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dimanche 28 avril 2024
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Rétablissement du train entre Saint-Etienne et Clermont-Ferrand : là aussi, l’argent va manquer

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620 M€ : c’est l’enveloppe accordée par l’Etat à la préfète de région Fabienne Buccio pour négocier avec le conseil régional le volet mobilité – voulu, pour la première fois, spécifique par Elisabeth Borne – du CPER (Contrat Plan Etat Région) 2021-2027 ainsi considéré comme un avenant à ce dernier. Si un minimum de près de 170 M€ sera capté par des projets routiers, le reste, dévolu essentiellement au ferroviaire sera, entre autres, insuffisant, pour payer la réouverture des 48 km fermés de la ligne entre Saint-Etienne / Clermont-Ferrand…   

Vu l’obstacle financier, ces barrières ne risquent pas d’être levées… Photo depuis la gare de Boën direction Clermont transmise par Le Train 634269

Ses projets devraient déjà être sur les rails. Mais son lancement a été plombé par des négociations ayant démarré avec retard puis ayant bizarrement piétiné, particulièrement en Aura, victime, aussi pour certaines zones de circonstances aggravantes. Le CPER (Contrat plan Etat Région) 2021-2027, maillé par les sous-conventionnements qu’il induit avec les Départements puis les intercommunalités, a été adopté ce printemps avec donc… deux ans de retard ! Cela alors qu’il conditionne une foule d’investissements publics liés aux mandats politiques en cours et sur lesquels comptent, aussi, de nombreuses entreprises. Ce n’est pourtant toujours pas fini : la « mobilité » fait cette fois l’objet d’un volet spécifique voulu par Elisabeth Borne : un avenant au CPER global donc mais négocié à part. Le « mandat de négociations » dans lequel l’Etat donne ses consignes aux préfets de Région, n’a été reçu qu’il y a un peu plus d’un mois par Fabienne Buccio, préfète d’Auvergne-Rhône-Alpes.

Nous avons pu consulter ce document de 21 pages qui fixe enveloppe globale, sous enveloppes, les priorités et qui rappelle le besoin de cohérence avec les orientations législatives sur la mobilité. C’est ainsi un total de 620 M€ que l’Etat va consacrer, sur ces deniers, à la mobilité d’Aura dans cet « avenant 2023-2027 » du CPER autour de projets partenariaux avec le conseil régional, objets donc des négociations en cours. Ce qui n’inclut pas des dispositifs et financements accordés parallèlement comme la démarche post A45 d’amélioration de la mobilité entre les agglomérations de Saint-Etienne et Lyon (à laquelle 400 M€ sont spécifiquement attachés). Cependant, c’était le cas avant aussi sur 2015-2021, mais nous ignorons dans quelle ampleur et comment le comparer, la préfète doit utiliser une partie de ses 620 M€ de crédits à « en priorité achever la réalisation des opérations engagées lors du CPER 2015 – 2021 »

Qui doit payer quoi ?

Autre « priorité expressément marquée » parmi d’autres au sein du document (tout comme le développement du report modal notamment), celle « pour le transport ferroviaire et les transports du quotidien ainsi qu’une attention portée par l’amélioration des réseaux existants ». Malgré cette consigne très favorable au ferroviaire, le total de la somme, et ce qui est, sur celle-ci, assurément acquis au rail, a laissé plus que dubitative dans un communiqué publié la semaine dernière, l’association Le Train 634269 qui milite pour la réouverture complète de la ligne ferroviaire Saint-Etienne / Clermont-Ferrand dont 48 km, de Boën à Thiers sont abandonnés depuis maintenant sept ans. Il faut dire que selon la dernière étude du Cerema, la réouverture de ces 48 km est chiffrée, à elle seule, entre 115 et 160 M€… Comment imaginer, dès lors, que près d’un quart de l’enveloppe totale accordée par l’Etat à la région Aura sur les transports (rail, route et autres confondus) puisse y être consacré ?

Les réouvertures de lignes ne sont pas éligibles à une contractualisation.

Mandat de négociation du CPER Aura

Surtout que le conseil régional considère, lui, sur ce sujet, qu’il n’a pas à sortir de ses compétences : à lui, la tâche d’acquérir et de faire rouler par son prestataire avec qui il contractualise, la SNCF (donc l’Etat !), des trains (et des cars si besoin le cas échéant). A l’Etat, estime-t-il, en tant que propriétaire des rails, de les entretenir, les rénover et éventuellement les rouvrir. Or, s’il est demandé par le gouvernement à Fabienne Buccio de concentrer « l’effort sur la régénération des petites lignes », que « les projets de modernisation ou développement devront rester exceptionnels et précisément justifiés », on lit un peu plus loin dans son mandat de négociation : « Les réouvertures de lignes ne sont pas éligibles à une contractualisation ». Il semble que la messe soit bien dite à lecture de cette seule phrase pour les fidèles de la ligne de train Saint-Etienne/Clermont. Ceux qui prient pour ne plus avoir sur leur parcours à descendre des wagons afin de prendre un de ces cars incertains et chronophages de substitution entre Thiers et Boën. L’intégralité de la ligne est cependant officiellement seulement suspendue et non fermée.

