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samedi 27 avril 2024
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Novaciéries : il faudra bientôt réveiller les géants d’Ella & Pitr

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Rue Pétin-Gaudet à Saint-Chamond face au cœur de Novaciéries, les deux anciens endormis peints en grand sur un mur, caractéristiques du duo artistique stéphanois, invitent à les réveiller « quand c’est fini ». Une quinzaine d’années après le lancement d’une requalification en grande partie concrétisée, il ne reste quasiment aucun bâtiment – halle ou immeuble – sans occupants ou sans projets au sein de ces 45 ha en plein Saint-Chamond pris en main par Saint-Etienne Métropole. Ce printemps, les sorts réservés aux halles 07, 39, 14 ainsi qu’au « bâtiment 59 » ont en effet été présentés. Après un article consacré en juin au plus spectaculaire de ces projets, un musée d’art urbain dans la première citée, If vous détaille les trois autres.

Et si à l’heure de la zéro artificialisation, le cas Novaciéries s’avérerait très inspirant ? C’est apparemment déjà le cas. En juin, une délégation, composée d’un représentant de la Ville de Saint-Chamond – Jean-Luc Degraix, adjoint à l’urbanisme – et de Joseph Perreton, directeur général de Cap Métropole, société publique d’aménagement de Saint-Etienne Métropole, était à Paris, au ministère de la Transition écologique et de la Cohésion sociale à l’occasion d’une journée consacrée aux expérience des écoquartiers. Novaciéries ayant été labellisé à ce titre, entre autres, pour son process de dépollution mené par Epora. Les Ligériens ont pu parler des plâtres essuyés mais aussi de la conduite d’une reconversion très regardée. Et pour cause : il s’agit d’un rare regroupement à cette échelle effectif et en pleine ville d’activités industrielles, artisanales, commerciales, de parc et loisirs et même de logements, réalisé à partir de friches.  

Les travaux de la Halle 07 qui doivent l’amener à devenir un musée d’art urbain ont commencé. ©If Media/Xavier Alix

Ces 45 ha qui séparent le centre-ville et ses quartiers sud ne l’ont cependant jamais été en totalité. Ici, la traumatisante chute finale de Giat, héritier amoindri de Creusot Loire et des Acieries de la Marine, coup dur le plus spectaculaire parmi tant d’autres successifs portés à l’industrie et l’emploi couramiauds au début des années 2000, l’a sans doute occulté. Pourtant, au moment d’entamer la vaste requalification du vaste site à la fin de la même décennie, des entreprises y respirent encore. Et si Siemens a fui en 2010 avec pertes et fracas, si Carchi n’a pas tenu le coup quelques années après, la plupart y respire encore. « C’est d’ailleurs, une explication parmi d’autres de la longueur de la requalification globale. Il s’agissait d’œuvrer en bon intelligence avec l’activité existante, de ne pas la perturber car il était hors de question qu’elle s’en aille », étaye Joseph Perreton, qui a commencé au sein de Cap Métropole fin 2012, année de la création de la structure, comme responsable de projets, en particulier à Novaciéries.

Au moins plus de 1 000 emplois

Le couple de seniors d’Ella & Pitr devrait pouvoir être réveillé d’ici 3 à 4 ans. ©If Media/Xavier Alix

A l’issue du départ conséquent de Siemens, entre 300 et 400 emplois pour une dizaine d’entreprises étaient toutefois encore en lice. En 2022, on est certes loin des 8 000 ouvriers que comptait ce vaste ensemble il y a un siècle mais on recense désormais « environ 80 entreprises présentes, de toutes tailles, entre commerces, cabinets tertiaires jusqu’à l’industriel pour environ 1 400 emplois même si une partie des salariés travaillant pour les entreprises ayant un autre site proche, Industeel par exemple, ne sont pas forcément rattachés en permanence à l’un ou l’autre », nuance Joseph Perreton. Dans la balance aussi, loin du cœur de Novaciéries, la zone bien remplie accueillant des artisans et petites PME créée à l’extrémité sud ouest de la ZAC, en lieu et place de la piste d’essai de Giat. Côté industriels, NBC-Sys, pièce survivante de l’armement local propriété de Nexter, Pichon, Faure, Industeel site de Saint-Chamond ont été bien renforcés par l’arrivée de BIC et surtout de Linamar (halle 51 et 62) représentant des centaines d’emplois. Loos Thevenon a repris la halle de Carchi et y voisine Accel.

