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samedi 27 avril 2024
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Saint-Etienne : ce qui présidera au destin de l’IGH Emile-Loubet

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La rentrée est décidément propice aux visites de chantiers majeurs à Saint-Etienne : deux jours avant le Jardin d’Eden, la municipalité a détaillé la reconversion de l’imposant immeuble dit « de la Sécu » ou « immeuble grande auteur » (IGH) avenue Emile-Loubet déjà esquissée en juin 2022. Sur la forme : une évolution esthétique majeure, y compris pour l’espace public, sur le seuil du quartier Beaubrun-Tarentaize. Sur le fond, doivent successivement y prendre place d’ici 2026 le futur siège d’Habitat et Métropole, des logements étudiants, le CSU de la police municipale et un « pôle patrimonial ». Un chantier colossal à plus de 56 M€.

Projection architecturale depuis l’ouest de la place Boivin. ©Tectoniques Architectes et Dominique Vigier

Il n’en reste plus que les os. Mais l’ossature doit être ferme puisque l’ensemble, depuis sa construction entreprise il y a 52 ans, tient littéralement la pente nord de la Colline des Pères. C’est ce qu’assure la municipalité et c’est une des raisons pour lesquelles elle dit avoir opté pour une modification profonde des lieux en vue de leur reconversion. Cela plutôt que de tout raser pour rebâtir, sinon ne pas rebâtir et laisser place à une « aération » comme doit l’être le futur Jardin d’Eden d’ici le printemps 2024. Ce n’est cependant pas le seul motif évoqué il y a une semaine par le maire Gaël Perdriau lors d’une visite de chantier médiatisée, les travaux confiés à l’Epase, lancés fin 2019 pour le désamiantage (Epora est intervenue initialement) étant à peu près mi-chemin. La phase curage / nettoyage est achevée. Celle ré aménagement va commencer. Cet immeuble dont la tour monte à 45 m, ce qui le « labellisait jusqu’ici » IGH (Immeuble de grande hauteur), appartient « quoi qu’on en pense, au paysage stéphanois », remarquait le maire.

Vue actuelle à l’angle d’Emile-Loubet et la rue du Mont d’Or. ©If Média / Xavier Alix

Son immense volume a cependant été vidé de sa substance en 2018 après la décision annoncée quelques années avant par des services de l’Etat de le quitter : CPAM et Caf Loire – d’où l’appellation commune « immeuble de la Sécu » – mais aussi Urssaf. Une friche gigantesque à deux pas du centre-ville et une sacrée épine dans le pied de la mairie… Le statut IGH et les complexités normatives, donc les charges, allant avec, la vétusté, en particulier énergétique des lieux ou encore l’amiante contenu dans les murs, le bloc énorme que l’immeuble représente en plein centre-ville, peu en phase avec l’habitat développé de nos jours : pas de quoi lever un enthousiasme fou au sein des investisseurs privés… L’idée, par exemple, de créer un restaurant panoramique pour profiter de la vue ayant été, très probablement avec raison, vite écartée. C’est donc la force publique, seule, qui s’est chargée du « bébé » resté dans son bain via la Ville et l’Etat, Habitat et Métropole, Epase et Epora. Au total, 56,2 M€ TTC d’argent public vont y être investis dont 28,5 pris en charge par la mairie et 18,4 M€ par Habitat & Métropole.  

Pôle patrimonial et pôle sécurité

Mais « il aurait été de toute façon plus cher financièrement et environnementalement de démolir et reconstruire », assure G. Perdriau. En outre, dans un contexte de raréfaction du foncier, la perspective de la zéro artificialisation nette, des besoins de locaux ont été identifiés. Il y a ceux patrimoniaux : outre offrir plus d’aisance et une meilleure interface vis-à-vis du public au non loin Mémorial de la Résistance et de la Déportation ainsi qu’à l’association Histoire et Patrimoine, les archives municipales devenues métropolitaines ont besoin d’une sérieuse extension, elles qui sont soumises depuis 15 ans maintenant à une injonction de l’Etat réclamant plus d’espaces selon ses canons obligatoires. L’activité montante de la Cinémathèque, amenée à se développer, réclame aussi de nouveaux locaux pour mieux accueillir public. D’où l’idée de créer ici un « pôle patrimonial » avec ces quatre éléments associatifs ou municipaux cités sur pas moins des 9 000 des 27 000 m2 planchers disponibles, une fois la réhabilitation effectuée. L’installation est prévue pour 2026.

Il aurait été de toute façon plus cher financièrement et environnementalement de démolir et reconstruire.

