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dimanche 28 avril 2024
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HEF investit 40 M€ à Saint-Etienne autour de l’hydrogène vert

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La petite cérémonie de mardi était symbolique : HEF est dans les murs depuis des mois. Cependant, la signature de l’acte de vente par la Ville de Saint-Etienne de 12 000 m2 au sein des Halles Berthiez a été l’occasion d’en savoir plus sur la création de cette usine pilote autour de l’hydrogène vert. Le leader mondial de l’ingénierie des traitements de surface va, progressivement, y investir 40 M€ et créer une centaine d’emplois.

La Cité Berthiez, à l’angle du boulevard Claude Verney-Carron et de la rue Barrouin qui accueille le nouveau site d’HEF à Saint-Etienne. ©If Média/Xavier Alix.

De l’hydrogène et une bouffée d’oxygène pour Saint-Etienne en ces temps troublés. HEF aurait pu l’accorder à Andrézieux-Bouthéon même si la perspective d’une centaine d’emplois industriels supplémentaires fera de toute façon respirer l’agglomération, dans son ensemble. Tout en la plaçant au centre d’une innovation technologique majeure… « A l’origine, nous envisagions cette nouvelle implantation à proximité de notre siège (ZI Sud à Andrézieux, Ndlr). C’est la Ville de Saint-Etienne qui nous a parlé de la Cité Berthiez, on a discuté ainsi depuis 2020. Ses halles, oui, sont à côté de nos locaux stéphanois de la Fabrique 5 000 (son site de R&D à la Manufacture-Plain Achille) mais nous ne savions pas qu’elles étaient disponibles et qu’elles correspondaient ce que l’on souhaitait », a détaillé mardi Fabrice Prost, président d’HEF.

Fabrice Prost est à la tête d’une entreprise née en 1953 à Saint-Etienne devenue leader mondial de « l’ingénierie des traitements de surface », c’est-à-dire la capacité de conférer de nouvelles propriétés aux matériaux. HEF est une ETI (entreprise de taille intermédiaire) pesant environ 300 M€ de chiffre d’affaires et employant près de 3 200 collaborateurs dans le monde dont 500 sur Saint-Etienne Métropole. L’entreprise est présente dans 21 pays pour plus de 80 sites de production. La vente de 12 682 m2 en six lots bâtis de la « copropriété Berthier », rue Barrouin, aux mains de la Ville de Saint-Etienne, avait fait l’objet d’un vote en conseil municipal le 23 janvier 2023. Révélant ainsi ce projet industriel majeur d’HEF. Si l’entreprise y a commencé ses aménagements depuis déjà plusieurs mois, via un bail précaire, mardi, elle a signé avec la municipalité l’acte de vente en soi. L’achat s’élève à 5,3 M€ HT.

Le prix des piles à hydrogène divisé par 50

De quoi donner lieu à une petite cérémonie, durant laquelle le maire Gaël Perdriau a rappelé les 4,2 M€ déjà investis par la collectivité lors du mandat précédent dans ces lieux. En très grande partie vides depuis 30 ans donc mais pas vraiment en friche. « Nous vendons un bâtiment rénové en 2019. Nous aurions pu facilement faire le choix de le vendre à des groupes, des promoteurs dont les sollicitations ne manquaient pas pour diverses activités, forcément à la découpe, souligne Gaël Perdriau. Nous avons fait le choix de maintenir des locaux industriels, pas si loin du centre-ville et dans un contexte de raréfaction de l’offre foncière et immobilière pour les entreprises. Nous avons bien fait. » Au-delà du fait que le bâtiment existe déjà, pourquoi la proposition Halles Berthiez a fait mouche dans l’esprit d’HEF ?

Fabrice Prost lors de la signature de la vente mardi avec le maire de Saint-Etienne Gaël Perdriau a évoqué un projet qui ancre « l’engagement territorial d’HEF pour Saint-Etienne ». ©If Média/Xavier Alix

« La proximité avec notre site stéphanois déjà existant certes. Et si l’accueil et l’accompagnement des élus et de leurs services pour nous offrir cette solution ont été déterminants, c’est aussi la physionomie des halles qui était intéressante pour nous, répond Fabrice Prost. Nous installons ici trois machines de 45 tonnes (une est en cours de fabrication, Ndlr). Ce lieu historique de l’industrie lourde est conçu pour. » L’achat des Halles Berthiez, pour l’instant investis physiquement à hauteur d’un tiers de la surface acquise, n’est cependant qu’un élément d’un plan beaucoup plus conséquent et progressif de 40 M€ lancé jusqu’à l’horizon 2030 vis-à-vis à de ce nouveau site. Il sera considéré comme pilote pour la suite et dupliqué en quatre autres exemplaires dans le monde. L’objectif est d’assoir et déployer internationalement la technologie du groupe autour de la fabrication de piles à hydrogène. De l’hydrogène vert, renouvelable, obtenu par électrolyse. A en croire, les dirigeants d’HEF, c’est à un enjeu d’ordre planétaire auquel l’ETI va participer depuis ce site en se penchant non sur le contenu mais le contenant.