Hall in one n’est que la pointe la plus visible

Bien sûr, « côté boutiques », il faut prendre en compte le fait que le centre commercial et de loisirs « Hall in one », pointe nord de Novaciéries, la plus exposée aux regards extérieurs ou des Saint-Chamonais, est à demi-plein. Le groupe Duval qui le commercialise peine à remplir totalement ses cellules avec cet échec, notamment, d’un Intermarché ou encore la fermeture récente d’un coiffeur. Mais pour le reste – une brasserie, un magasin de jouets, le cinéma et une salle de sport –, ce n’est pas le désert non plus. Il a été annoncé il y a quelques mois qu’un Aldi allait remplacer l’Inter. On passerait ainsi à 70 % d’occupation en termes de mètres carrés disponibles sur Hall in one et quatre cellules encore sans preneurs. Ailleurs, après des dizaines de millions d’euros d’argent public investis, le vide ou l’absence de projets se font très rares. Un étage de bureaux d’un ex immeuble de Siemens qu’a quitté la CPAM et que vient de reconfigurer Cap Métropole, quelques bureaux vides dans celui attenant, lui aussi autrefois propriété à Siemens où là, le privé a la main.

Plan extrait d’un document d’une journée technique datant de novembre 2016 avant les premières livraisons. La partie sud-ouest de Novaciéries n’apparaît pas.

Au niveau des Halles, une isolée de moins de 2 000 m2, la « 95 », derrière l’entreprise Faure, n’a pas encore de destination et pourrait à terme disparaître, comme a été rasée, non loin, la halle 06. Il reste aussi une interrogation sur le devenir de 2 000 m2 de l’immense Halle 07 que les pouvoirs publics aimeraient adjoindre, pour lui donner encore plus de l’ampleur, au projet déjà acté les jouxtant sur 8 000 m2 de reconversion en Musée d’art urbain. Comme prévu, les travaux initiaux – désamiantage par exemple – ont bien débuté sur ce sujet détaillé par If en juin. D’autres travaux d’aménagement ont commencé ou vont commencer sur de vastes espaces comme la Halle 14, dans la continuité de Faure père & fils, la halle 39 cachée derrière la végétation et enfin au sein du bâtiment 59, occupé depuis plusieurs années par Loire Sud restauration qui y poursuit son activité pendant les travaux.

La Halle 14  

Autrefois aux établissements Roure, ce gros morceau de 7 000 m2 connaît sa destination. ©If Media/Xavier Alix

Pour cette « cathédrale industrielle », comme l’avait baptisée le maire de Saint-Chamond Hervé Reynaud à l’été 2021 à l’occasion d’une visite de l’ex-préfète de la Loire Catherine Seguin, Saint-Etienne Métropole ambitionne de créer une pépinière d’entreprises, doublée d’un « hôtel d’entreprises » et triplée d’un plateau technique commun et accessible aux entreprises voisines consacré à la mécanique. Le projet répondrait à des besoins réels pour la vallée du Gier et identifiés à l’échelle de la Métropole. « R&D publique » pour les TPE et PME n’ayant pas les moyens d’en avoir une à demeure, loyers et accompagnement plus ou moins modérés des jeunes pousses (la différence entre pépinière et hôtel) : l’idée est analogue à ce qui fonctionne aujourd’hui à Saint-Etienne, du côté de la Cité du design, de l’ex Manu et son plateau technique consacré au traitement de surface.

Scenario architectural de la halle, les travaux finis, dans lequel la moitié des 7 000 m2 de la halle 14 disparaît. Esquisse transmise par la Ville de Saint-Chamond.

