Conseil municipal de Saint-Etienne : « l’affaire » va encore s’imposer, une hausse fiscale aussi ?
A la suite des nouvelles mises en examen de Gaël Perdriau vendredi et de nouveaux appels à sa démission, il est à parier que l’affaire occupera, une énième fois et logiquement, le devant de la scène lundi 29 janvier pour le premier conseil municipal 2024 à Saint-Etienne. Certes, au détriment probable, d’une publicité de l’examen des affaires « propres » à la cité. Quoique les finances – le Débat d’orientation budgétaire (Dob) – seront au programme avec, selon les écologistes, de très mauvaises nouvelles à venir : une hausse des impôts à voter, disent-ils d’au moins 15 %… Interrogée, la majorité n’a pas réagi à ce stade.
Vendredi, Gaël Perdriau a été de nouveau entendu par les juges à Lyon. Comme Pierre Gauttieri qui avait, à cette occasion, début janvier donner des aveux sur son implication et celle du maire dans l’affaire de chantage à la vidéo intime, c’est en raison du « corollaire » Michel Thiollière (projet de piège du même genre abandonné) que Gaël Perdriau a été de nouveau entendu par les juges. Cela huit heures durant. A l’issue, il a récolté, comme son ex-directeur de cabinet, de nouvelles mises en examen pour « participation à une association de malfaiteurs en vue de commettre un chantage » et « détournement de fonds publics par un dépositaire de l’autorité publique ». Le maire de Saint-Etienne était déjà mis en examen pour chantage depuis avril 2023 et placé comme témoin assisté pour le second chef. Il en a donc désormais trois pesant sur lui. Il a effectivement « changé de statut sur le détournement. En revanche les juges ne l’ont pas mis en examen sur le volet Thiollière », précise à If un de ses deux avocats, maître Ingrain.
En amont de cet interrogatoire, Gaël Perdriau s’était déclaré serein et même impatient de pouvoir s’expliquer auprès des juges, ayant en main depuis les mises en examen, les éléments du dossier et de quoi, assure-t-il démontrer son innocence. Parallèlement, il estime scandaleux dans un Etat de droit le dévoilement partiel, sélectionné et ciblé, juge-t-il, par certaines parties dans la presse d’éléments de cette même instruction censés être confidentiels. Ce qui l’a amené à lui-même déposer plainte à ce sujet. Reste qu’à l’issue du passage devant les juges, Gaël Perdriau « conteste toujours l’intégralité des faits » qui lui sont reprochés en lien avec l’existence d’une « sextape » destinée à nuire à Gilles Artigues, ont répété ses avocats dans un échange avec l’AFP. Son contrôle judiciaire n’a pas été modifié vendredi, ont aussi précisé Christophe Ingrain et Jean-Félix Luciani. Ils ont fait part de leur intention de faire « dans les tout prochains jours des demandes de confrontation qui démontreront la véracité des déclarations de notre client ».
