Equipements médicaux : Med in Town amorce une levée de fonds
La « Medtech » stéphanoise s’est enrichie en 2020 de Med in Town trouvant dans l’écosystème local de la fabrication additive un parfait écrin pour son projet. Capable d’imprimer en 3D des outils intrusifs utilisés en blocs opératoires et adaptés à la physionomie de chaque patient, elle compte un nombre croissant de clients. Il s’agit maintenant de se dépouiller du statut de start-up en amorçant une levée de fonds d’au moins 500 000 €. De quoi atteindre la rentabilité en 2024 et dupliquer son modèle déjà opérationnel de mini usine mobile à implanter directement à l’hôpital.
Qu’est-ce qu’il y a dans cette boite ? Une mini usine mobile, autrement appelée par un plus vendeur « micro factory ». Une vraie usine, déjà opérationnelle. Pas une preuve de concept bien que ce prototype, ou pilote si on préfère, soit démonstratif et reproductif. C’est toute l’ambition incarnée par Med in town. Elle est clairement affichée sur le fronton de ce conteneur maritime customisé, via deux synthèses phrasées : « Ici, nous transformons les fichiers 3D en dispositifs médicaux » ; « Ici, nous les rendons utilisables en bloc opératoire ». Dans ses 33 m2 installés sur un bout de terrain libre de toute construction, situé au Technopôle à Saint-Etienne et jouxtant un site secondaire de l’Enise, partenaire parmi d’autres, Jérôme Prêcheur y fait déjà fonctionner une imprimante 3D de calibre industriel. Quelques goodies oui, pour compléter son activité mais qui ne sont rien comparés à l’impression de dispositifs médicaux aptes à rentrer dans les blocs opératoires. De quoi considérablement faciliter et accélérer la tâche des chirurgiens. Des hôpitaux même.
La start-up est innovante certes. Mais « notre innovation porte davantage sur le business model que nous souhaitons mettre en place. Cela à partir de techniques numériques et industrielles déjà existantes dont nous avons simplement fait un assemblage, disons… un peu malin », avertit le cofondateur de Med in Town, à ce jour, seul collaborateur opérationnel parmi sept associés. Mais cela ne devrait pas durer. L’entreprise a été lancée en janvier 2020 et vend déjà. « Nous sommes en mesure d’imprimer des outils pour les chirurgiens, en particulier ceux permettant la pose d’implants, par exemple un guide de coupe pour un os qui doit être réaxé. Outil qui sera parfaitement « anglé » car parfaitement adapté à la morphologie, la physionomie, la pathologie du patient. En lieu et place des outils équivalents produits en série et à l’identique, donc fatalement moins adaptés. Le recours au numérique est déjà existant. C’est donc à partir du « jumeau » numérique du squelette du patient que nous savons créer un outil personnalisé. L’opération est ainsi au moins aussi, voire plus précise et surtout beaucoup plus rapide », décrit l’entrepreneur
« Nous pouvons tout fournir clé en main »
Les clients déjà effectifs ou potentiels ? Les industriels fabriquant les implants pour les hôpitaux. Car ceux-ci mettent aussi à disposition de ces derniers avec leurs contrats, les « kits d’outillage » standards permettant de poser ces implants. Un marché dominé par un « big 5 » américain mais qui laisse des miettes suffisamment profitables à une kyrielle de PME sur le créneau des deux côtés de l’Atlantique. Ce sont ces dernières que Med in Town vise. L’entreprise stéphanoise en fournit déjà une dizaine, françaises ou américaines, comme Newclip Technics (qui, depuis le début de l’année a déjà commandé plusieurs centaines de pièces), fabricant de matériel d’ostéosynthèse en Loire Atlantique. Ou, plus près de chez nous, Oneortho dans le Rhône. Les avantages de sa solution pour les clients de Med in Town et le « client final », les hôpitaux, ne manquent pas, argue Jérôme Prêcheur :
« Nous pouvons tout fournir clé en main. Aux fournisseurs d’obtenir les certifications internationales mais nous leur donnons tous les éléments pour que cela aille vite : nous disposons de notre salle blanche, d’une capacité à stériliser selon les exigences sanitaires, à réaliser l’emballage sécurisé pour récupérer (Dasri) et, avant cela, acheminer l’instrument commandé. La stérilisation des instruments, c’est une tache coûteuse en temps et en argent en moins pour l’hôpital qui peuvent aussi éliminer le stockage de ces kits d’outillage. Pour une prothèse du genou, c’est 60 kg dont seulement… 30 % réellement utilisés puisque standard, avec leurs versions côté gauche, côté droit et un nombre minimum de trois à disposition exigé pour un service chirurgie. Enfin, il y a les prix des fournisseurs qui prennent 10 % chaque année. » Ecologiquement, certes, les kits actuels sont, eux, réemployables et non à usage unique comme avec Med in Town.
Une rentabilité visée en 2024
Mais selon l’entrepreneur qui travaille d’ailleurs à la possibilité de valider un recyclage de ses impressions – déjà techniquement possible – faites à partir de polyamides (un type de polymère, un plastique issu du pétrole), la fabrication de kits à 70 % inutilisés, exige l’utilisation d’acides très nocifs. Bref, il faut mettre dans la balance un modèle industriel actuel très polluant. Et qui brûle du carbone pour exporter partout dans le monde. Car c’est en effet là un élément essentiel du projet Med in Town : l’idée de dupliquer la petite usine mobile partout où ce sera possible, en les plaçant à l’intérieur de l’enceinte des hôpitaux pour immédiatement fournir les chirurgiens, à la demande. « Actuellement, ce n’est pas encore le cas (une implantation au CHU de Saint-Etienne, initialement dans les tuyaux a été reportée, Ndlr) et notre entreprise garantit une livraison en cinq jours maximum aux fournisseurs après commande. Mais, nous serions parfaitement en mesure de le faire en 24 h maximum si nécessaire. Nous venons de répondre à un appel à projet à Nice relatif à ce sujet. »
Incubée par Mines Saint-Etienne et le village by CA (Crédit Agricole Loire Haute-Loire), avec un investissement originel soutenu par Saint-Etienne Métropole et la BPI, Med in Town a trouvé dans l’écosystème local de la fabrication additive un parfait écrin pour son projet et travaille d’ailleurs en partenariat avec l’Enise et des entreprises locales comme Visioshape. Elle a pour ambition de multiplier l’an prochain par deux son chiffre d’affaires 2023 (180 000 €) et ainsi atteindre la rentabilité en 2024. Son développement passe maintenant par une première levée de fonds tout juste amorcée visant à obtenir plus de 500 000 €, une micro factory coûtant 700 000 €.