HEF les destine à une mobilité « zéro émission »

« On estime à 560 Md€ le cumul investi par les projets sur l’hydrogène vert dans le monde jusqu’en 2030 », nous précise ainsi HEF en aparté. Avec les procédés qui doivent être mis en place dans les Halles Berthiez (deux lignes de production à ce stade), le prix de la pile à hydrogène peut ainsi être divisé par 50. « Parce que nous éliminons les métaux rares jusque-là utilisés dans ce type de piles. Comme l’or. Mais aussi le titane. Notre procédé permet de remplacer l’or par le carbone qui est déployé sur une surface d’inox, remplaçant, lui, le titane. Cela signifie réduire fortement le recours à l’exploitation minière et toutes les problématiques allant avec, y compris de dépendance. » A quels marchés seront destinées ces piles à hydrogène ? « A ceux de la mobilité. Une mobilité zéro émission. » Potentiellement, aussi bien à l’aviation, qu’au transport maritime ou l’automobile. Mais à ce stade, c’est dans ce dernier secteur, que les savoir-faire sont assez avancés pour une perspective d’application relativement rapide. Les futures piles qui sortiront du nouveau site stéphanois devraient ainsi équiper des utilitaires dans un premier temps.

Nous éliminons les métaux rares jusque-là utilisés dans ce type de piles. Comme l’or. Mais aussi le titane.

Fabrice Prost, président d’HEF

Alors que HEF dit déjà travailler son développement sur ce créneau en lien étroit avec des groupes automobiles internationaux aussi bien d’Amérique, que d’Asie ou d’Europe, l’usine nouvelle sera dimensionnée pour équiper 50 000 véhicules par an. Cela une fois l’investissement progressif des 40 M€ effectué (20 ont déjà été engagés). Un investissement sur lequel il est d’ailleurs aidé par l’Etat à hauteur de 7 M€ dans le cadre du dispositif France 2030 lié à la réindustrialisation du pays. Fabrice Prost reconnait pour cela qu’il a fallu Ville et Métropole insistent pour qu’HEF candidate. Il n’a pas de quoi le regretter : sa sélection par l’Etat probablement pas insensible à l’idée de voir un industriel français se lancer dans une technologie de rupture vis-à-vis de la décarbonation, compte pour 15 % de l’investissement total. De quoi permettre d’être « plus ambitieux » qu’initialement.

La plupart des recrutements d’HEF encore à faire

HEF a commencé à investir les lieux depuis plusieurs mois. ©Ville de Saint-Etienne

Il faut dire que c’est « comme si nous étions au lendemain de la Guerre avec des actifs de production détruits, compare Fabrice Prost. Dans notre monde actuel, ils ne sont pas détruits mais deviennent obsolescents au regard de l’impératif de décarboner. Il y a toutefois encore beaucoup, beaucoup de chemin à parcourir ». Les Stéphanois empruntent cependant déjà la piste. Côté emplois, l’impact indirect de l’investissement en a déjà généré une vingtaine chez les sous-traitants embauchés, à 75 % de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Une douzaine de personnes d’HEF travaille déjà sur place en attendant le recrutement d’un directeur et donc d’environ 90 autres personnes. Soit une cinquantaine de moins qu’annoncée par la délibération municipale de janvier 2024. Erreur de transcription ou réduction du recrutement initialement envisagé ? Notre question sur cette différence n’a pas obtenu de réponse.

Mais cela reste de toute façon une excellente nouvelle économique : il faut aussi regarder les verres « à moitié plein », a dit Gaël Perdriau mardi. Plein, celui-là le semble totalement. Y compris environnementalement. Certes, la décarbonation de la mobilité via l’hydrogène vert exige tout de même l’utilisation de batteries. Mais, nous précise HEF, des batteries beaucoup plus proches de celles actuelles des véhicules thermiques que des modèles des véhicules électriques, connus pour embarquer avec eux leurs propres écueils environnementaux, voire sociaux… Derrière, c’est toute une filière qui doit donc encore se mettre profondément en place. Elle n’en est qu’à la surface.

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