Aux arbres citoyens : le Téléthon de la forêt profitera à la Loire
Quel meilleur écrin que l’Ecopôle du Forez pour les présenter ? 11 des 39 projets bénéficiant des dons promis par l’opération « Aux arbres citoyens » sont situés en région Aura dont un dans la Loire. France Télévisions avait sélectionné France Nature Environnement (FNE) pour créer cette émission appelant à la solidarité autour de la préservation des forêts françaises diffusée le 8 novembre. Résultat : 2 M€ ont été obtenus, bien au-delà des espérances…
« Quand on s’est lancé, nous nous disions qu’atteindre 300 000 €, ce serait déjà très bien », lance Céline Labracherie, directrice de France nature environnement (FNE) Aura. Près de 7 fois plus pour la forêt, cela résonne comme un enchantement aux oreilles de l’association environnementale. « Les Français aiment leurs forêts et l’ont prouvé, s’enthousiasme Hubert Constancias, pilote du réseau forêt FNE Aura. Merci aux donateurs et à France 2. Il était temps de rendre compte de l’utilisation de cette somme. Et rendre des comptes, c’est dans notre ADN. » La « préciosité » de ces 2 M€, pourtant à répartir sur l’ensemble du pays, suffise donc déjà à faire le bonheur de FNE et de ses associations partenaires. Bien modeste exigence quand on la compare à n’importe quel plan d’investissement des collectivités locales majeures – où les lignes environnementales qu’on les estime ou non suffisantes et/ou pertinentes ne manquent d’ailleurs pas –, sinon aux investissements RSE, parfois décriés, de grandes entreprises ou encore à 30 secs de pub achetées dans l’univers télévisuel aussi bien privé que public.
Justement, il s’agit ici, de financer des « parents pauvres » : des projets pas assez, peu, voire pas du tout financés par les pouvoirs publics – Etat ou collectivités –, pour qu’ils se concrétisent. C’est en tout cas à l’initiative du service public, celui de France Télévisions que l’on doit donc non pas la somme mais l’initiative pour l’obtenir. En quête d’une ONG ou d’une association comme acteur central d’une émission interpellant les Français et leur générosité sur une cause environnementale, elle a choisi pour cette première France Nature environnement (FNE, sollicitée l’été dernier), soucieuse de développer un concept où leurs dons profitaient à des espaces forestiers près de chez eux, dans tout le pays. L’audiovisuel public a été séduit par la réactivité, sa labellisation « don en confiance », sa capacité à mobiliser rapidement son réseau (elle est organisée en fédérations régionales puis départementales au fonctionnement autonome) et un maillage cadrant avec ses objectifs.
De 14 000 € à 90 000 € accordés par projet
Diffusé en prime le 8 novembre dernier sur France 2, Aux arbres citoyens présentée par Léa Salamé et Hugo Clément, en association avec Cyril Dion, a ainsi permis de collecter ces 2 M€ de dons, non des promesses mais des versements immédiats, auprès de 75 000 particuliers dont 4 500 habitants d’Aura. « Avant même l’émission, nous avions de nombreux projets prêts ou quasiment, à candidater. Rapidement, il y en a eu cinquantaine. Puis un mois après l’émission, au regard de la somme mobilisée supérieure aux espérances, d’autres se sont ajoutés pour atteindre donc 74 candidatures à l’échelle nationale », précise Christophe Dumas, directeur de FNE Loire. Outre des membres de France Télévisions, l’Office national des forêts (ONF), le Museum d’Histoire naturelle, AgroParisTech, la Fondation de France étaient du jury.
39 projets ont été retenus entre restauration et/ou préservation d’écosystème, gestion raisonnée du milieu forestier ou repeuplement en libre évolution intégrale, le tout émaillé de dispositifs de sensibilisation, sinon spécifiquement pédagogiques ou encore participatifs. « Aucun dossier n’était mauvais mais il fallait bien faire des choix », remarque avec diplomatie Hubert Constancias. Conformément à la demande de France Télévisions, toutes les initiatives ne relèvent d’ailleurs pas du réseau décentralisé FNE. Auvergne-Rhône-Alpes est très bien lotie avec 10 projets sélectionnés dans 7 départements – Loire, Haute-Loire, Rhône (X 2), Puy-de-Dôme (x 2), Ardèche (x 2), Allier, Ain – auxquels s’ajoute un 11e, d’échelle régionale, pour des montants alloués variant de 14 000 € à 90 000 €. Hors FNE, les conservatoires d’espaces naturels d’Auvergne et de l’Allier sont de la partie ainsi que la Frapna Ardèche ou encore les associations Sylvacctes et Recrue d’essences.