« Soi-disant “ torchon” »
Dans une réaction officielle vendredi soir, contredisant les propos de la défense du maire de Saint-Etienne, le groupe d’opposition Saint-Etienne Demain martèle qu’« il existe au contraire désormais « des indices graves et concordants » quant à la responsabilité directe de M. Perdriau dans l’organisation et la mise en place complète d’un système mafieux généralisé. (…) Plus que jamais, la démission de Gaël Perdriau s’impose comme une évidence : nous appelons solennellement la majorité municipale à un sursaut de dignité. Nous le redisons : nous ne voulons pas renverser la table ni provoquer d’élection anticipée. Nous ne remettons pas en cause ni la légitimité de la majorité municipale, ni celle du projet politique soutenu dans les urnes en 2020, même si nous le combattons. Nous voulons préserver l’image de la Ville et l’honneur des Stéphanois. »
De leur côté, les écologistes estiment que « s’il reste présumé innocent, le parquet se base sur des “indices graves et concordants ”. Il ne s’agit pas de simples allégations d’un soi-disant “ torchon”, comme a pu l’affirmer son adjointe au commerce, il y a quelques jours (allusion d’une réaction spontanée de Pascale Lacour lors de l’irruption surprise, au moins pour elle, de reporters vidéos de Mediapart lors de la cérémonie des vœux adressés au personnel municipal, Ndlr). En s’entêtant à rester en place, Gaël Perdriau et son équipe mettent la ville en situation de grave danger. » Les élus communistes, eux, ont aussi transmis un communiqué réitérant leur demande de démission, comme « depuis le début de cette sordide affaire » : « C’est maintenant aux élu·es de la majorité qui cautionnent ce maire indigne de faire prendre leur responsabilité. Jusqu’où iront-ils par loyauté, peur ou intérêt ? », s’interroge le PC invitant les Stéphanois à participer à un rassemblement prévu (celui désormais accoutumé du Comité Défaite ?) le lundi 29 janvier à 17 h devant l’hôtel de ville
Rendez-vous le 29 janvier
L’ex maire et sénateur stéphanois PS Maurice Vincent s’en mêle également, envoyant, lui, une lettre ouverte aux conseillers municipaux de la Majorité municipale, leur déclarant : « (…) il vous appartient une nouvelle fois de choisir entre la fidélité aveugle et irresponsable à celui auquel vous devez en partie votre mandat et l’intérêt général de la Ville. La présomption d’innocence, garantie essentielle de l’État de droit pour tous les citoyens mis en accusation, ne saurait servir à perpétuer la punition collective injuste infligée depuis plus d’un an à notre ville. Sortir de cette situation inacceptable relève de votre responsabilité personnelle. En demandant solennellement au maire de démissionner sans délai et en élisant un successeur, vous pouvez servir l’intérêt général sans nuire à sa défense. »
Autre lettre ouverte, celle de Lionel Boucher aussi, mais s’adressant elle, au maire de Saint-Etienne. L’ex adjoint UDI évincé de la majorité en juin réclame à nouveau la démission de Gaël Perdriau (et aux élus de la majorité de « prendre leurs responsabilités ») afin que « la sérénité revienne au sein du conseil municipal comme dans la population. Les difficultés qu’affronte aujourd’hui la Ville de Saint-Etienne ne peuvent supporter un affaiblissement de la parole publique et un discrédit de son premier édile ». Lundi 29 janvier, c’est une fois de plus, un conseil municipal ultra tendu qui s’annonce avec une omniprésence de l’affaire dans les échanges. A propos des « difficultés » qu’affronte aujourd’hui Saint-Etienne pour reprendre les propos de Lionel Boucher, on songe immédiatement à Casino.
« La Ville s’effondre »
L’état catastrophique des finances va nécessiter d’augmenter les impôts d’au moins 15 % en 2024.
Groupe d’opposition municipal Le Temps de l’écologie
Mais les écologistes, dans leur communiqué sur les derniers rebondissements de l’affaire mettent dans la balance un autre élément démoralisant pour Saint-Etienne : le fait que pendant ce temps, « la Ville s’effondre comme le montre l’état catastrophique des finances qui va nécessiter d’augmenter les impôts d’au moins 15 % en 2024 ». Renseignements pris auprès d’eux, les écologistes qui invitaient la majorité l’an passé (« et même avant, à condition d’utiliser cet argent à bon escient », assument-ils) face à l’explosion des coûts énergétiques et la contraction probable des recettes, à faire le choix augmenter les impôts à Saint-Etienne plutôt que « réduire les services publics et baisser des subventions aux associations », confirment l’information.
Une augmentation très notable (et quel que soit sa proportion inédite au niveau municipal depuis une décennie) de la fiscalité aurait bien été mise sur la table, dans les documents, au sein de la dernière commission finances de la municipalité la semaine passée. Les Verts sont en attente de précisions en vue de la séance publique du 29 janvier. Contacté aussi sur ce sujet précis ce matin, l’exécutif stéphanois n’avait pas réagi à l’heure où nous publions ces lignes.