« Présence postale » dans la Loire : le constat de la CGT, la réponse de la direction Aura
Par « présence postale », le syndicat et la direction entendent son réseau de bureaux, secondaires ou non et leurs effectifs à demeure, pas la distribution courrier. Saint-Etienne a été marquée cet été par la fermeture d’un petit bureau à La Métare. Du grand classique illustrant une dégradation de long terme du service selon l’analyse de la CGT FAPT (activités postales et télécom) Loire qui, à la suite de l’AG de l’Union départementale du syndicat, a dressé un bilan chiffré comparatif sur 2 ans. Contactée, la direction régionale déroule ses contre-arguments et assure avoir, au contraire, renforcé et adapté qualitativement son maillage.
Sur le fond, rien de bien neuf pour la CGT qui s’en désespère. Sur la forme, le syndicat qualifie cet épisode de particulièrement « violent », « malhonnête » même, dans son procédé. En plein milieu de l’été, si l’on en croit le communiqué de la Ville de Saint-Etienne du 4 août qui dénonce, lui, dans son titre les « méthodes du groupe », c’est par « voie d’affichage sur la porte de l’établissement », que la population et la municipalité auraient appris la « fermeture définitive du bureau de Poste du quartier de La Métare dont l’ouverture, après la période estivale, était programmée le 16 août ». Une décision brusque, appliquée sans communication réelle auprès du public, affirme aussi la CGT, sans même que les employés aient été, eux aussi, informés. Pas plus, appuie encore le syndicat, que la direction, elle-même du bureau plus important de Fauriel auquel celui de La Métare était rattaché. Aux dernières nouvelles, sa fermeture serait actée pour le lundi 18 septembre.
Reste que cette décision « unilatérale et brutale ne répond pas aux engagements pris par le groupe concernant le devenir de ce service dans le quartier de la Métare », se désolait, elle, la municipalité stéphanoise début août. Le maire Gaël Perdriau, tout en réclamant en vain le report de la fermeture, expliquant que « lors de nos précédents échanges de février 2023 et comme le prévoyait le contrat de Présence postale territoriale, je me suis opposé à la fermeture de la Poste à la Métare. Suite à mon refus, vous m’aviez fait part le 24 avril dernier de la transformation du bureau en relais commerçant. Je n’ai eu à ce jour aucune information sur les évolutions du projet, la date de fermeture du bureau et encore moins le nom du commerçant qui allait assurer le relais postal ». Le maire de Saint-Etienne regrettait, enfin que le sujet n’ait pas été abordé lors de la réunion de la Commission départementale de la Présence postale territoriale du 21 juin.
Carrefour City a pris le relais à La Métare
Sollicitée à la suite de nos échanges avec la CGT FAPT (activités postales et télécom) Loire le 1er septembre, c’est aussi par communiqué que la direction Aura de La Poste a répondu à If Saint-Etienne quelques jours après. Concernant le bureau de Poste de La Métare, elle souligne que « conformément aux modalités définies dans le contrat de présence postale, il était devenu indispensable de faire évoluer notre mode de présence notamment afin d’améliorer l’accessibilité aux services. C’est pourquoi nous avons fait le choix de proposer au Carrefour City, situé à quelques mètres du bureau, d’offrir nos services essentiels et ce afin que nos clients puissent bénéficier d’une accessibilité horaire beaucoup plus importante. Cela permettra aussi le soutien d’un commerce dans le quartier dans un contexte économique difficile. Ce dispositif a été mis en place ce lundi 4 septembre. Par ailleurs, depuis 2021, d’importants investissements ont eu lieu : par exemple, près de 470 000 € mobilisés pour la modernisation du bureau de Saint-Etienne Fauriel à 1,5 km de la Métare, et qui accueille les clients qui ont des besoins d’expertises notamment bancaires ».