Un sanctuaire à renforcer dans la Loire
Forte de déjà 300 adhérents malgré ses seulement 4 ans d’âge, cette dernière agit dans le massif du Livradois (au sein du parc naturel Livradois-Forez qui déborde sur l’ouest de la Loire) et a obtenu la plus grosse enveloppe dans la région avec donc 90 000 €. Son objectif ? Acquérir un maximum de parcelles pour calmer le jeu dévastateur d’une sylviculture intensive, faisant la part belle aux épineux douglas, aux coupes rases et à l’éradication de la biodiversité allant avec, mal chronique de nos massifs de moyenne montagne dont souffre aussi typiquement le Pilat. Cette maîtrise foncière vise ainsi à multiplier la plantation d’essences variées et une exploitation de la forêt plus douce alliée à de la pédagogie, sensibilisation et mobilisation citoyenne. Dans notre département, le seul projet candidat et retenu est celui porté par FNE Loire.
Il est situé autour de son Ecopôle à Chambéon au sud de Feurs, au sein de ce que l’association appelle « l’Ecozone du Forez » : « Linéaire de 17 km de Loire et un espace de liberté d’environ 760 ha entre les digues, fruit de 35 ans de travail de FNE Loire, qui est devenu propriétaire de 185 ha et gestionnaire de 350 ha du Domaine public fluvial ». Un sanctuaire de biodiversité animale et végétale en partie propice aux travaux scientifiques, et, c’est aussi son essence, ouvert au public et à des actions pédagogiques, l’Ecopôle du Forez revendiquant un total d’1 500 000 visiteurs depuis ses débuts. Le projet proposé par FNE Loire dans le cadre d’Aux arbres citoyens, consiste à l’aider à mettre en action le plan de gestion 2020-2026 de l’Ecozone du Forez : conserver les écosystèmes en préservant la qualité des habitats et des espèces associées, en anticipant les changements globaux à venir.
Le lycée horticole de Montravel impliqué
Malgré son importance cruciale vis-à-vis de la biodiversité et du climat, comme la ripisylve – la végétation installée sur la berge d’un cours d’eau – en général, « 90 % de la forêt alluviale a disparu en Europe en 150 ans », rappelle FNE. Essentiellement du fait de l’Homme. Alors si des espèces invasives s’en mêlent… « Érable negundo ou Robinier faux-acacia ont tendance à coloniser nos espaces, notre site (milieu naturel reconstitué à partir d’une gravière industrielle) comptant environ 200 ha de forêt alluviale, cite en exemple Renaud Doitrand, directeur de l’Ecopôle depuis 2022. Nous voulons les remplacer par de jeunes plants locaux, c’est-à-dire de peuplier noir, espèce par ailleurs touchée par une hybridation avec le peuplier d’Italie, et d’orme lisse. Cela à partir de semences prélevées sur le site et mises en culture par des élèves du lycée horticole de Montravel, à Villars. »
Ce travail, subventionné à hauteur de 60 000 € par les dons de l’émission et mené au moins jusqu’en 2027 sera accompagné d’inventaires préalables et de suivis naturalistes avec d’ailleurs, un autre partenariat, celui noué avec l’Inrae, Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement. L’Ecozone étant situé « au centre de la plaine du Forez, où confluent de nombreuses rivières avec des ripisylves très dégradées, en plus de la disparition de réseaux de haies. » « Ce projet permettra de renforcer et d’activer des corridors écologiques au cours de la Loire, entre les monts du Lyonnais et les monts du Forez », ajoute encore FNE Loire qui espère aussi en tirer une amélioration de son offre au grand public et donc la fréquentation du site mis en difficulté dans un passé récent par la suppression de fonds public, de la Région notamment.