Gaël Perdriau, maire de Saint-Etienne

Ce devrait être en même temps qu’un autre « service » municipal lui aussi monté en puissance ces dernières années : la police municipale et son centre supervision urbain (CSU). Il gère plus de 400 caméras de surveillance, trois fois plus qu’en 2014 tandis que les effectifs des agents ont, eux, dans le même temps doublé. Ici, 4 000 m2 lui seront accordés pour travailler avec plus d’aisance avec, en prime, les transferts du bureau de Tarentaize non loin et du centre de commandement et PC de crise, actuellement à l’hôtel de ville. Police municipale et pôle patrimoniale s’installeront donc dans 3 ans au sein de ces 13 000 m2 que constitue le « socle », la base soutenant la tour. Socle d’ailleurs actuellement étendu côté sud du bâtiment – le parking silo ayant été démoli – au pied de la Colline des Pères, lui faisant ainsi perdre le statut IGH. Car face à la place Sainte-Barbe, il n’y aura non pas un mur mais un vaste parvis au pied de la tour, donc au niveau de la rue.

200 des 400 salariés d’Habitat et Métropole transférés

De l’autre côté, l’accès au public du Pôle patrimonial et culturel se fera, lui depuis l’avenue Emile-Loubet avec, là aussi, à l’angle de la rue du Mont-d’Or, un parvis aménagé où l’élargissement des trottoirs est prévu. Reste la tour donc, réservée, elle, à l’autre grand futur occupant des lieux : Habitat et Métropole. Le bailleur social de l’agglomération a été officiellement constitué en 2021 par la fusion d’Ondaine Habitat, Gier Pilat habitat, de l’Office de Firminy et Métropole Habitat. D’une part pour y installer sur les deux premiers niveaux ce qui est déjà, depuis la fusion, la direction territoriale Furan située rue Honoré-de-Balzac (et siège officiel temporaire même si plusieurs de ses services sont aussi, soit à Firminy, soit à Saint-Chamond). D’autre part, sur les quatre derniers étages de la tour, pour y aménager, le futur siège du bailleur.

Dépouillé de ses finitions obsolètes, le bâtiment est prêt pour la phase aménagement. ©If Média / Xavier Alix

« Nous venons d’œuvrer et continuons à une longue harmonisation technique, de culture de travail aussi, explique son président Jean-Pierre Berger, également 1er adjoint de Saint-Etienne en charge de l’urbanisme. Il manque encore au premier bailleur social un vrai siège pour son efficacité et parfaire son identité. Nous faisons dans le qualitatif et nos locaux se doivent d’être démonstratifs avec cette transformation. » Au total, environ 200 des 400 salariés d’Habitat et Métropole – ceux de la direction Furan et ceux du siège donc – travailleront donc ici, normalement dès 2025. Il y aura bien sûr des bureaux pour tous mais pas des places de parking pour chacun puisque 85 places seront dévolues à Habitat et Métropole. Quelques dizaines de personnes travaillant pour le bailleur sur des fonctions supports utiles à l’ensemble du bailleur devront donc quitter leurs lieux de travail à Firminy et Saint-Chamond dont les directions territoriales restent toutefois en place pour ce qui est de l’opérationnel, du terrain, du contact avec les locataires.

Une centaine de logements

Mais ce n’est pas tout : arguant du développement de la population étudiante et des ambitions métropolitaines en la matière (20 000 étudiants en 2014, 30 000 actuellement, 40 000 visés en 2030), entre le siège et la direction Furan, trois niveaux de la tour accueilleront une centaine de logements pour eux, sinon « pour jeunes actifs » : du T1 aux T3 en location. S’adressant, sans doute avec quelque malice à « la conseillère régionale » qu’est Nicole Peycelon, venue comme adjointe municipale à la tranquillité publique, le maire rappelait le rôle crucial, donc de la Région, du fameux et très débattu CPER dans le développement des établissements d’enseignement supérieur à Saint-Etienne. Avant de souligner « l’engagement que le Crous n’a finalement pas pu tenir » au sujet du logement des étudiants stéphanois : c’est-à-dire « l’incapacité à proposer des logements étudiants au prix du marché local et non uniformisé à échelle nationale ». Une inadéquation que Métropole se chargerait ainsi de gommer, au moins en partie, avec ce type de projets.

Dans sa globalité, le chantier se veut une participation significative aux opérations de rénovation urbaine menées dans le quartier Beaubrun-Tarentaize. Les espaces publics alentour seront ainsi rénovés ans la foulée, annonce la mairie qu’il s’agisse des rues de la Barre et Mont-d’Or, de la place Sainte-Barbe et bien sûr du plus gros morceau, l’avenue Émile-Loubet. Comme pour la Comédie devenue Comète, Gaël Perdriau pronostique en 2026 « un bâtiment qui aura tellement évolué, qu’il donnera l’impression d’être neuf ». Et comme pour l’équipement culturel qui voisine l’ex « Sécu », c’est à l’architecte Dominique Vigier (qui participe aussi au NTB), associé au cabinet Tectoniques, qu’a été confié cette transformation visant à « debunkeriser » ce vaste tènement.

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