Face Loire : ses stages collectifs de 3e sont contagieux
Et risque de l’être un peu plus avec l’ajout annoncé de stages analogues en classes de seconde… Le club d’entreprises visant l’insertion par le travail qu’est Face Loire fait plus que renouveler pour la 6e année consécutive son idée : organiser et encadrer des stages collectifs de 3e en partenariat avec des administrations et entreprises. Cette réponse pertinente à la pénurie s’étend. Via l’organisation ligérienne, 12 stages contre 9 l’an passé sont organisés en 2023/24. Le dispositif a désormais pour ambition de s’adresser plus aisément aux PME.
La décision du ministre de l’Education Nationale risque, au moins dans les années qui viennent, de ne guère arranger la situation. Gabriel Attal l’a annoncé fin septembre : dès 2024, tous les élèves de 2nde générale et technologique devraient avoir à suivre 15 jours de stage d’observation fin juin, pendant les épreuves du bac, au sein d’association, administration ou entreprise. Aussi louable que l’on puisse estimer l’idée de « reconquérir », pour le mois de juin de ces élèves en les confrontant aux réalités professionnelles et, si affinités, leur permettre de valider leurs pistes d’orientation, elle se heurte à une réalité de terrain expérimentée depuis des années par les collégiens de 3e. Il est évidemment loin d’être toujours facile pour les collégiens dont un stage analogue, sur cinq jours est obligatoire depuis 2005, de trouver, même armé de bonne volonté, un stage pertinent. Voire un stage tout court. Et ce n’est pas forcément une question de réseau. Car côté entreprise, pas évident, non plus, de trouver au milieu du rythme exigé le temps, d’accueillir, suivre, encadrer ne serait-ce qu’un seul collégien. D’autant plus quand l’entreprise est petite.
Quand c’est le cas, c’est trop fréquemment pour être affecté à la photocopieuse quand elle sert encore, sinon observer passivement. Alors, ajouter au tableau la « concurrence » secondes, qui plus est sur une période de l’année en général très dense pour les entreprises… La décision a toutefois le mérite d’accroître la pertinence de l’initiative, encore assez originale à l’échelle du pays, lancée en commun par Face Loire et Face Grand Lyon il y a 6 ans. Les entités Loire et Rhône de cette association et club d’entreprises, Fondation Agir Contre l’Exclusion (Face), que l’on retrouve dans tout le pays, visant à l’insertion par le travail étaient alors parties du constat que « certains élèves de 3e rencontrent des difficultés à trouver un lieu de stage et notamment plus particulièrement lorsqu’ils sont issus des Quartiers prioritaires de la Ville. Le deuxième constat concerne les entreprises qui peuvent parfois rencontrer des difficultés à accueillir un jeune sur une semaine en organisant un accueil adapté et des activités qui répondent aux objectifs d’un stage d’observation ».
Une formule qui rassure tout le monde
Avec le soutien financier de l’Agence Nationale de la Cohésion des Territoires (ANCT), de Saint-Etienne Métropole et la Ville de Saint-Etienne, elle a mis au point et développe chaque année un peu plus son action « Mon stage collectif de 3ème ». Le stage collectif « Face Loire » est un parcours de 5 jours proposé à 10-12 élèves de 3e répondant aux exigences de l’Education Nationale. « Le programme s’articule autour de la découverte du fonctionnement de l’entreprise et de ses métiers, au travers de la mobilisation des collaborateurs impliqués. Deux animateurs de Face Loire assurent le parcours d’accompagnement sur toute la semaine », décrit le club. Il implique des interventions de collaborateurs d’entreprise : « Découverte des codes, métiers et secteur de l’entreprise par des visites, interviews et entretiens » ; des « animations de Face Loire : travail sur les compétences/qualités, les outils de la recherche d’emploi, la découverte des métiers… » En fin de semaine, un travail de rendu par groupe, sur la base d’un défi lancé par l’entreprise, est présenté devant jury le dernier jour de stage.
Face Loire et les collèges intéressés, dans une logique qui dépasse désormais les quartiers relevant de la politique de la ville (la problématique ne se limitant pas à eux) entrent directement en relations. Si un stage est validé avec une entreprise, une sélection de candidats est effectuée en essayant de prendre en compte le plus possible sa mixité. « Nous effectuons aussi ensemble une information des parents en amont, précise Coralie Fulchiron, cheffe de projets emploi/éducation au sein de Face Loire. Cela permet un stage plus efficace, plus varié et moins chronophage pour l’entreprise. Il y a aussi un effet de groupe positif qui fait tomber la timidité des stagiaires. » Bref, la formule rassure tout le monde : « La preuve, c’est que nous sommes de plus en plus sollicités par les collèges, les collectivités. Quant aux entreprises qui l’ont expérimenté, très souvent, elles en redemandent. Nous avons commencé en 2017 avec GRDF et dix stagiaires. L’an passé, c’était neuf stages pour 100 élèves. Cette année, il y en aura 12 stages pour 120 stagiaires contre 9 et 100 l’an passé.»