Contreparties financières  

Sept ans que les deux agglomérations françaises – 300 000 habitants côté Puy-de-Dôme, 410 000 côté Loire – distantes de 145 km (les 48 km fermés compris) via le rail ne sont plus reliées en continu par celui-ci…  Un total de 620 M€, c’est quand même bien supérieur – d’environ 250 M€ – que la somme pronostiquée par le vice-président aux transports de la Région Aura et maire de Vichy, Frédéric Aguilera, interviewé par If début juin. Ce qui ne change toutefois pas grand-chose à la problématique d’ensemble, au moins pour le train « puisqu’il faudrait au minimum 10 fois plus pour répondre à toutes les demandes légitimes sur les lignes ferroviaires dans la région », estime Le Train 634269 faisant ainsi écho aux propos de Frédéric Aguilera dans If il y a un peu plus d’un mois. Pire selon l’association : seulement 54 M€ seront dévolus, assure-t-elle, pour l’ensemble des « lignes de desserte fine » du territoire dans lequel elle range le rétablissement de la portion Boën/Thiers de Saint-Etienne/Clermont donc. Cela contre 110 M€ pour le « réseau structurant », 53 M€ pour l’accessibilité PMR et 32 M€, seulement, pour améliorer le fret ferroviaire, là aussi pourtant identifié comme priorité…

Synthèse financière extrait du mandat de négociations : Fabienne Buccio a 620 M€ de l’Etat à donner dans le cadre des négociations.

Sur le travail à mener à propos de l’existant, dans le document de mandat, sont évoqués les projets d’amélioration de la vallée de l’Arve, Aix/Annecy ou encore les lignes interrégionales de l’Aubrac et des Cévennes. RAS sur Saint-Etienne/Clermont… 249 M€, sur 620 M€ donc, sont spécifiquement accordés au ferroviaire. Des sommes qui, effectivement, correspondent avec exactitude à la synthèse financière donnée par le document de mandat négociation. Le rail pourra cependant compter sur davantage encore, via ces 182 M€ consacrés dans une « sous enveloppe » aux « services express régionaux métropolitains ». « Sous enveloppe » jugée floue par Le Train 634269 puisqu’elle a la possibilité d’intégrer aussi des projets de nature routière en connexion avec le rail. A noter enfin, toujours dans les consignes données par le gouvernement à Fabienne Buccio à propos, là, des lignes de desserte fines que leur « financement ne pourra être accordé qu’en contrepartie d’un financement de la Région pour les projets de modernisation des axes ferroviaires nationaux structurants ».

Côté routier, la RN7 a la « priorité »

Du coup, « l’Etat peut mettre dans la balance vis-à-vis de la Région Aura qu’elle est une des rares à n’avoir pas signé un « Protocole d’accord État/Région relatif à l’avenir des petites lignes ferroviaires » mais en attendant, le temps passe et c’est l’intérêt commun qui est victime de ces enfantillages – « c’est toi ! », « non c’est toi ! » – qui en pâtit », analyse l’association. Sur la globalité, tous transports confondus, difficile de comparer toutefois l’investissement de l’Etat dans la mobilité par l’Etat via le CPER entre celui de 2015/2021 et 2021/2027. Le Train 634269 parle de 714 M€ dans le précédent contre 620 cette fois. Mais des éléments concernant la mobilité ont été intégrés aux « volets » classiques signés eux, ce printemps. Pour sortir du seul train, il est intéressant de noter qu’au niveau routier (169 M€), la priorité de négociation de la préfète Fabienne Buccio porte sur la poursuite de la mise à 2 x 2 voies de la RN7 dans l’Allier et la Loire ainsi que l’échangeur de la Varizelle à Saint-Chamond.

Ce dernier est donc bel et bien sorti des financements de la démarche d’amélioration de la mobilité entre Saint-Etienne et Lyon post A45 même s’il apparaît dans ses documents de travail comme son service presse nous l’avait indiqué dans notre dernière publication sur ce sujet. Pour la route aussi, des opérations engagées dans le précédent CPER doivent être achevées par le nouveau. Et le cofinancement – il s’agit pourtant du réseau national pas des routes départementales, métropolitaines ou communales -, est une condition sine qua non. « A ce titre, le volume de crédits alloués au volet routier justifie de reposer la question du niveau de cofinancement au cas par cas », donne pour consigne le gouvernement. En revanche, le transfert de certaines routes nationales à titre de test (dans la Loire, RN88 et RN7) à la Région, ne doit pas rentrer en jeu dans l’analyse « fondée sur le seul intérêt fonctionnel ». Pour compléter le tableau, le CPER doit abonder de 10 M€ des projets de véloroute, autrement subventionnés par ailleurs. Tout comme, avec la même somme, ceux portant sur la multimodalité des transports en commun intercommunaux…

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