Si la fermeture de La Métare se distingue, selon la mairie et la CGT, par le manque de communication en amont, à la fois de l’encadrement, des salariés stéphanois et de la collectivité (le syndicat parle de non-respect des accords avec l’AMF), pour le syndicat, c’est en revanche un cas d’école quant au « détricotage continu du service public, de notre maillage. C’est facile de dire qu’il faut être réaliste, adapter la présence à l’activité, quand vous faites tout pour la réduire au préalable, note Sébastien Soulier, secrétaire de la CGT FATP Rhône-Alpes. C’est le cas ici et c’est tout le temps ainsi. Il y a quelques années, il y avait encore quatre agents affectés à La Métare puis, cela été deux avec une réduction d’horaires : alors oui, il y a moins de fréquentation… D’autre part, il s’agit d’un service public : la notion de rentabilité n’a pas à entrer en jeu. Or, la direction n’a que ça et les chiffres en tête. La solution de déléguer à un commerce ne couvre pas plus d’un quart de l’offre et des besoins d’un vrai bureau. Il y a les usagers qu’on laisse tomber et il y a aussi les agents que l’on précarise : certains bureaux dans la Loire tournent avec 50 % de personnes qui ne sont pas en CDI. »
12 % d’ouverture horaire en moins en 2 ans selon la CGT
Interpellée sur des chiffres, des statistiques permettant d’illustrer dans la Loire ce « détricotage calculé que l’on retrouve dans la Loire comme partout ailleurs », la CGT FATP Loire, nous en a fait parvenir une flopée quelques jours après. Selon le syndicat, des réorganisations, en moyenne tous les 2 ans sont systématiquement l’occasion de réduire la présence postale « en nombre d’emplois, donc en présence humaine face aux usagers. Mais également en amplitude d’ouverture des bureaux de Poste, avec même des fermetures de demi-journée, de journée, sinon la disparition de bureaux. L’ensemble des éléments dont nous vous faisons part proviennent des dossiers de réorganisations, adaptations ». Selon la CGT, les effectifs « réseau » (ceux des bureaux de Poste) étaient en 2018 dans la Loire de 581 et au « courrier » 1 336 contre, à ce jour 490 agents en bureau et au Courrier 1 110. Soit des baisses respectives en 5 ans de plus de 15 % et de près de 17 %.
« Si nous prenons la période 2021 – 2023, nous constatons sur la Loire une baisse de 15 % des effectifs agents en front et back office (au guichet pour accueillir les usagers) », ajoute la CGT. Une diminution des effectifs qui serait doublée par 12 % d’ouverture en moins des bureaux de Poste : « Pour préciser, l’ensemble des bureaux de Poste proposait il y a 24 mois près de 2 200 heures d’ouverture. Aujourd’hui nous sommes passés à 1 940 heures. Mais pour les usagers, l’important ce n’est pas seulement l’amplitude d’ouverture, mais bien la présence d’une ouverture le matin et/ou l’après-midi de leur bureau. » Là aussi, les chiffres donnés par la CGT de l’évolution entre 2021 et 2023 sont significatifs, secteur par secteur, tels que les définit La Poste (il y en a 165 en Aura). Dans l’Ondaine, par exemple, le bureau du Chambon-Feugerolles aurait perdu 2 demi-journées avec une fermeture le lundi. Dans le Forez, alors que le secteur dit de Feurs aurait perdu 45 % de ses effectifs, le bureau de Balbigny aurait perdu 3 demi-journées d’ouverture.
Décompte du nord au sud
« Le secteur de Montbrison où les bureaux de Noirétable et Saint-Just-en-Chevalet ont perdu également deux demi-journées en fermant tous les deux le lundi. Le secteur de Saint-Etienne Grand Poste, s’il garde ses amplitudes d’ouverture, n’en perd pas moins de 13 % de ses effectifs. Le nouveau secteur de Saint-Etienne Montaud où le personnel s’était mobilisé, perd 15 % de ses effectifs et 15 % de ses amplitudes d’ouverture avec 3 demi-journées d’ouverture perdues pour le bureau de Saint-Etienne le Soleil. Même chose pour Saint-Priest-en-Jarez avec une fermeture le lundi alors que Saint-Genest-Lerpt perd 5 demi-journées d’ouverture », liste encore la CGT. Nous arrêtons le décompte transmis qui, pour la CGT touche aussi bien le Gier que le Roannais, le Pilat, d’autres secteurs du Forez ou encore de Saint-Etienne. Selon le syndicat, les rares gains d’ouverture – + 5 heures à Rive-de-Gier par exemple – cachent des effectifs en baisse. Ou vice versa, comme à Saint-Genest-Malifaux.
Grâce aux nouvelles modalités d’accès proposées, nous avons amélioré l’offre de service sur la ville de Saint-Etienne.