3 500 € par stage assumés à moitié par l’argent public
Pour la première fois, par exemple, le territoire montbrisonnais est de la partie via l’entreprise Ingenitec qui accueillera des 3e du collège Mario-Meunier à Montbrison. C’est aussi le baptême du feu pour la société stéphanoise Boa Concept, que l’on ne vous présente plus dans nos colonnes, hôte de la présentation 2023/24 du dispositif il y a une semaine. Face Loire compte d’ailleurs développer son dispositif au sein des TPE/PME, pourquoi pas par le biais d’un stage collectif inter-PME impliquant plusieurs entreprises sur la semaine. Ce dispositif anti « stages par défaut » est suivi de près par Saint-Etienne Métropole (SEM), souligne Siham Labich, sa vice-présidente en charge de la cohésion sociale, de la politique de la ville. Cela, « depuis une conversation à Montreynaud en 2018, ayant donné un premier stage collectif pour des élèves de Marc Séguin ». L’enjeu est capital, estime l’élue stéphanoise : « Le stage de 3e, c’est une première expérience en milieu pro qui peut être bonne ou catastrophique et peut ainsi jouer un rôle décisif dans le parcours personnel qui suit. Alors, oui Saint-Etienne Métropole y croit. Quand on constate 25 % à 40 % de chômage dans les quartiers prioritaires, ce n’est pas acceptables au regard des politiques de la Ville des investissements effectués. »
Cela permet un stage plus efficace, plus varié et moins chronophage pour l’entreprise. Il y a aussi un effet de groupe positif qui fait tomber la timidité des stagiaires.
Coralie Fulchiron, cheffe de projets emploi/éducation au sein de Face Loire
Selon l’élue, ce n’est pas un hasard si l’insertion professionnelle a été largement abordée aux Assises de la politique de la ville qui se sont tenues au début du mois, organisées par Sem et l’Etat. Reste que les stages de Face Loire ne sont pas gratuits pour les finances publiques. A voir si cela représentera, à terme un obstacle, à une extension massive. 3 500 € par stage collectif, à moitié pris en charge par l’argent public (ANCTS, Sem, Ville de Saint-Etienne Loire Forez Agglomération, Roanne, Annonay), à moitié par les entreprises accueillantes. Pour ces dernières, l’investissement relativement modique selon leur taille, rejoint et valide cependant des objectifs RSE, de plus en plus prégnants. Sans compter, sur le long terme, une implication et cohésion des collaborateurs accrue et une communication potentiellement positive auprès des jeunes à propos des métiers qui peuvent peiner à recruter.
Les participants 2023/24
D’ici mi-avril, dans le département ou, pour deux d’entre eux, en nord Ardèche mais par le biais de Face Loire, participent à nouveau des « habitués » et donc quelques nouveaux. Voici la liste 2023/24 :
Le Crédit Agricole (avec le collège du Portail-Rouge à Saint-Etienne), la Stas (collège Jules-Vallès à La Ricamarie), GRDF (Claude-Fauriel à Saint-Etienne), Enedis (Marc-Seguin à Saint-Etienne), Orange (Jules-Vallès à Saint-Etienne), la Ville de Saint-Etienne (collège Honoré-d’Urfé à Saint-Etienne), Tresses métalliques J.Forissier SAS, concepteur et fabricant Saint-Chamonais de connexions souples électriques de puissance de masse (avec le collège couramiaud Jean-Rostand). Mais aussi : Ingenitec, concepteur de « solutions ergonomiques et sur-mesure de manipulation de charges » (collège Mario-Meunier à Montbrison) ; Iveco bus, concepteur d’autobus et autocars de tourisme (dont la Stas est cliente) (collège Les Perrières Annonay) ; la Ville d’Annonay (collège Les Perrières). La Star, service des transports de l’agglomération roannaise, comme avec la Stas de Transdev (collège Albert Thomas de Roanne), Boa concept, concepteur et fabricant spécialisé dans (collège Pierre-et-Marie-Curie de La Talaudière).