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Joseph Trotta, mister cocktail

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Avec 50 ans de carrière à son actif, le Stéphanois Joseph Trotta a obtenu de nombreuses distinctions nationales et internationales dont celle de « Champion de France de cocktails ». Il vient de mettre au point une liqueur de Bergamote, avec la marque altiligérienne Vellavie, aux saveurs de l’Italie de son enfance. Retour sur le parcours de cet autodidacte passionné, longtemps en quête de légitimité.

Joseph Trotta
C’est en 1992 que Joseph Trotta décroche son titre de Champion de France, à Deauville.

Joseph Trotta le reconnaît, « j’ai eu un CAP de service et j’ai vite quitté l’école car je n’étais pas très très bon ». Soit. C’est en 1972, alors âgé de 15 ans et demi, qu’il fait ses armes comme serveur aux Colonnes, à Saint-Étienne. Immédiatement, cela devient une vocation. Cela représente une certaine image de la France et de sa gastronomie pour lui qui est arrivé d’Italie alors qu’il n’avait que six ans. Ce n’est que dans les années 80 qu’il se dirige derrière le bar. C’est l’époque où la cuisine moderne fait son entrée au restaurant, s’émancipe, et où le service au guéridon d’autrefois disparaît. En effet à ses débuts, le jeune Joseph Trotta découpait poissons et viandes devant les clients et cette modernisation confère au serveur un rôle davantage secondaire. Estimant qu’il est trop tard pour devenir cuisinier, il choisi de mettre sa créativité au service du bar. Et c’est seul qu’il apprendra son métier.

Des Colonnes à la télévision

« Je suis un autodidacte. J’ai donc fait selon mes codes, et selon ce que je pensais être le goût. Il a fallu que je puise en moi cette capacité à recréer quelque chose qui ne m’avait pas été appris. J’allais prendre des cours du soir au Monte Carlo, où il y avait de vrais barmen, et aussi au Grand Hôtel. C’était ma manière à moi de voir comment se passait ce métier, car je n’ai eu personne pour m’apprendre. Être autodidacte est quelque chose de particulier. On n’a pas de repère flagrant. » C’est à cette époque qu’il commence à prendre du plaisir à ce métier et à créer son propre univers, et ses propres mélanges.

Bien sûr, comme dans tout apprentissage, il y a beaucoup de déchets, mais aussi de plus en plus de belles saveurs qui se dégagent de ses créations. « J’ai eu mes premiers succès et ensuite, j’ai eu la chance de participer à l’émission de Christophe Dechavanne, Panique sur le 16. Ça m’a un peu propulsé alors que je n’avais encore rien gagné. À l’époque, il invitait des barmen dans ses émissions, et de fil en aiguille je me suis retrouvé à faire une ou deux émissions. Ça me confortait dans le fait que je commençais à savoir ce que je faisais. C’est très important, ça donne une légitimité, ça conforte. » Une légitimité après laquelle il courra pendant dix ans.

En 1987, sur le plateau de l’émission Panique sur le 16, avec Christophe Dechavanne et Julien Clerc.

Bête de concours

Joseph Trotta, en passionné, fait les choses à fond. C’est donc tout naturellement que, lorsqu’il se lance dans les concours, les premières victoires arrivent, mais n’étanchent pas sa soif de reconnaissance. Comme il est autodidacte il n’a pas l’impression d’appartenir à une famille, d’en avoir tous les codes, tout en reconnaissant que c’est ce qui rend ses créations moins académiques. Il se met en tête de décrocher le titre de Champion de France de cocktails qui, à l’époque, a lieu tous les trois ans et demi.

« J’ai fait des pieds et des mains pour le faire. J’ai passé les sélections et je suis devenu champion de France à Deauville en 1992. Là vraiment, ma carrière était lancée. Parallèlement j’aimais la diététique et je suis devenu champion d’Europe de cocktails diététiques l’année suivante. J’ai fait dix ans de compétition à haut niveau, j’ai terminé quatrième aux championnats du monde. J’étais un peu une bête de concours car je fais toujours tout à l’excès. Un jour j’ai dit stop. Je n’avais plus rien à prouver dans ce circuit, plus besoin de pleurer pour avoir la reconnaissance. » C’est alors qu’il décide de ne plus se consacrer qu’à ses précieux mélanges, et n’en déviera plus jamais.

On dirait le Sud

« C’est une jubilation qui fait qu’à 66 ans, je suis encore amoureux de ce que je fais. Cette émotion je dois la retrouver dans ce que je crée. La bergamote pour moi, c’est le Sud de l’Italie, c’est mon Sud, même si je ne suis pas Calabrais mais des Pouilles, ce n’est pas si loin. C’est ma culture. En grandissant, on suit une logique sous-jacente qui fait qu’on revient toujours à ses racines, même si je suis arrivé petit en France. Je suis énormément inspiré par l’Italie, essentiellement par le Sud du pays. » Alors pendant plus de deux ans, il accumule tout ce qu’il peut sur la bergamote : parfums, fruits, zestes… tout est bon pour familiariser son palais et son nez avec cet agrume essentiellement utilisé en parfumerie et dont 95 % de la production est issue de Calabre.

Puis il rencontre Éric Verdy et Emmanuel Girerd, d’Eau de Grenouille et décide que c’est avec eux qu’il fera cette liqueur. « Il y avait une maturité chez eux, quelque chose qui me rappelait que le travail paye toujours, et ils me semblaient aptes à aller jusqu’au bout car je ne suis pas toujours simple. Et on l’a fait ! Et c’est une très belle liqueur. C’est ma première et je voulais qu’elle soit marquée par cette culture du Sud de l’Italie. » Après l’alcool vient l’eau puisque Joseph Trotta travaille actuellement sur un projet avec Jean-Louis Bissardon, à base de l’eau de source de Montarcher, qui verra le jour en 2023. Nul doute qu’il nous tiendra au jus.

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