aussi de parents… En ce qui me concerne, et j’ai eu l’occasion de m’exprimer dès ma première prise de parole en qualité de secrétaire d’État : je souhaite qu’on privilégie une approche équilibrée, qui ne soit pas manichéenne et qui n’oppose pas le secteur du numérique – qui met aussi en œuvre des initiatives vertueuses – et les parents ou la communauté éducative.

Nous avons besoin d’avancer main dans la main, sans préjugés ni caricatures, mais en faisant un constat lucide de la situation en intégrant les dangers que les écrans peuvent représenter pour les plus jeunes. Je pense en particulier aux addictions, aux troubles de la concentration ou à la fatigue visuelle. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de le rappeler récemment lors d’un déplacement aux côtés de Brigitte Macron, qui a consacré une après-midi pour échanger avec des parents confrontés à la question des écrans : les avis et les constats étaient bien plus subtils et nuancés que ce que je peux parfois entendre ou lire dans les médias…

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