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Fonction publique : face à « l’urgence salariale », l’intersyndicale Loire appelle à la mobilisation

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Le bloc intersyndical – CFDT, FO, CGT, FSU, Solidaires, Unsa, CFE-CGC et CNT –, le même ou presque, que pour les retraites est de retour. Cette fois-ci pour déployer localement la mobilisation nationale (appel à la grève et manifestations à Saint-Etienne et Roanne) de ce mardi 19 mars autour de ce qu’elle estime être une « urgence salariale » dans la fonction publique. Les syndicats dénoncent ce qu’ils considèrent comme un minage, étape par étape, de son attractivité, réclamant au gouvernement de changer de cap.  

Le cortège de demain ira jusqu’à l’Hôtel de Ville de Saint-Etienne mais a peu de chances d’être aussi massif comme ici en mars 2023 lors des retraites. ©If Média/JT

Huit mois. C’est le temps qu’il a fallu à la Ville de Saint-Etienne, assure ce représentant syndical CGT pour parvenir à recruter un électricien. « Il faut dire qu’en proposant aux candidats un salaire de 1 500 € nets… » A travers l’anecdote, le syndicaliste en question ne cherche pas pour autant à stigmatiser, en particulier, son employeur, se montrant même plutôt réticent à la citer. Mais à démontrer l’attractivité en berne de la Fonction publique, y compris au sein d’imposantes communes disposant de plus de moyens. Pour lui, comme ses collègues d’une intersyndicale réunissant, comme pour les retraites, CFDT, FO, CGT, FSU, Solidaires, Unsa, CFE-CGC et CNT (la CFTC n’était pas affichée dans la Loire), la problématique, transversale – « 70 000 postes, tous confondus, sont vacants en France » – ne dépend pas du seul bon vouloir local. L’angle d’attaque se veut national : les revendications s’adresseront demain davantage au gouvernement qu’à la gouvernance des collectivités locales.

Début janvier, le maire de Saint-Etienne Gaël Perdriau, qui a eu à subir plus d’une manifestation ces dernières années autour la gestion humaine, en raison de la mise en place Rifseep et de l’application des 1 607 heures particulièrement, avait d’ailleurs écrit un courrier aux agents municipaux. Il leur annonçait une série de mesures rémunératrices dont une « prime pouvoir d’achat » allant de 300 € pour les salaires les plus élevés jusqu’à 800 € pour ceux les plus modestes (c’est-à-dire tous ceux inférieurs ou égaux à 23 700 € bruts par an). Selon ce courrier, le taux maximum légal était ainsi appliqué pour un coût total d’1,163 M€. S’y ajoutaient des annonces sur une mise en place de tickets restaurants dans le courant de l’année (+ 63 € par mois), une prise en charge de l’augmentation tarifaire de la mutuelle, des mesures de « déprécarisation » ou encore l’intention de faire voter le 25 mars, en conseil, le maintien du régime indemnitaire à 100 % dans le cadre des temps partiels thérapeutiques au lieu de 50 % actuellement.

« Urgence salariale »

Toutefois, du moins quand la collectivité en donne, « ce ne sont pas des primes que nous voulons, mais de meilleurs salaires », synthétisait déjà une intersyndicale en janvier 2022 autour des salaires, privé compris. Demain, c’est « l’urgence salariale » au sein de la seule fonction publique – services d’Etat, Education nationale, intercommunalités, hôpitaux, municipalités – qui est au menu d’un appel à la grève et de deux manifestations dans la Loire.  A Saint-Etienne, à 10 h 30, au départ de la Bourse du travail pour un défilé jusqu’à l’Hôtel de Ville. A Roanne à 10 h 30 aussi depuis la sous-préfecture. Lors de la présentation de la journée, l’intersyndicale Loire, parvenue à reconstituer à ce sujet une union aussi large ou presque que celle historique des retraites, ne se faisait guère d’illusions sur la proportion de grévistes à attendre demain. Justement de guerre lasse ?