L’étude devrait être définitivement validée cet automne mais les travaux sont déjà inscrits dans le plan pluriannuel d’investissement (PPI) de Métropole. Epora va intervenir sur des travaux de désamiantage et démolition partielle à partir de cet hiver. Il est envisagé de détruire une partie du bâtiment tout en longueur mais plutôt 25 % que 50 % comme imaginé au départ. Son futur aménageur, sans doute pas avant 2025, sera logiquement Cap Metropole pour une livraison espérée en 2027 de 6 000 m2 utiles (donc avec la création d’un étage étant donné la confortable hauteur plafond). Au total, 15 M€ d’argent public y seront spécifiquement investis par l’intercommunalité mais aussi la Région et l’Etat via Epora et son fonds friche qui a retenu le projet.

La Halle 39

Là, les travaux de déconstruction intérieur, déplombage, désamiantage et autres dépollutions menées par Epora pour plus d’1 M€ ont débuté en mai. Cachés par les barrières et la végétation, ces 1 300 m2 sont bien difficiles à observer. On le peut non depuis le site Novaciéries mais sur une hauteur qui le domine boulevard Georges-Clémenceau. La Halle 39 accueillait autrefois le centre de formation de Creusot Loire. Elle était en friche depuis plus de 20 ans, avant même la fin de Giat, mise à part une parenthèse de quelques années avec la présence d’un atelier de peinture.

Un petit musée consacré à la mémoire industrielle doit prendre place ici, à terme. ©If Media/Xavier Alix

C’est ici que la Ville de Saint-Chamond va créer au côté de Métropole sa « Cité de la mémoire industrielle » en partenariat avec les associations locales qui sera, à terme, accessible à l’extrémité du viaduc piéton partant du restaurant Nova et passant au-dessus de la rue Pétin-Gaudet. Dans cette perspective, le bâtiment sera agrandi de quelques centaines de mètres carrés. Difficile de pronostiquer une date : « Le projet scientifique reste encore à être élaboré, précisait en juin à If le maire Hervé Reynaud. Surtout que nous aimerions que ce futur musée s’inscrive dans la démarche métropolitaine d’obtenir le label « pays d’art et d’histoire » sur l’ensemble du territoire. Il est possible aussi que nous y aménagions, sinon ce sera à la Halle 14, un amphithéâtre partagé avec l’IFSI (école d’infirmières) à proximité. »

Le « Bâtiment 59 »

Ses 2 200 m2 sont actuellement occupés en grande partie par le restaurateur Loire Sud Restauration. Il y déploie trois activités : le restaurant Atelier Nova, la Cantine Nova, « héritière » de la cantine de Creusot Loire et celle de restauration collective destinée à des écoles, crèches, hôpitaux. Soit 1 400 repas produits par jour et une vingtaine de personnes employée. Mais une partie des lieux est vacante et inexploitable en l’état. Les travaux lancés ici par Cap Métropole en février (plus de 6 M€ TTC investis) consistent donc à améliorer l’esthétique (« cette façade en damier désuète »,observe le maire Hervé Reynaud), l’environnement et le confort des locaux (façades, isolation, systèmes de chauffage et ventilation), leur rationalité et donc la performance de Loire Sud Restauration.

Les activités de Loire Sud restauration se poursuivent pendant ces travaux d’aménagement. ©If Media/Xavier Alix

L’ensemble va gagner une centaine de mètres carrés puisqu’une extension de mètres carrés utiles est engagée au niveau du rez-de-jardin là où des pilotis laissent un espace vide. Car il s’agit aussi de créer ou réaménager des salles communales pour les employés municipaux, les associations, les scolaires et les habitants ayant des activités dans le parc de Novaciéries. Le projet bénéficie d’une subvention du Fonds Chaleur de l’Ademe. Des financements du PPA GOSE sont potentiellement envisagés. « Là aussi, ce sera long. On part sur 18 mois de travaux parce qu’il faut que l’activité de l’entreprise puisse se poursuivre durant ceux-ci », note Joseph Perreton.  

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