Direction Aura de La Poste
Pas plus que la « méthode » décriée à propos de La Métare, nous avons pu recouper ces chiffres avec la direction Auvergne-Rhône-Alpes, unique désormais sur ce périmètre quand La Poste en comptait autrefois quatre distinctes. Ce que le syndicat dénonce également. Cependant, après notre sollicitation, la direction Aura nous a envoyé, par mail, d’autre arguments, comme à propos du bureau de La Métare déjà cités plus haut. « La Poste recherche le meilleur équilibre entre les exigences de qualité de service, de développement et de présence, essentiel au développement des activités du Groupe. Nous multiplions les formats de présence physique dans les territoires permettant d’améliorer l’accessibilité à nos produits et services, tout en soutenant le développement des quartiers par la présence commerçante. Ainsi, grâce aux nouvelles modalités d’accès proposées, nous avons amélioré l’offre de service sur la ville de Saint-Etienne. »
« Entre 2021 et 2023, La Poste a renforcé sa présence dans la Loire »
Celui-ci est aujourd’hui composé de 14 bureaux de poste, 3 espaces d’accueil réservés aux clients professionnel 7 « La Poste Relais » commerçants qui offrent une amplitude horaire élargie, 24 relais colis Pickup pour permettre aux habitants de récupérer leurs achats réalisés sur Internet. 63 buralistes partenaires pour l’achat de produits postaux essentiels. En outre, 6 des 14 bureaux de Poste ont une présence de médiateurs pour accompagner les clients à l’utilisation des outils numériques : Grand Poste, Badouillère, Bellevue, Tarentaize, Richelandière et Soleil. Pour ce qui est de l’échelle départementale, « entre 2021 et 2023, La Poste a renforcé sa présence sur le département de la Loire puisque ce sont 9 points de présence supplémentaires (dont 1 au CHU de Saint-Etienne) qui ont été créés. Cela représente 193 points de contact sur le département de la Loire, soit un maillage extrêmement dense, puisque 94,9 % de la population ligérienne se trouve à moins de 5 km et 20 minutes en voiture d’un point de contact. »
Dans le respect de ces obligations légales, le réseau de points de contact La Poste « doit s’adapter en permanence aux besoins des territoires et de la population. Accélérée par la crise sanitaire, la transformation numérique se concrétise par une bascule des usages. Digitalisation des parcours clients, dématérialisation des démarches administratives, progression de l’e-commerce. Combinant la puissance du numérique avec la proximité du réseau des bureaux de poste et de ses points partenaires, La Poste crée un puissant réseau omnicanal combinant physique et numérique. C’est cette complémentarité qui assure ainsi une forte accessibilité aux services postaux et une proximité importante pour les Stéphanois ». A l’antipode de la version de la CGT, la direction Aura de La Poste assure « améliorer l’accessibilité horaire et les conditions d’accueil » des bureaux.
Un investissement social mis en avant
La traduction de cette politique « est l’augmentation des horaires hebdomadaires sur certains bureaux. Par exemple, le bureau de Saint-Etienne Bellevue a vu son amplitude hebdomadaire évoluer de 5 h 30 depuis septembre 2023 (c’est ici, au final, une stabilisation selon la version de la CGT par rapport à 2021, Ndlr). » En outre, La Poste précise poursuivre son programme d’investissement immobilier modernisant les bureaux les plus fréquentés « afin d’augmenter les services et la qualité du conseil. Ainsi Saint-Etienne Grand Poste s’inscrit dans un programme national de bureaux « nouvelle génération » et sera rénové fin 2023 ». Elle met, enfin, en avant ses missions d’inclusion sociale et numérique « en accompagnant nos clients en situation de fragilité. « De nouveau en 2023 », un budget de plus de 300 000 € pour la Loire est dédié à cette mission.
« Ce sont plus particulièrement 6 bureaux de Poste sur la ville de Saint-Etienne (ceux cités plus haut, Ndlr) qui bénéficient d’opérations de détection et de formation de nos clients en situation de fragilité sur ces notions, en partenariat rémunéré avec le Pimm’s Saint-Etienne Métropole et l’association Face Loire. » Des actions sont complétées par de la médiation sociale. « Nous avons également implanté un Conseiller numérique La Poste et ouvert un site « Etape Numérique » sur le bureau de Poste de Saint-Etienne Montreynaud. Ce dernier très fortement dégradé durant les violences urbaines sera prochainement rénové ». Selon la CGT, un collectif d’habitant se serait monté à La Métare pour protester. En attendant, qu’elle et éventuellement d’autres syndicats échangent avec celui-ci, une mobilisation commune n’est pas encore actée mais reste dans les tuyaux.