Après l’extension de Saint-Chamond, d’autres réseaux de chaleur sont dans les tuyaux métropolitains
Hier, Saint-Etienne Métropole et la Ville de Saint-Chamond inauguraient la seconde chaufferie bois liée à l’extension considérable du réseau de chaleur couramiaud concédé à la filiale d’EDF Dalkia, derrière la société « Scévia » pour ses activités dans le Gier. Saint-Chamond compte désormais le plus grand des neuf réseaux de chaleur relevant de l’agglomération. D’autres projets – extension ou création – sont cependant dans les tuyaux sur son territoire.
Les travaux se poursuivent du côté des quartiers d’Izieux et du Creux. Ils étaleront leurs désagréments probablement jusqu’au début de l’automne 2024, peut-être un peu avant si le scenario s’avère positif. Mais le plus dur est passé pour la circulation à Saint-Chamond. C’était à Saint-Julien ainsi qu’en plein centre-ville, en particulier durant le printemps et l’été 2022. Il faut dire que passer de 7 à 17,5 km de réseau enterré ne pouvait pas se faire sans impact. De quoi alimenter désormais au moins 90 abonnés de Scévia : bâtiments en copropriétés, sinon de bailleurs sociaux et établissements publics municipaux ou autre comme le lycée (Région), des collèges privé ou publics (Département) ou encore l’hôpital. Soit 6 900 équivalents logements d’ici 2024 affichés par la communication de Saint-Etienne Métropole contre 2 400 jusque-là, le réseau de chaleur préexistant ayant été mis en place il y a 10 ans depuis le quartier de Fonsala où avait été créée une première chaufferie.
Nous avions largement développé cette extension en juin 2022. Elle est la plus spectaculaire entreprise par Saint-Etienne Métropole depuis sa prise en main de la compétence « réseau de chaleur » en 2016, lié à son nouveau statut. L’agglomération pilote en effet actuellement 8 autres réseaux sur son territoire (46 km au total avant l’extension de Saint-Chamond), en régie directe ou confiés à un tiers en délégation de service public (DSP) : parfois d’étendues modestes, sur quelques centaines de mètres dans des villages comme La Valla-en-Gier, Saint-Christo-en-Jarez ou des communes périphériques plus peuplées comme ces 900 m créés en 2020 à Saint-Héand. Sinon en milieu beaucoup plus urbanisé comme à Unieux ou encore avec l’historique réseau de Firminy, créé à partir des années 1960 dans le cadre de son vaste réaménagement urbain. Ceux de Saint-Etienne – Châteaucreux (réseau produisant également du froid et étendu à partir de 2022) et Montreynaud – cumulent un kilométrage analogue à celui de Saint-Chamond.
9 700 t de CO2 mises hors-jeu
Mais ce dernier a l’avantage d’être entièrement continu. Le neuf s’est connecté à « l’ancien » initié il y a 10 ans par la mairie avec le Siel. Au regard de l’investissement, chiffré, au départ à 14,4 M€ pour passer à 17 M€ avec les effets du conflit en Ukraine sur l’inflation, Saint-Etienne Métropole a préféré recourir à une DSP, remportée donc ici par Dalkia jusqu’en 2041, qui le prend en charge. La filiale d’EDF a ainsi créé l’opérateur Scévia spécifique à son activité à Saint-Chamond où elle n’a besoin d’employer que deux équivalents temps plein pour superviser la gestion automatisée du réseau et des deux chaufferies. L’entreprise d’Etat a pu bénéficier d’un appui ministériel via l’Ademe et son fonds chaleur : une subvention de 8,3 M€ qui, elle, n’est hélas pour Dalkia pas soumise à l’inflation. Si l’extension du réseau couramiaud reste encore à finaliser, mardi, a eu lieu d’une certaine manière son inauguration avec une visite de la deuxième chaufferie qui l’alimente et créée rue de la Réclusière.
