Gilles Rossary-Lenglet : « Ce sont Gaël Perdriau et Pierre Gauttieri qui ont fait la commande »
11 jours après la publication de Mediapart, et alors que le journal vient de publier des conversations sonores entre les protagonistes de l’affaire, son émission « À l’air libre » est revenue sur les faits ce soir. Avec notamment, l’interview de l’un des mis en cause, Gilles Rossary-Lenglet. Une vidéo et de nouveaux éléments auxquels Gaël Perdriau a réagi ce soir par l’intermédiaire de ses avocats.
« Pour tout vous dire, c’est une affaire qui nous a scotchés à Mediapart. Le genre d’histoire rarissime qu’on n’a pas du tout l’habitude de traiter », lance la journaliste Valentine Oberti, présentatrice de l’émission « À l’air libre » diffusée à 19 heures sur Mediapart.fr. Ce numéro a choisi de revenir sur l’affaire dite du « chantage à la sextape » qui secoue la Ville de Saint-Étienne depuis maintenant 11 jours. En plateau, Antton Rouget, auteur de l’enquête, et Mathieu Magnaudeix, journaliste de Mediapart qui s’est rendu à Saint-Étienne pour prendre la température depuis la parution de l’article. Mais surtout le journal a diffusé le témoignage de Gilles Rossary-Lenglet, directement mis en cause dans cette affaire, Antton Rouget précisant que « c’est le seul qui assume publiquement ».
Barbouzage
L’ancien conjoint de Samy Kefi-Jérôme y indique qu’à l’époque des faits, l’adjoint à l’éducation, le maire, Pierre Gauttieri, « et peut-être d’autres membres du cabinet, mais vous voyez, la garde rapprochée », se sont réunis pour réfléchir au cas Artigues. C’est alors que Samy Kefi-Jérôme leur confie que son conjoint a déjà pratiqué des barbouzages. Gilles Rossary-Lenglet explique avoir été convoqué dans l’heure par le directeur de cabinet du maire, Pierre Gauttieri. « Nous avons échangé tous les trois. Dès le premier rendez-vous, je leur ai dit que ce serait un barbouzage de mœurs parce qu’il était évident que c’était la meilleure manière. Mais ils ont ri de manière graveleuse, mais ils étaient heureux ! Vous savez, le pouvoir et le cul ce n’est pas une légende », assure-t-il au micro de Mediapart.
Un travail sur commande
Il explique ensuite avoir monté la vidéo, que son conjoint aurait montré 10 à 15 jours après les faits à Gaël Perdriau et Pierre Gauttieri. Selon ses dires, « ça a été un grand moment d’hilarité où Pierre (Gauttieri, ndlr) a demandé à certaines personnes de son cabinet de venir voir. Ils pleuraient de rire, ils se la repassaient en boucle. Ça a été un magnifique début d’année pour eux. Pierre me félicitait et quand je croisais Gaël, j’avais des sourires en coin ». Quant à savoir qui est à l’initiative du guet-apens dont il fait état, Gilles Rossary-Lenglet ajoute : « Je tiens à préciser quelque chose. Ça n’est pas nous, de notre propre chef, Samy Kéfi-Jérôme et moi qui avons décidé de piéger Gilles Artigues. Ce sont Gaël Perdriau et Pierre Gauttieri qui nous en ont fait la commande ». Sur le fait que le maire nie tout de cette affaire, il déclare que l’édile est « très bon au poker menteur ». Mais qu’en est-il des sommes qui auraient été versées à Gilles Rossary-Lenglet ?
L’affaire dans l’affaire
Le journal précise avoir contacté les autres mis en cause pour leur offrir la possibilité de témoigner durant cette émission, sans succès. De la même façon, lors de son reportage à Saint-Étienne, Mathieu Magnaudeix a tenté de joindre plusieurs élus de la majorité, sans grand succès là encore. Pascale Lacour, adjointe au commerce, lui confie même ne pas avoir « tout lu » de l’article de Mediapart… Puis, l’émission est revenue sur l’affaire dans l’affaire, celle concernant le détournement de fonds publics. Selon le journaliste, des sommes auraient transité via des subventions accordées à des associations, afin de rémunérer Gilles Rossary-Lenglet pour son barbouzage. « J’avais cité certaines assos que je connaissais, Samy aussi. On leur a passé des dossiers à remplir pour les demandes et tout a été voté en urgence, et ils ont fait valider ces subventions ». Il poursuit en expliquant qu’une autre partie des 50 000 euros touchés lui aurait été payée en nature. « Par exemple, il y avait une statue qui me plaisait… je l’avais à prix très bas ». Selon l’homme, pour que cela n’attire pas l’attention des impôts, il facturait également des prestations fictives à des associations. « J’étais payé de manière somptuaire pour faire des tartes aux pommes lituaniennes » . Rappelons que Gilles Rossary-Lenglet aurait œuvré pour l’association France-Lettonie-Loire-Auvergne, et non France-Lituanie-Loire-Auvergne…
Gaël Perdriau réagit par l’intermédiaire de ses avocats
Ce soir, à 20h41, suite à la diffusion de l’émission « A l’air libre » de 19h et à la publication de nouveaux éléments dans l’enquête de Mediapart en ce début d’après-midi, Gaël Perdriau a réagi par l’intermédiaire d’un communiqué de presse signé de ses avocats, Christophe Ingrain et Julie Pasternak. Ces derniers expliquent que l’édile stéphanois a « fait le choix de communiquer les informations dont il dispose à l’autorité judiciaire plutôt qu’à la presse ». Qu’il nie également avoir « pris part, directement ou indirectement, à un quelconque dispositif visant à piéger M. Gilles Artigues ». Les avocats écrivent également que « l’existence d’un film dans lequel apparaissaient M. Gilles Artigues et un autre autre homme faisait l’objet d’une rumeur au sein de la mairie à laquelle M. Gaël Perdriau n’aurait jamais prêté attention. » Tout en indiquant que « le 22 avril 2022, M. Gaël Perdriau ne découvre pas l’existence du film : il découvre l’usage que son interlocuteur pourrait en faire et les conséquences désastreuses qui pourraient en découler pour M. Gilles Artigues. »