« Il n’y a rien de mieux pour mettre la pression et obtenir des satisfactions à des revendications légitimes. Mais c’est très, très compliqué pour tout le monde après les pertes de salaires vécues en 2023 avec les retraites, même si elles ont parfois été lissées jusqu’à maintenant. » Reste que les annonces à la fin de l’année écoulée « d’un gel », disent les syndicats de toute avancée salariale dans la fonction publique en 2024 par le gouvernement puis celle d’un plan de 10 Md€ d’économies au sein des ministères (et la perspective d’un second dans la foulée) a fait dégainer une hache de guerre plus accrochée à la ceinture qu’enterrée. Avec, pour parfaire le chiffon rouge, ce projet de rémunération au mérite au sein de la réforme de la fonction publique en gestation devant accoucher d’un texte cet automne. « Il n’y a rien de plus subjectif que cette notion de mérite. C’est valable pour le privé aussi, ce n’est pas une affaire de la valeur accordée au travail. Rien ne peut être objectivement mis en place à ce sujet. »

« Être méritant, c’est être corvéable à merci ? »

Le présentiel ? « Comment fait-on pour être aussi disponible en milieu de carrière avec une famille qu’un jeune qui commence ? S’agit-il de mettre de côté la vie privée ? Celle-là même déjà attaquée, en particulier à l’hôpital ? Être méritant, c’est être corvéable à merci ? Il y a une volonté, de diviser. Les femmes, plus souvent à temps partiel, de manière écrasante, en pâtiront les premières, elles qui déjà, touchent déjà moins dans la fonction publique à poste et temps de travail équivalents. » Inégalité de traitement qui imprègne la fonction publique en soi, arguent les syndicats. « Tout ce qui est primes et traitements en compléments sont au libre arbitre de la collectivité. Alors, dès lors que vous travaillez dans une petite, voire moyenne structure… Dans une petite municipalité, vous trouvez des agents techniques qui, malgré leur large palette de compétences, de savoir-faire, leur polyvalence et leur souplesse n’en voient pas la couleur, leur mairie n’ayant pas les moyens. »

Une secrétaire de mairie fera fréquemment le job, à son échelle, d’un directeur de services, par exemple sur les appels d’offre. Au nom de quoi les dévalorise-t-on autant ? 

Intersyndicale Loire

Idem pour une secrétaire de mairie, cantonnée à la catégorie C, alors « qu’elle fera fréquemment le job, à son échelle, de directeurs de service, par exemple sur les appels d’offre. Au nom de quoi, les dévalorise-t-on autant ? », s’insurgent les syndicats ligériens. Abandon de ce projet au « mérite », augmentation des grilles et du point d’indice (de 4,92 € à 6 €), embauches massives et accroissement des formations sont les principales revendications de demain alors que les dernières négociations sur les rémunérations dateraient déjà de 7 ans. Points d’indices et grilles ont été il y a peu revalorisées à plusieurs reprises, avec le Smic, ces dernières années, comme le soulignent, entre autres, Ville de Saint-Etienne, Métropole et Département au moment de présenter leurs budgets et difficultés allant avec. « Ça ne compense même pas l’inflation et tasse les grilles, rétorque l’intersyndicale. Pour ce qui est des collectivités, l’Etat leur laisse assumer financièrement ses décisions après avoir baissé leurs dotations. Il faut avoir conscience que par rapport à 2017, l’augmentation des rémunérations du point d’indice est de 5,5 % contre une inflation de 20 %. Le pouvoir d’achat de la fonction publique recule sans cesse. »

« De l’argent, il y en a. Il est juste mal réparti »

La CFDT précise ainsi que la rémunération mensuelle nette moyenne des territoriaux serait (voici ce que dit exactement l’Insee) actuellement de 2 020 € contre 2 690 privés, de 2 640 € pour des fonctionnaires d’Etat, de 2 460 € au sein de l’hôpital. « Oui l’Etat peut et doit financer. Que l’on ne nous dise pas qu’il n’y a pas d’argent. C’est faux, il y en a. Quand on voit les milliards supplémentaires investis dans la guerre, quand on voit les exonérations sociales qui coûteront encore 80 Md€ cette année, l’évasion fiscale de grandes entreprises, de gens fortunés… Oui, de l’argent, il y en a. Il est juste mal réparti. Ce sont les services publics qui sont en jeu. Les citoyens seront les premiers à faire les frais de ces décisions. » A noter qu’en amont de la mobilisation générale autour de la fonction publique, l’activité d’une intersyndicale dans l’intersyndicale relative à l’Education (UNSA, CFDT, CGT, Sud Loire, FSU, CNT).

Elle appelle les enseignants, les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) et, plus généralement, les personnels de l’Education nationale à se rassembler demain à 9 h 45 devant ses services Loire, rue des Docteurs-Charcot à Saint-Etienne. « Cette mobilisation s’inscrit dans la poursuite des mobilisations du 1er et 6 février et des actions locales (Charlieu, Saint-Etienne). » Vendredi, la section syndicale CGT Educ’Action du lycée Etienne-Mimard organisait en effet une action mais spécifique à l’établissement vis-à-vis de sa direction.

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