Une chaufferie bois-énergie qui a commencé à produire ses premiers KW en octobre 2022, 8 mois après le lancement des travaux sur ce qui était une friche des établissements Faure, aujourd’hui concentrés à Novaciéries. L’énergie fournie par les chaufferies de Dalkia – la nouvelle et celle de Fonsala – qui permet de faire circuler de l’eau chaude dans les tuyaux est annoncée à 76 % « renouvelable locale » dès 2029 (73 % en 2023). A « 76 % » car si elles sont équipées d’un système gaz complémentaire, elles utilisent essentiellement du bois pour fournir le chauffage des bâtiments et l’eau chaude sanitaire allant avec. « Le bois utilisé est issu du dépressage, c’est-à-dire des jeunes plans poussant aux pieds d’arbres plus développés dans le cadre de la sylviculture. Cette dé-densification favorise en fait la pousse des arbres conservés », expliquait en 2022 Julien Aguesse, directeur Centre Est de Dalkia. De quoi en tout cas éviter le rejet de 9 700 t de CO2, soit l’équivalent de 5 200 véhicules retirés de la circulation chaque année.
Près de 19 000 logements reliés sur Métropole
« De quoi garantir aussi l’activité de 17 emplois de nos fournisseurs de bois (dans un rayon de 45 km, Ndlr) issu de l’entretien des forêts pour plus de 15 ans », a ajouté, mardi, Julien Aguesse. La création de la nouvelle chaufferie sur un tènement, classé de nos jours inondables, n’a pas été une mince affaire : une grue de 72 t a été utilisée et il a fallu poser le bâtiment sur une soixantaine de pilotis. Pour alimenter sa chaudière d’environ 80 t (de fabrication française : Compte.R, Puy-de-Dôme) dans laquelle s’engouffreront 10 000 t de bois par an (7 000 à Fonsala), la technologie innovante du « Top loader » est utilisée pour la seconde fois dans la Loire : un système de raclage par le haut de la matière à brûler, habituellement récupérée par le bas. « Le chantier qui a largement fait appel aux entreprises locales », se réjouissait mardi le maire de Saint-Chamond et 1er vice-président Hervé Reynaud avant d’aller jeter avec d’autres élus un seau symbolique de copeaux de bois sur le stock puis un œil à l’intérieur.
L’occasion d’éclairages techniques sur cette installation ICPE ou encore de rassurer sur la maîtrise des rejets, avec deux systèmes de filtres contrôlés tous les deux mois pour récupérer distinctement le maximum de particules grossières et fines, désormais actrices de premier rôle des problématiques de pollution atmosphérique, bien avant les rejets automobiles. Arguant des bienfaits environnementaux et financiers (au stade de mi 2022, Dalkia évoquait un prix d’abonnement en moyenne un tiers inférieur au gaz avec ce système de chauffage pour une copropriété), Saint-Etienne Métropole par la voix de Sylvie Fayolle, sa vice-présidente au développement durable présente mardi, l’intention de l’agglomération de développer ses réseaux de chaleur dont les neuf actuels, soit 14 418 équivalent logements reliés avant l’agrandissement couramiaud, « se sont vus décerner le label Écoréseau de chaleur 2021 délivré par Amorce pour leur performance ».
Au moins deux nouveaux réseaux d’ici 2026
La proportion d’énergie renouvelable (biogaz, bois et cogénération) qui alimente les réseaux de chaleur métropolitains s’élève en effet à près de 80 %. Après Saint-Héand en 2020, les extensions à Saint-Chamond et Saint-Etienne, « nous avons lancé, la création en août, du 10e sur plus de 4 km de réseau à La Talaudière, précise l’élue. Il doit être opérationnel à l’automne 2024. Il y en aura un 11e, c’est certain, dans la couronne stéphanoise encore et ce sera à Saint-Jean-Bonnefonds. Il aurait dû être lancé plus tôt selon nos plans initiaux mais les offres reçues ont été assez décevantes. Cependant, ça se fera. Saint-Etienne Métropole a mis en place un schéma directeur et dans l’idéal, nous souhaiterions même parvenir à créer un 12e, voire un 13e réseau sur le territoire avant la fin du mandat. Avec oui, l’idée à long terme, comme pour l’eau, de les interconnecter petit à petit ».
Mais si ce type de chauffage alimenté essentiellement par des déchets bois devait peu à peu se substituer aux autres modes d’alimentation le gaz notamment en sud Loire comme ailleurs, le potentiel de ressource bois sera-t-il suffisant ? En 2022, Julien Daguesse de Dalkia, lui, n’en doutait pas : « Pour la filière bois, il y a une très large marge de ressources à ce niveau, pour que ce type de solutions se diffuse dans le pays. »